Hanoi (VNA) – Depuis deux décennies, le programme de formation médicale intensive en français (Programme AUF) de l’Université de médecine de Hanoi forme des générations de médecins vietnamiens aux standards internationaux.
Au-delà des enjeux pédagogiques, cette filière d’excellence illustre la persistance des liens entre la France et le Vietnam, tissés autour d’une langue commune et d’ambitions scientifiques partagées. L’un des symboles les plus aboutis de la coopération franco-vietnamienne qui résiste à l’épreuve du temps.
Créée en 2005 avec l’appui de l’AUF, cette filière avait pour ambition de former une génération de médecins capables de maîtriser à la fois les sciences médicales et la langue française, afin d’accéder aux ressources académiques internationales et aux formations spécialisées en France.
Pourtant, au début, rien n’était acquis: manque d’enseignants maîtrisant le français médical, absence de manuels… Les pionniers ont dû inventer, contourner, persévérer.
Le professeur Nguyên Huu Tu, aujourd’hui recteur de l’université, se souvient: «Dans certaines périodes, les soutiens se sont affaiblis. L’AUF a beaucoup aidé au départ, puis les politiques ont changé. Même l’accès aux études en France a été perturbé. Heureusement, ces politiques ont été corrigées et les opportunités pour nos étudiants se sont rouvertes. Aujourd’hui, la formation des internes vietnamiens en France redevient une priorité.»
Chaque année, une cinquantaine d’étudiants rejoignent la filière. Le quotidien de ces étudiants est d’une intensité rare. Dang Gia Phong, président du Club francophone de l’Université de médecine de Hanoï, témoigne: «Les études de médecine en vietnamien sont déjà très exigeantes. Le programme AUF les rend encore plus lourdes que pour les étudiants du cursus classique. Nous n’avons donc pas d’autre choix que d’étudier jour et nuit pour suivre le rythme. Mais ce programme présente aussi de nombreux atouts. Il ouvre d’abord la voie à des opportunités académiques et à des séjours d’études à l’étranger. Dès la deuxième ou la troisième année, si votre niveau de français est suffisant, vous pouvez par exemple postuler pour un stage d’un mois dans des hôpitaux français. En outre, le programme favorise les échanges entre étudiants, enseignants, anciens du cursus — des personnes particulièrement brillantes, qui ont réussi dans leur domaine professionnel.»
Grâce aux bourses de l’AUF, de l’ambassade de France ou d’autres organisations francophones, plus de 120 étudiants ont pu effectuer des mobilités en France. C’est le cas de la jeune docteure Nguyên Thanh Ngoc Binh, aujourd’hui en poste à l’Institut national d’hématologie et de transfusion sanguine souligne: «Le programme m’a permis de bénéficier d’une bourse pour suivre un master de deux ans en France. Avec le Club francophone, nous avons également remporté le Prix Jeunesse de la Francophonie, un moment très marquant.»
Au-delà de la formation médicale, la filière AUF a fait naître une véritable communauté francophone. Depuis 2011, plus de 110 thèses de fin d’études ont été soutenues en français. La filière participe activement aux colloques France–Vietnam, aux conférences Mécon Santé, aux ateliers avec des experts français, ainsi qu’aux congrès scientifiques internationaux organisés par l’université. Les étudiants brillent aussi à l’international: à The Move, organisé chaque année en France, l’Université de médecine de Hanoï a obtenu plusieurs distinctions ces dernières années.
Pour l’AUF, il s’agit d’un partenariat stratégique. «Depuis sa création en 2005, la filière francophone à l’Université de médecine de Hanoï a permis de former plus de 1100 étudiants rigoureusement sélectionnés, alliant une formation médicale de haut niveau à une maîtrise parfaite de la langue française. Cela prépare ces jeunes médecins à intégrer les réseaux francophones internationaux, à accéder aux meilleures formations spécialisées, notamment en France, et à contribuer au développement des soins de santé au Vietnam. L’AUF est fière d’avoir soutenu cette filière de multiples manières concrètes: missions d’expertise pédagogique depuis plusieurs années, appui aux jurys, bourses d’excellence pour les enseignants et les étudiants, financement de la mobilité internationale pour stages et masters, ainsi que la promotion de la dimension francophone dans l’enseignement médical», a rappelé le directeur régional Asie-Pacifique Nicolas Maïnetti.
De nombreux diplômés reviennent aujourd’hui comme enseignants. L’exemple du docteur Trân Trung Hiêu, maître de conférences en physiologie, incarne parfaitement ce cheminement: «Aujourd’hui, c’est avec une grande fierté que je reviens ici en tant qu’un jeune enseignant-chercheur. Je suis convaincu que je ne suis pas le seul et que de nombreuses générations d’étudiants contribuent à des domaines variés: la médecine, la technique, l’éducation, la recherche scientifique et bien d’autres encore. Ce qui nous unit tous, c’est notre maison commune, le programme AUF.»
Pour le recteur Nguyên Huu Tu, la stratégie est claire: consolider la filière et élargir encore les opportunités pour les nouvelles générations. «Nous souhaitons recruter davantage d’étudiants ayant déjà une bonne maîtrise du français dès le lycée, renforcer les partenariats avec les universités et hôpitaux français, et créer plus d’opportunités de stages, d’internats et de formations post-universitaires. Nous accordons aussi une importance particulière à la formation d’une nouvelle génération d’enseignants issus du programme lui-même.», a-t-il souligné.
Du côté français, le Dr Georges-Fabrice Blum, Fédérateur Santé à l’Export auprès du Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, a adressé un message fort: «Vingt ans, c’est le temps d’une génération. Ce programme a vu naître des centaines de vocations, des amitiés solides et une communauté scientifique soudée par la langue française et par la volonté de soigner. La France restera à vos côtés pour poursuivre cette belle histoire, dans le même esprit de partage, d’exigence et de fraternité qui guide depuis toujours la coopération franco-vietnamienne en santé.»
Vingt ans après sa création, le Programme de formation médicale intensive en français de l’Université de médecine de Hanoi s’est imposé comme l’une des réussites les plus emblématiques de la coopération franco-vietnamienne. Une réussite fondée sur l’effort, l’ambition et la conviction partagée que la maîtrise du français ouvre les portes d’un savoir médical mondial. – VOV/VNA