Hanoï (VNA) – Selon le professeur associé et docteur Nguyen Trong Phuc, ancien chef de l’Institut d’histoire du Parti, la mise en œuvre de la politique selon laquelle le secrétaire du Comité du Parti ne doit pas être originaire de la localité concernée contribuera à renforcer la conscience de travailler pour la cause révolutionnaire commune du pays. Parallèlement, cette mesure permettra de limiter les relations sensibles, afin que le dirigeant puisse agir avec intégrité et objectivité, au service du développement.
Des traditions administratives anciennes à une orientation politique moderne
Selon Nguyen Trong Phuc, la politique actuelle de rotation des cadres et de nomination de secrétaires des Comités provinciaux et municipaux du Parti non originaires de la localité où ils exercent n’est pas une innovation récente, mais s’inscrit dans une tradition profondément ancrée dans l’histoire nationale.
Nguyen Trong Phuc rappelle que, dès le règne du roi Lê Thanh Tông à la fin du XVe siècle, un principe clair avait été établi : les responsables administratifs des localités – l’équivalent des dirigeants provinciaux actuels – ne devaient pas être originaires des territoires qu’ils gouvernaient. Ils étaient désignés directement par la cour impériale et soumis à des règles strictes : ils ne pouvaient ni se marier ni construire de résidence dans la localité placée sous leur autorité.
De nombreuses dynasties vietnamiennes successives ont poursuivi cette pratique. Sous la dynastie des Nguyen, plusieurs hauts fonctionnaires du Nord furent envoyés exercer des fonctions dans le Sud, à l’image du célèbre mandarin Nguyen Cong Tru, nommé gouverneur d’An Giang. D’autres furent mutés des régions montagneuses vers les plaines, ou inversement, selon les besoins de l’administration royale.
Après la Révolution d’Août 1945, durant la période de construction du socialisme au Nord, puis après la réunification du pays, le Parti communiste du Vietnam a poursuivi cette orientation en pratiquant la rotation des cadres. Dans le cadre du Renouveau (Đổi mới), à partir des années 2000, le Bureau politique a adopté plusieurs résolutions importantes sur la mobilité du personnel entre les localités, ainsi qu’entre les échelons central et local.
Le spécialiste souligne que cette conception trouve également son fondement dans la pensée marxiste-léniniste : dès les années 1921-1922, Lénine avait préconisé le transfert de cadres du pouvoir central vers les régions, et inversement.
Selon Nguyên Trong Phuc, la nomination de secrétaires des Comités provinciaux et municipaux du Parti non originaires de la localité concernée contribue à renforcer la conscience que « le pays tout entier est notre patrie commune », et que chaque cadre œuvre pour la cause révolutionnaire nationale, au-delà des appartenances régionales.
« Ne faisons pas de distinctions rigides entre votre village et le mien : une telle mentalité ne peut qu’entretenir le localisme et freiner le développement », souligne-t-il. Il rappelle par ailleurs qu’à l’occasion des réorganisations administratives récentes – fusions de villes et de provinces – l’esprit commun qui prévaut est celui de l’unité nationale : « Tout le territoire appartient à la Patrie, aucune localité ne doit se replier sur elle-même ; l’unité et la cohésion doivent devenir la tendance dominante ».
Nguyen Trong Phuc observe que, lorsque les dirigeants sont originaires de la localité qu’ils administrent, ils peuvent entretenir des liens familiaux, claniques ou économiques susceptibles d’influencer leurs décisions. Cette proximité, bien que naturelle, peut parfois générer des interférences, voire des conflits d’intérêts.
Citant les propos du secrétaire général du Parti, To Lam, lors d’une rencontre avec des électeurs de Hanoï, Nguyen Trong Phuc indique que plusieurs affaires récentes de mauvaise gestion locale concernent des responsables issus de la même province. Selon lui, la politique de désignation de secrétaires de niveau provincial non originaires de la localité concernée constitue un moyen efficace de limiter les relations sensibles et de permettre aux dirigeants de travailler avec intégrité et impartialité.
Face à certaines réserves évoquant les difficultés que pourraient rencontrer des dirigeants venus d’ailleurs – manque de connaissance du terrain, intégration difficile, voire isolement –, Nguyen Trong Phuc affirme que la compétence, le dévouement et la sincérité envers la Patrie sont les meilleurs garants du succès. « Un dirigeant capable et engagé comprendra rapidement les spécificités locales et gagnera la confiance du peuple », estime-t-il.
Il ajoute qu’un secrétaire provincial ou municipal non originaire doit jouer pleinement son rôle de noyau dirigeant, maintenir la cohésion interne, adopter des méthodes de travail justifiées, responsables et transparentes, et fédérer les forces locales dans un esprit de solidarité et de loyauté.
Nguyen Trong Phuc se déclare favorable à l’élargissement du principe de non-localité à d’autres postes clés, tels que les présidents des Comités populaires, les présidents des Commissions de contrôle ou les chefs des inspections locales. Il plaide également pour une intensification des échanges de cadres entre les niveaux central et local, afin de renforcer les compétences pratiques, d’enrichir l’expérience de terrain et de réduire les risques de bureaucratie et d’éloignement du peuple.
Selon lui, « un secrétaire provincial ou municipal non originaire de la localité concernée doit être une personne capable de prendre des décisions objectives et justifiées, à l’abri de toute influence d’intérêts particuliers ou de relations complexes. C’est à cette condition qu’il pourra accomplir efficacement les missions confiées par le Parti et le peuple ».
