Hanoi (VNA) – Le compositeur Trân Tiên vient de se voir décerner le Grand Prix "Bùi Xuân Phái - Pour l’amour de Hanoi" 2025 pour ses contributions exceptionnelles envers Hanoi à travers d’excellentes chansons nourries par les ressources culturelles du fleuve Rouge, du Vieux quartier de la capitale et de Xu Doài.
Né en 1947, Trân Tiên a grandi et s’est attaché aux rues de Hanoi. Dans sa mémoire, la ville est paisible, ses rues sont vides, ses gens clairsemés. Hanoi est simple, ordinaire, avec ses briques brisées, ses murs couverts de mousse et ses arbres familiers. "Je n’oublierai jamais Hanoi dans mes souvenirs d’enfance. J’ai arpenté de nombreuses rues. L’odeur de la médecine traditionnelle s’est imprégnée en moi. J’écoutais les sons vagues, la douce respiration du Vieux quartier. Une autre odeur me hante, celle des feuilles mortes dans les rues après la pluie", confie-t-il.
Trân Tiên a marqué de son empreinte la musique vietnamienne contemporaine. Il s’est distingué non seulement par sa créativité libre et riche en improvisation, mais aussi par l’ancrage culturel et mémoriel de ses œuvres. Dans ses compositions, Hanoi n’est pas seulement une capitale, mais aussi un lieu de souvenirs d’enfance, de culture populaire du Nord, de rues animées et de campagne de la région Xu Doài (région à l’Ouest de la ville, constituée en grande partie de l’ancienne province de Son Tây, aujourd’hui en banlieue de Hanoi).
Triangle culturel
Selon le chercheur musical Nguyên Quang Long, l’admiration des chansons de Trân Tiên consacrées à Hanoi - Ngẫu hứng sông Hồng (Improvisation sur le fleuve Rouge), Lữ khách sông Hồng (Voyageur du fleuve Rouge), Hà Nội ngày ấy (Hanoi d’autrefois), Hà Nội những năm 2000 (Hanoi dans les années 2000), Ngẫu hứng phố (Improvisation sur les rues), Phố nghèo (Rue pauvre), Mặt trời bé con (Petit soleil), Mẹ tôi (Ma mère), Quê nhà (Village natal)… - révèle que la créativité du compositeur est intimement liée au "triangle culturel" fleuve Rouge - Vieux quartier de Hanoi - Xu Doài. Trois espaces géographiques, mais aussi trois strates culturelles et trois sources d’inspiration qui façonnent son image de Hanoi.

Le fleuve Rouge est à l’origine de la culture du delta du fleuve Rouge. Avec Ngẫu hứng sông Hồng ou Lữ khách sông Hồng, Trân Tiên ne se contente pas de décrire un fleuve traversant la ville, mais ravive également des souvenirs historiques, des chants folkloriques, des récits sur les alluvions et le rythme de vie des Vietnamiens. Hanoi apparaît alors comme un centre culturel, où le fleuve est à la fois géographique et symbolique.
Le Vieux quartier de Hanoi est un espace de mémoire, de vie urbaine. Des chansons comme Phố nghèo, Ngẫu hứng phố… ont recréé un Hanoi familier avec ses toits de tuiles brunes, ses feuilles d’amandier tombantes, le sifflement des trains et ses petits cafés. La capitale dans sa musique est donc à la fois proche, poétique et pleine d’émotions humaines.
Xu Doài offre une profondeur inédite. Dans les compositions de Trân Tiên, l’image de cette région transparaît à travers des chants folkloriques, des images de villages, de temples, de bac, de berge… C’est là que se perpétuent les souvenirs culturels, un fondement populaire qui enrichit l’espace de Hanoi dans sa musique.
L’ensemble fleuve Rouge - Vieux quartier - Xu Doài forme un triangle culturel, à la fois historique et symbolique. Grâce à cela, Hanoi dans la musique de Trân Tiên ne se limite pas à une ville, mais devient un symbole de la convergence entre tradition et modernité, entre rues et villages, entre le flux des alluvions et les sédiments des souvenirs.
Trân Tiên dépeint la capitale non seulement à travers les noms de lieux, mais aussi à travers un vaste espace culturel, plein de vitalité et imprégné de l’âme vietnamienne.
"Musicien des rues de Hanoi"
Nombreux sont ceux qui ont surnommé Trân Tiên "le musicien des rues de Hanoi", avec ses chansons improvisées sur les rues et ses chants empreints de tristesse au bord du fleuve Rouge, ou encore un vieil escalier, un sifflet de train qui invitent au long voyage pour retrouver la ville.

La musique de Trân Tiên n’est donc pas seulement faite pour être écoutée, chantée, mais aussi pour se souvenir, aimer, préserver une part de l’âme de Hanoi en chacun de nous.
Pour ce compositeur, même après des décennies passées loin de sa ville natale et malgré ses profondes transformations, une émotion particulière demeure : "La ville a beaucoup changé. Il y a beaucoup de nouvelles rues que je ne connais pas. Mais en moi, l’image du vieux Hanoi, comme les peintures de Bùi Xuân Phai, demeure".
"Fort d’une carrière exceptionnelle, où chaque phrase, chaque mot, respire l’essence de Thang Long - Hanoi, la capitale millénaire, Trân Tiên mérite d’être un musicien itinérant, imprégné de l’âme de Hanoi", estime le poète Bang Viêt.
Pour le musicien Nguyên Cuong, Trân Tiên est l’un des meilleurs compositeurs sur Hanoi. "La capitale est une source inépuisable d’inspiration pour les artistes. De nombreuses chansons remarquables ont été écrites sur la ville pendant les années de Résistance contre les Français, contre les Américains et pendant les années de paix, mais les écrits de Trân Tiên sur Hanoi laissent toujours une empreinte particulière. Enfant de Hanoi, il admire la ville de près comme de loin, ce qui explique la profondeur de sa perspective", déclare-t-il. Il est particulièrement impressionné par Hà Nội những năm 2000 de Trân Tiên : "C’est la meilleure chanson sur Hanoi depuis le retour de la paix. Je ne sais pas combien d’années il faudra pour qu’une autre chanson soit digne de la surpasser".
Être accepté et aimé par le public est la plus belle récompense pour un musicien attaché à Hanoi. Trân Tiên a partagé que toutes ses chansons sur la ville ont été publiées et qu’il ne gardait pas sa "collection privée" pour lui-même.
Et le compositeur répète une phrase : "Hanoi est ma mère, ma sœur, mes amis d’enfance. Peu importe la richesse ou la pauvreté, la maladie ou la solitude de chacun, son cœur restera à jamais ancré dans la ville natale, Hanoi. J’ai mis tout ce que j’avais à dire dans mes chansons". – CVN/VNA