Bu, vu et entendu chez les Nung de Cao Bang

Dans l’immense majorité des cas, les gens utilisent pour boire de l’alcool soit un verre, une tasse ou un bol. L’ethnie minoritaire Nùng, de la province septentrionale de Cao Bang, déroge à cette règle, la coutume étant, chez elle, de trinquer avec une cuillère à soupe.
Dans l’immense majorité des cas,les gens utilisent pour boire de l’alcool soit un verre, une tasse ou unbol. L’ethnie minoritaire Nùng, de la province septentrionale de CaoBang, déroge à cette règle, la coutume étant, chez elle, de trinqueravec une cuillère à soupe.

Fondée sur lariziculture aquatique, la civilisation vietnamienne et chaque ethnie quila compose se distingue par différentes coutumes et traditions, ce quifait la diversité culturelle du pays. La façon de boire de l’alcool nefait pas exception. Si les Muong dégustent le ruou cân (alcool de riz àsiroter) avec un chalumeau de bambou, les Kinh le boivent avec destasses. Les Nùng eux, sortent de l’ordinaire et utilisent des cuillères àsoupe. Encore fallait-il y penser !

Selon lesexagénaire Hoàng Van Phuc, du hameau Trach Dông, commune de Phuc Sen,district de Quang Uyên, province de Cao Bang (Nord), les Nùng utilisentce procédé lors des mariages, des célébrations de la longévité dequelqu’un, des pendaisons de crémaillère..., ou tout simplement lorsd’un bon repas en famille avec des invités.

Engénéral, le fait d’inviter quelqu’un à boire une cuillère d’alcoolpermet de très rapidement, si besoin est, de «briser la glace». Les gensse réunissent, s’invitent les uns les autres à prendre une cuillèred’alcool parfumé et racontent leurs pensées et autres anecdotes, parfoistristes, parfois joyeuses de leur quotidien. Le précieux liquide estlui contenu dans un grand bol et le nombre de cuillères est fonction dunombre de personnes à table.

Nông Van Sui, du hameauPhja Chang Trên raconte : «Jadis, on manquait tellement de tout qu’iln’y avait même pas suffisamment d’alcool pour satisfaire tout le monde.C’est pour quoi l’on prenait des cuillères. Cela permettait de faire deséconomies substantielles». Nông Minh Nhât, du hameau Phja Chang Duoi, aune autre version : «C’est tout simple en fait. Comme on n’avait pas detasse, on utilisait des cuillères».

D’autresexpliquent que les cuillères permettent surtout de boire plusraisonnablement qu’avec un verre ou une tasse, et donc de prolonger laconversation, qui, une fois une heure trop avancée, peut tourner court,les esprits manquant de clairvoyance... D’autres encore avancent desraisons d’hygiène... Bref, les explications données sur l’origine decette coutume pourraient permettre d’écrire un recueil ! Reste à savoirlaquelle est la bonne...

Une fois l’alcool et lescuillères disposées sur le sol, tout le monde se met à table. L’hôtes’assoit sur une natte et sous l’autel et ses convives autour, encercle. À l’instar des autres ethnies, avant de passer aux chosessérieuses, l’hôte prononce un petit discours. Une fois le repascommencé, la première cuillère d’alcool revient à la personne la plusâgée. Puis, c’est au tour des proches et des convives. Quand l’hôtedésire inviter quelqu’un à trinquer avec lui, tous deux remplissentchacun une cuillère d’alcool, puis se la transmettent et boiventsimultanément. Un geste perçu comme un signe de respect mutuel.

Ce procédé consistant à boire de l’alcool de riz à la cuillère sedécline en plusieurs variantes, ou plutôt en recettes, comme le «Ruouba». Ici, l’on dispose une sorte de farce dans une grande poêle, surlaquelle on déverse de l’alcool et une bonne pincée de sel. Le tout estporté à ébullition et la mixture est dégustée à chaud. Il est possiblede décliner la recette en utilisant du poisson, du foie et bien d’autresingrédients encore selon les goûts, le bon vouloir ou la disponibilitédu moment.

Chez les Nùng, la cuillère n’est pas unaccessoire exclusivement destiné à cet usage, puisqu’elle est avant toutun objet à disposer sur l’autel, toujours au nombre de trois. Lors desfêtes et des anniversaires de décès des ancêtres, le rituel consiste àverser de l’alcool dans chacune des cuillères, et ce à trois reprises.Dans le même temps, des offrandes sont présentées sur l’autel. Unecoutume qui existe depuis très longtemps et destinée à exprimer sagratitude à l’égard des ancêtres.

Lors descélébrations de longévité d’une personne ou à l’occasion des pendaisonsde crémaillère, les Nùng utilisent 16 cuillères servant au culte dugénie du foyer, du génie de la porte et à manifester la reconnaissanceenvers les ancêtres.

