Hanoï (VNA) - À Dà Nang (Centre), plusieurs arts du spectacle traditionnels, dont le tuông, souffrent du manque de spectateurs. Consciente de cette réalité, la ville vient d'annoncer qu'elle soutiendra les troupes de tuông pour présenter les spectacles dans la rue et dans les écoles.
L'"Artistedu Peuple" Nguyên Thi Thu Nhân, 69 ans, résidant dans le quartier deKhuê Trung, district de Câm Lê, ville de Dà Nang (Centre), est à laretraite depuis trois ans. Passionnée de théâtre classique, cetteartiste ne vit pas des représentations mais de la confection de costumesde scène de théâtre classique. Comme elle connaît par cœur chaque rôletypique du théâtre classique, elle est capable de réaliser toutes lesétapes de confection d’un costume de scène, de la création du modèle àla broderie en passant par la fixation de verroteries…
Pendant la guerre de résistance, la troupe du théâtre classique de la Zone militaire No5, dont fait partie Mme ThuNhân, a parcouru les provinces centrales pour se produire. Il suffisaitde dégager une zone d'herbe, d'allumer des torches des deux côtés, etl’on obtenait ainsi une scène de théâtre classique ! Les spectateurs decette époque étaient principalement des militaires et des civils. Lascène s'illuminant, sous les applaudissements, les visages joyeux etattentifs du public constituaient la principale motivation des artistespour qu’ils fassent de leur mieux sur scène, même si, par certainesnuits pluvieuses, artistes comme spectateurs finissaient tous mouillés.
Après1975, l’année de la libération du Sud et de la réunification nationale,le théâtre classique connut le déclin. Les pièces continuaient de seproduire à la sueur des scénaristes, metteurs en scène et artistes, maisle public se faisait de plus en plus rare. Au cours de ces années,malgré un maigre salaire, Mme Nhân dut participer à denombreux spectacles et lutta parfois entre l’envie de poursuivre sacarrière et la nécessité de trouver un autre emploi pour subvenir auxbesoins de sa famille.
"À cette époque,notre revenu mensuel n'était que de 600.000 dôngs alors que notreenfant, qui faisait ses études dans l'aviation à Hô Chi Minh-Ville,avait besoin de 700.000 dôngs/mois. Nous avons dû emprunter de l’argent àune banque puis vendre des légumes sur le marché pour gagner notre vie.Parfois, j'avais envie d’abandonner mon métier d’artiste, mais lespersonnages des pièces me retenaient", confie l'artiste Thu Nhân.
Un autre art pratiqué dans les villes et provinces du Centre, le bài choi -une sorte de jeu de bingo vietnamien accompagné de musique folkloriquetraditionnelle - plus populaire que le théâtre classique, est encorevivant aujourd'hui grâce à la passion des artistes folkloriques et à lafidélité du public. Dans le district de Hoà Vang (ville de Dà Nang,Centre), il est courant que certains artistes se produisent devant lestouristes lors d’événements dans des hôtels et des centres devillégiature, afin de gagner un revenu supplémentaire.
L'"ArtisteÉmérite" Dô Huu Quê (du club Sông Yên Bài Choi) doit cumuler lesreprésentations avec un travail supplémentaire de location de costumes,d’accessoires de scène, et d’équipements sons et lumières. Lors de sesmoments de nostalgie, dus à l’absence de spectateurs, il chante etfredonne des couplets et des passages de chansons folkloriques surd’anciennes histoires. Puis, petit à petit, il compose des chansonsfolkloriques modernes, plus adaptées à notre époque.
Lorsdu Nouvel An lunaire ou des festivals, Dô Huu Quê et ses collègues sonttrès heureux car ils retrouvent l’occasion de se produire et de vivreleur passion. La plupart des membres du club Sông Yên Bài Choi sont destravailleurs ordinaires passionnés par le chant, c’est pourquoi ils ontcréé leur club pour faire des tournées.
Préserver l’essence des arts traditionnels
SelonNguyên Thi Nhât Lê, présidente du club Sông Yên Bài Choi, afin depréserver cet art, le club encourage ses membres, artisans d'élite, àenregistrer des CD et DVD et à sortir des disques de chansonsfolkloriques pour répandre cet art auprès du public. Cependant, enréalité, il y a un manque d'auteurs, de scénaristes, et d'investissementdans le contenu et la création de paroles originales pour attirer lepublic.
L’actualisation des paroles, leuradaptation sont réalisées par les artistes. Cependant, ce n'est pas untravail facile, car en plus de la passion, il faut du professionnalismeet de la méthode. Pour préserver l’essence de l'art du bài choi,il a paru nécessaire d'organiser un concours pour composer de nouvellesparoles de chansons folkloriques adaptées aux mélomanes de différentsâges. Pendant longtemps, l’interprétation du bài choi se limitait à "donner ce qu'on avait" mais ne pouvait pas "jouer ce que le public attendait".
L'"ArtisteÉmérite" Trân Ngoc Tuân, directeur de la troupe de théâtre classiqueNguyên Hiên Dinh (ville de Dà Nang), a déclaré qu'il était difficile detrouver un public pour les formes d'art traditionnelles, le bài choi et le théâtre classique - le tuông. Le nombre de personnes connaissant ces arts diminuent, et les jeunes ne s’y intéressent plus pour maintes raisons.
En2015, la ville de Dà Nang a financé la troupe Nguyên Hiên Dinh pourorganiser 30 sessions de présentation du théâtre classique dans lesécoles autour du maquillage de scène, de l’utilisation d'accessoires oude costumes typiques... et des lectures d’extraits de pièces de tuông typiques. Il s'agissait d'une stratégie pour initier le public aux arts traditionnels.
Ladirectrice adjointe du Service de la culture et des sports de la villede Dà Nang, Nguyên Thi Hôi An, déclare que la ville construit un projetd’amélioration de la qualité des troupes de tuông pour la période2020-2025. En plus d'une formation en gestion des ressources humaineset d'un financement complémentaire, Dà Nang va "présenter des spectacles de tuông dans la rue, dans les écoles, dans les quartiers".
Chaque mois de mai, Dà Nang organise un festival de chansons folkloriques de bài choi,qui s'étend à toute la région centrale, dont le public estprincipalement constitué d’enfants et d’amoureux de cet art. Plusrécemment, le Conseil populaire de la ville de Dà Nang a pris ladécision de soutenir les collectifs et les individus ayant obtenu destitres et des réalisations honorables dans la littérature et les arts.Cela devrait aider les artistes traditionnels à avoir plus de moyenspour s'en tenir à leur métier. - CVN/VNA