Le Mékong, d'une longueur totale de plus de 4.800 km, traverse six pays que sont la Chine, le Myanmar, le Laos, la Thaïlande, le Cambodge et le Vietnam. Il est le 2e plus riche fleuve en matière de ressources halieutiques dans le monde, juste après l'Amazone, a affirmé Nguyen Huu Thien, ancien chef du groupe consultatif national du Vietnam sur l'évaluation environnementale stratégique des projets hydroélectriques sur le cours principal du Mékong. Plusieurs estimations indiquent que le bassin versant de ce fleuve recense plus de 1.200 espèces de poissons. La diversité d'espèces est notamment remarquable dans le delta du Mékong. Selon des spécialistes, le delta comprend 486 espèces de poissons de toutes tailles - allant de quelques centimètres à quelques mètres.
Les poissons du Mékong ont un rôle crucial pour la sécurité alimentaire dans la partie aval du fleuve. Le Cambodge, la Thaïlande, le Laos et le Vietnam ont tous une consommation de poissons d'eau douce par habitant parmi les plus élevées dans le monde. Environ 2 millions de tonnes de poissons et 0,5 million de tonnes d'autres espèces aquatiques sont pêchés chaque année dans le bassin du Mékong, outre 2 millions de tonnes de poissons provenant de l'aquaculture. La pêche contribue ainsi à la diversification des moyens de subsistance de nombre de gens, notamment les pauvres qui doivent vivre des ressources du fleuve.
De nombreuses études dans le monde indiquent que les barrages hydroélectriques affectent l'écosystème et le système hydrologique des fleuves en empêchant les flux migratoires des poissons. Une étude sur l'Amazone montre que les barrages affectent le déplacement de différentes espèces de poissons, ce qui fait chuter la pêche au bas du fleuve de 70 %. Or, la plupart des espèces piscicoles du Mékong sont migrantes et les influences des barrages hydroélectriques sont indéniables. Les barrages nuisent en outre à leur habitat et leurs aliments car ils interrompent le cycle naturel des crues et rend le lit inhabitable.
Selon le spécialiste Nguyen Huu Thien, le bassin et le delta du Mékong ont deux saisons sèche et des crues, avec deux saisons d'intervalle. Ces saisons d'intervalle sont particulièrement importantes car elles constituent des signes informant les espèces aquatiques des moments convenables pour migrer, se reproduire ou effectuer d'autres activités dans leur cycle de vie. Les barrages hydroélectriques, avec leurs réservoirs et leurs déversements, vont raccourcir ou faire disparaître les saisons d'intervalle. La transition de la saison sèche à la saison des crues et vice-versa se déroulera brusquement ou rapidement en quelques jours. Les espèces ne pourront plus effectuer normalement leurs activités. Par ailleurs, un rapport d'évaluation environnementale stratégique des barrages hydroélectriques sur le cours principal du Mékong, publié en 2010, montre que ces ouvrages empêchent les flux d'alluvions transportant des nutriments essentiels pour les espèces, notamment dans le delta du Mékong.
Développer l'hydroélectricité sur le Mékong exige ainsi que tous les pays riverains participent aux études pour éviter tout effet négatif. Nguyen Nhan Quang, spécialiste en gestion de bassins de fleuves, estime que les effets sur les espèces migrantes et les alluvions doivent être précisés davantage en menant des études scientifiques minutieuses, dans le but d'assurer un développement durable. -VNA
Il est vrai que l'hydroélectricité est considérée comme une "énergie verte" mais les projets concernant le Mékong menacent de produire des effets inverses sur ses ressources halieutiques et les gens qui vivent grâce à ce fleuve, selon des experts.