La vue de ce bol d’alcooltrônant au centre de la natte et les convives autour fait penser au bolde nuoc mam (sauce de saumure) chez les Kinh, signe de la solidarité etde l’esprit de communauté de l’ethnie Nùng. Mais depuis une dizained’années, cette coutume se perd peu à peu. Si rien n’est fait pour lapréserver, elle est condamnée à l’oubli. Reste à savoir si les jeunesgénérations sauront lui redonner ses lettres de noblesse... – AVI

Voir plus

Vinh Long célèbre la fête Ok Om Bok

Vinh Long célèbre la fête Ok Om Bok

La fête Ok Om Bok, événement culturel traditionnel de la communauté khmère et patrimoine culturel immatériel national reconnu, s’est tenue le 5 novembre au site historique et pittoresque d’Ao Ba Om, dans la province de Vinh Long, au cœur du delta du Mékong.

Œuvre "Mua xuân dên" (L’arrivée du printemps), de Vu Công Diên, huile sur toile, 100x120cm. Photos : NDEL

Les beaux-arts contemporains vietnamiens enchantent à l’Asian Art de Londres

Les œuvres de quatre artistes vietnamiens contemporains ont suscité l’intérêt des collectionneurs, des maisons de vente aux enchères et des amateurs d’art du Royaume-Uni et du monde entier lors de l’exposition « Vietnam - Beauté enchanteresse », qui s’est tenue du 31 octobre au 5 novembre chez Sotheby’s.

Le rituel d’offrande du côm dep, sorte de jeune riz gluant aplati, est une spécialité khmère en l’honneur de la Lune. Photo : VNA

Can Tho célèbre la fête de la Lune des Khmers

Selon les croyances du peuple khmer, la fête de la Lune, célébrée au milieu du dixième mois lunaire, est l’occasion de rendre grâce au génie lunaire pour des récoltes abondantes. Dans la soirée du 4 novembre 2025, la cérémonie du culte de la Lune s’est tenue au temple Khleang, dans la ville de Can Tho, dans le cadre de la fête Oc Om Boc – course de pirogues Ngo traditionnelles.

Photo d'illustration : VNA

Projet de documents du 14e Congrès du Parti : Placer la culture au même rang que l’économie et la politique

Le projet de Rapport politique du Comité central du Parti (13ᵉ mandat) présenté au 14ᵉ Congrès national du Parti suscite un large intérêt ainsi que de nombreuses contributions de la population. Ce document clé confère à la culture le statut de fondement spirituel de la société, la positionnant comme à la fois un objectif et un moteur essentiel du développement durable du pays pour la nouvelle ère.

L'artiste Kiêu My et de jeunes artistes du Théâtre de hát bội de Hô Chi Minh-Ville interprètent la pièce « Fête de la maison communale du village». Photo : ttbc-hcm.gov.vn

Le Théâtre de hát bội de Hô Chi Minh-Ville, passeur de culture et de mémoire

Depuis plusieurs années, le Théâtre de hát bội de Hô Chi Minh-Ville propose chaque semaine des représentations dans les espaces publics de la ville. En parallèle, il collabore avec des établissements scolaires pour rapprocher cet art ancestral de la jeunesse. Une démarche à la fois patrimoniale et novatrice, qui vise à préserver l’identité culturelle tout en conquérant de nouveaux publics.

Le Village de My Nghiep (Khanh Hoa) continue de tisser l'avenir du brocart Cham

Le Village de My Nghiep (Khanh Hoa) continue de tisser l'avenir du brocart Cham

Face au risque de déclin de leur patrimoine artisanal en raison de la faiblesse des revenus et de la concurrence industrielle, les artisans du village de tissage de My Nghiep, berceau historique du brocart Cham dans la province de Khanh Hoa (Centre), résistent inlassablement.
Fidèles au métier à tisser traditionnel en bois – un savoir-faire précieux transmis de mère en fille au sein de l'ethnie Cham – ils maintiennent la production de ces étoffes colorées et complexes.

Hoang Ha, rédacteur en chef de la revue Van hoa nghê thuât (Culture-Art). Photo: vanhoanghethuat.vn

14ᵉ Congrès du Parti : la culture élevée au rang de pilier stratégique

Le projet de document pour le 14ᵉ Congrès national du Parti suscite un vif intérêt et une large participation de la société vietnamienne – gouvernements locaux, intellectuels, artistes, chercheurs et gestionnaires. Au cœur des débats, la culture émerge comme un axe stratégique, témoignant d’une profonde évolution dans la pensée théorique et les orientations du Parti pour un développement humain et culturel adapté à l’ère moderne.