Hanoi (VNA) – Véritable symbole historique et architectural de Hanoi depuis 123 ans, le pont Long Biên est à l’aube de sa renaissance. L’enjeu est de taille: préserver un patrimoine centenaire tout en le transformant en moteur économique, culturel et touristique pour la capitale.
Lors d’un colloque international intitulé «Étude de rénovation et de valorisation historique et culturelle du pont Long Biên», organisé le 16 septembre par le Département municipal de la construction en partenariat avec la société française Artelia, des experts ont présenté plusieurs pistes visant à sauvegarder l’ouvrage tout en réinventant sa place dans la vie urbaine.
Construit entre 1899 et 1902 et initialement baptisé pont Paul Doumer, le pont Long Biên est un grand témoin de l’Histoire et un lien vital entre le passé et le présent de la capitale. Mais après plus d’un siècle d’exploitation, l’ouvrage s’est considérablement dégradé, et sa restauration suscite aujourd’hui une vive attention de la part des autorités, de la population et des experts internationaux.
En 2023, dans le cadre du 50ᵉ anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la France et le Vietnam, le gouvernement français avait annoncé un projet d’étude sur la rénovation du pont Long Biên, d’un montant total de plus de 710 mille euros, comme l’a rappelé Duong Duc Tuân, le vice-président du comité populaire de Hanoi.
«Il s’agit d’examiner de manière globale l’état structurel de l’ouvrage, de proposer des solutions urgentes de consolidation et de réparation, mais aussi d’envisager les futures fonctions du pont en tant qu’ouvrage emblématique du patrimoine culturel et historique de la capitale. Je suis convaincu que les avis et recommandations des experts contribueront à mettre en évidence les valeurs historiques et culturelles de ce pont», a-t-il indiqué.
Pour Olivier Brochet, l’ambassadeur de France au Vietnam, le pont Long Biên incarne non seulement la résilience de Hanoi, mais aussi un lien qui unit les deux pays.
«À son inauguration en 1903, le pont Long Biên représentait une prouesse technologique: c’était l’un des plus longs ponts du monde, qui reliait les deux rives du fleuve Rouge grâce à une architecture métallique novatrice. Maintes fois bombardé, il a pourtant continué, durant toute la guerre, à maintenir le lien entre les familles et les enfants évacués hors de la ville. Aujourd’hui, le pont demeure une artère essentielle pour les habitants qui l’empruntent chaque jour entre Long Biên et le centre de Hanoi, mais aussi un site touristique emblématique de la capitale. Plus qu’un ouvrage d’art et de transport, le pont de Long Biên est un lieu de rencontre et de vie: les Hanoïens s’y promènent, se retrouvent à ses abords pour contempler le fleuve, les montagnes et la ville moderne qui s’étend sous leurs yeux. La réhabilitation du pont Long Biên constitue un enjeu majeur de notre histoire partagée, auquel nous sommes prêts à contribuer dans le cadre du renforcement de notre relation bilatérale», a-t-il confié.

Le projet d’étude sur la rénovation du pont Long Biên a été confié à la société Artelia, une société d'ingénierie française de réputation mondiale. L’équipe a réalisé une évaluation complète de l’état actuel de l’ouvrage, élaboré une modélisation 3D des 19 travées du pont, analysé les impacts climatiques et hydrologiques, tout en proposant des solutions de renforcement d’urgence, des options de rénovation à moyen et long terme, ainsi que des scénarios d’exploitation durable.
«Nous avons lancé cette étude en septembre 2024. De nombreux comités de pilotage et comités techniques se sont ensuite tenus, aboutissant à la finalisation du projet en juillet dernier. J’ai eu la chance, il y a vingt ans, de faire partie de l’équipe qui avait mené à bien la première étude financée par la France sur le pont Long Biên. J’espère sincèrement qu’à l’issue de ce séminaire, des travaux de rénovation ambitieux pourront être décidés, avec le soutien des autorités françaises, afin de rendre au pont Long Biên toute sa splendeur», a indiqué Eric Gratton, le directeur général d’Artelia Vietnam.
Toujours selon l’équipe d’Artelia, compte tenu des variations hydrologiques du fleuve Rouge, les travaux les plus urgents consistent à réparer et remplacer les éléments métalliques détériorés, tout en renforçant les piles et en protégeant le lit du fleuve contre l’érosion. Pour l’avenir, les scénarios d’utilisation du pont prévoient de restaurer en partie sa conception originale de 1902, de conserver les travées reconstruites en 1972, et de maintenir la voie ferrée afin d’accueillir des trains touristiques légers.
Pour Trân Huy Anh, membre permanent de l'Association des architectes de Hanoi, cette étude sur le pont Long Biên ouvre de nouvelles perspectives.
«Après plusieurs décennies de recherches, les architectes de Hanoi ont proposé un tracé de chemin de fer reliant Yên Viên au centre-ville en passant par le pont. Cette idée a le mérite de mettre en valeur sa fonction de transport, tout en soulignant son importance historique, culturelle et symbolique. L’histoire montre que plus un pont historique est intégré à la vie urbaine, plus il demeure vivant et intemporel», a-t-il fait observer.
Il ne s’agit donc pas que de préserver un pont vieux de plus de 120 ans, chacun l’aura compris. Il s’agit également de repenser les deux rives du fleuve Rouge et de soutenir un développement urbain durable à Hanoi. L’une des idées clé pour valoriser le pont Long Biên consiste à exploiter la zone des 131 arches en pierre de la rue Phung Hung. Celles-ci pourraient devenir des espaces d’exposition, des commerces ou des cafés, créant ainsi une promenade reliant les berges de la rivière au quartier ancien, l’idée étant de créer des espaces ouverts où habitants et touristes pourront ressentir le pouls de Hanoi, à l’ombre du pont.
Alors que le pont Long Biên s’apprête à entamer une nouvelle phase de sa longue histoire, sa rénovation illustre parfaitement l’alliance entre préservation du patrimoine et dynamisme urbain. Le pont est prêt à traverser le temps et à inspirer les générations futures. – VOV/VNA