Le Vietnam est le 16e pays du monde en termes de biodiversité. Il est aussi, hélas, une plaque tournante du trafic d’animaux sauvages. Cependant, le pays a pris des mesures énergiques afin de tenter d’y mettre un terme et de les protéger. Au tour du chasseur d’être chassé...

Un spectacle désolant. Comment réagir autrement à la vue du déclin drastique des populations de rhinocéros dans le monde, qui sont passées de 75.000 individus en 1970 à 25.000 aujourd’hui. Leur crime ? Posséder une corne - constituée de kératine, comme les ongles humains - qui se négocie jusqu’à plusieurs dizaines de milliers de dollars le kilo sur le marché noir.

En Afrique du Sud, sont organisés des safaris légaux, encadrés par les autorités, lors desquels est prélevé un maximum de 15 spécimens. Si un certain nombre de Vietnamiens fortunés y participent, le problème est ailleurs. En effet, des safaris «sauvages» ont régulièrement lieu, où peuvent être massacrés jusqu’à 200 périssodactyles pour leurs cornes, vendues sur le marché asiatique.

Depuis 2008, la chasse illégale et le braconnage grimpent en flèche en raison de la participation de bandes du crime organisé. Plus de 4.000 cornes - soit 12 tonnes - ont ainsi été transportées illégalement de l’Afrique au Vietnam entre 2009 et 2012. C’en était trop pour les autorités sud-africaines qui, en avril 2012, ont décidé de ne plus délivrer de permis de chasse aux ressortissants vietnamiens.

Arrêtons le massacre

Face au risque d’extinction des rhinocéros, l’Organisation de sauvetage des animaux sauvages (WildAid) a lancé le programme «Stop à l’utilisation des cornes de rhinocéros» (2014-2016).

Dans le cadre de ce programme, en avril dernier, le Centre d’action et l’Union pour l’environnement et pour le développement (Change), en partenariat avec l’organisation de sauvetage des animaux sauvages, a lancé, à Hô Chi Minh-Ville, une campagne intitulée «Pour sauver les rhinocéros». De nombreux artistes ont répondu à l’appel.

Maggie Q, actrice américaine et ambassadrice de WildAid, était sur place. «Quelle tristesse de voir autant de rhinocéros tués pour leurs cornes ! Je souhaite aider les gens à mieux comprendre les méfaits de ce trafic et à stopper l’utilisation de ces cornes», a-t-elle déclaré.

Dans le cadre de cette campagne, le Vietnam a lancé la pétition «Des signatures pour sauver les rhinocéros» et une vaste campagne de communication pour mettre en avant le fait que la corne est entièrement composée de kératine et qu’elle ne peut en aucun cas servir de remède.

En outre, plusieurs programmes, destinés à sensibiliser les étudiants sur l’impact réel de l’usage de cornes de rhinocéros et à appeler la communauté à défendre ces animaux menacés d’extinction, ont été organisés dans sept universités saïgonnaises.

Le vice-directeur général de l’Administration de la sylviculture du Vietnam, Nguyên Ba Ngai, informe qu’un an après le lancement de la campagne de communication sur l’absurdité de consommer des produits à base de corne de ce grand mammifère, la demande au Vietnam a diminué de 38%, et particulièrement de 77% à Hanoi. De quoi redonner un peu d’espoir.

La bile d’ours ne fait plus recette

Autre pratique d’un autre âge : la prescription de bile d’ours dans la médecine traditionnelle. Afin de répondre aux besoins croissants des habitants, les ours sont tenus en captivité dans des fermes d’extraction de bile. Si la province de Quang Ninh s’en est fait une «spécialité», le taux d’animaux «élevés» dans les fermes privées mourant de maltraitance et/ou de malnutrition atteint un taux critique.

Pour mettre un terme à cette pratique barbare, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural a décidé, en 2014, d’agir, soutenu par des associations vietnamiennes et internationales de protection de la nature ainsi que par l’opinion publique. Les 4.349 individus détenus ont ainsi été numérotés et surveillés à l’aide d’une puce électronique, avec pour effet l’effondrement de la captivité des ours. Parmi les actions «coup de poing», le Comité populaire de Quang Ninh (Nord), en collaboration avec les organismes concernés, a fait fermer, en mai 2014, tous les services d’achat de bile d’ours proposés dans certains circuits touristiques à la découverte de la province.

En outre, plusieurs centres de sauvetage d’ours sont prêts à recevoir des animaux comme ceux du Parc national de Tam Dao (province de Vinh Phuc, Nord), de Soc Son (Hanoi), du Parc national de Cat Tiên (province de Lâm Dông, hauts plateaux du Centre) et certains établissements dans la province de Ninh Binh (Nord).

Le Centre de sauvetage des ours du Parc national de Tam Dao est le plus professionnel. Implanté dans la vallée de Chat Dâu et construit en 2005 avec le concours (3,3 millions de dollars) du Fonds d’Asie des animaux (AAF), il est le plus moderne d’Asie.

En novembre 2014, l’AAF a également inauguré quatre secteurs semi-naturels. D’une superficie totale de 12.000 m² et d’un coût d’investissement de 18 milliards de dôngs, ces espaces permettent de soigner dans les meilleures conditions possibles 80 plantigrades à la fois.

Depuis 2009, l’AAF a ainsi sauvé 114 ours des cocotiers ou ours noirs d’Asie. Selon un rapport du ministère de l’Agriculture et du Développement rural, fin 2014, «seuls» 1.245 spécimens étaient recensés dans les fermes au Vietnam, soit une baisse de 73% en dix ans.

En outre, la deuxième enquête menée fin 2014 par Education for Nature Vietnam (ENV) résonne déjà comme une victoire. Cette enquête, qui concerne la demande de bile d’ours de 3.000 personnes à Hanoi, Dà Nang et Hô Chi Minh ville, montre que 73% des personnes ayant déjà consommé ce produit en tant que soi-disant remède ont cessé cette pratique depuis deux ans. Et la consommation intérieure a baissé de 61% entre 2009 et 2014. -CVN/VNA