Des décisions plus objectives, une audace et une réactivité accrues
Le docteur Nguyen Tien Dinh, ancien vice-ministre de l’Intérieur, salue lui aussi la politique de nomination de secrétaires des Comités provinciaux et municipaux du Parti non originaires de la localité concernée, la qualifiant de « très bonne initiative », qui sera encore appliquée à d’autres fonctions.
Soulignant que les cadres venant d’autres localités ne sont pas liés par des relations personnelles, Nguyen Tien Dinh analyse qu’un cadre originaire de la localité concernée, qui accède ensuite à des fonctions de direction, peut être contraint par des liens familiaux ou des relations de parenté au sein de cette même localité. Par conséquent, un dirigeant non originaire osera penser et agir, prendra des décisions plus rapidement et assumera davantage la responsabilité de ses choix.
Cependant, selon l’ancien vice-ministre, la nomination d’un dirigeant de comité du Parti non originaire de la localité concernée peut rencontrer certaines difficultés. S’il bénéficie du soutien de la hiérarchie, des cadres et de la population locale, il accomplira bien sa mission. Dans le cas contraire, il sera confronté à davantage de défis.
Concernant l’impact de cette politique sur la prévention et la lutte contre la corruption, le gaspillage et les pratiques malsaines, Nguyen Tien Dinh affirme qu’un dirigeant non originaire sera plus objectif et ne sera pas contraint par des relations avec les entreprises.
Il donne l’exemple suivant : un cadre ayant passé de nombreuses années à travailler dans sa région natale, puis accédant à un poste de direction, développe inévitablement de nombreuses relations, dont certaines sont positives pour le développement, mais d’autres peuvent verser dans le négatif et l’intérêt de groupe. Il cite l’affaire du groupe Phuc Son dans l’ancienne province de Vinh Phuc (aujourd’hui province de Phu Tho), où les relations entre responsables et entreprises se sont nouées sur plusieurs décennies, influençant de nombreux domaines.
Une excellente orientation, sous condition d’un choix rigoureux des cadres
L’orientation visant à appliquer à l’avenir la désignation de certains postes de direction provinciaux et municipaux à des cadres non originaires de la localité concernée – tels que le président du Comité populaire, le président de la Commission de contrôle ou le chef de l’Inspection locale – est jugée « tout à fait pertinente » par Nguyen Tien Dinh.
Selon lui, « si davantage de postes de responsabilité étaient confiés à des personnes venues d’autres provinces, l’appareil administratif gagnerait en efficacité et en transparence, travaillant véritablement pour le développement commun ».
Partageant cet avis, Ngo Van Suu, ancien chef du Département 1 de la Commission centrale de contrôle du Parti, estime que la nomination de secrétaires des Comités provinciaux ou municipaux du Parti, ainsi que d’autres responsables clés non originaires de la localité concernée, permettrait de prévenir et de limiter efficacement la corruption, les pratiques malsaines et les dérives telles que le favoritisme familial, le népotisme ou les « réseaux d’intérêts occultes » liés à certains groupes économiques.
« Un secrétaire du Comité provincial du Parti venant d’une autre région ne sera pas influencé par des relations complexes ni contraint par des liens personnels ou claniques », explique-t-il. « Ses décisions seront donc plus objectives et guidées par l’intérêt général, plutôt que par des considérations particulières. »
Concernant le poste de président de la Commission de contrôle, Ngo Van Suu souligne que l’application de cette orientation permettrait d’élever la qualité du contrôle et de la supervision, garantissant que toutes les décisions soient prises avec équité, précision et rapidité, sans influence de liens familiaux ou de relations personnelles.
Toutefois, Ngo Van Suu rappelle que la question fondamentale demeure celle du choix des cadres. « Si un dirigeant venu d’une autre province manque de compétences ou d’esprit de réforme, il ne pourra rien accomplir, voire freiner le développement local », avertit-il.
Il insiste ainsi sur la nécessité, pour les organes compétents, d’exercer une vigilance et une clairvoyance accrues dans la sélection, la recommandation et la nomination des responsables, afin de garantir l’adéquation entre les qualités du cadre et les exigences du poste.
Partageant cette vision, Nguyen Tien Dinh souligne lui aussi que le facteur humain demeure décisif. « Qu’il soit originaire de la localité ou non, un dirigeant doit être le noyau de l’unité, capable de fédérer le Parti et la population locale autour d’un même objectif : le développement commun », déclare-t-il.
Selon lui, un secrétaire du Comité du Parti venu d’une autre province doit avant tout faire preuve d’intégrité, d’impartialité et de dévouement, en mettant toute son énergie au service du développement de la localité où il exerce et du pays.
« Mais si un cadre venant d’ailleurs utilise sa position pour favoriser ses proches, importer son propre réseau et créer de nouveaux cercles d’intérêts, cela serait inacceptable », affirme-t-il.
Chaque cadre – en quittant sa terre natale pour prendre ses fonctions dans une nouvelle région – porte l’immense responsabilité d’élargir sa vision, d’élever sa pensée stratégique, de devenir un enfant de multiples localités et de servir une seule Patrie commune : le Vietnam. Car, après tout, la Patrie est la plus grande terre natale de chaque dirigeant. Pour ces dirigeants, le lieu d’affectation d’une mission est leur patrie – un espace de dévouement et de service. – VNA