Après plusieurs années de recherche, Kim Khai possède aujourd’hui une collection dont il peut être fier, avec des monnaies fiduciaires (billets et pièces) de toutes les époques. Certaines sont millénaires. D’après l’homme, qui vit dans une petite localité de la province d’An Giang dans le delta du Mékong, la rareté et la valeur historique de plusieurs d’entre elles rendent même envieux les collectionneurs professionnels.
Il s’agit notamment des premières pièces mises en circulation sous la dynastie Dinh (968-980 apr. J.-C), des Lê antérieurs (980-1009), des Trân (1226-1400), des Hô (1400-1407), des Mac (1527-1592) et des Nguyên (1802-1945).
Des monnaies, une histoire
Cette collection plaît aux visiteurs non seulement par sa valeur inestimable, mais aussi par la façon dont elle est présentée. Le sexagénaire a arrangé une partie de ses pièces de bronze et de zinc de manière à créer une carte vietnamienne miniature. Aussi, pour le point situé le plus au Nord du pays, il a placé la plus ancienne qu’il possède, de la dynastie des Dinh. Ensuite, du Nord au Sud, il les a posées dans l’ordre chronologique, jusqu’en 1946-1950.
Selon Kim Khai, sous les périodes féodales, les dates de fabrication étaient gravées sur les pièces. C’est sous la dynastie des Dinh et le règne de Dinh Tiên Hoàng (968-979) que les premières pièces de métal ont vu le jour. Elles étaient incrustées des inscriptions «Thai Binh Hung Bao» (monnaie nouvelle de l’ère Thai Bình). Le mot Thai Binh (littéralement pacifique) avait été choisi par le monarque pour qualifier sa période de règne.
« Ces décisions prises par le roi étaient osées à l’époque. Il voulait ainsi marquer l’indépendance de son royaume par rapport à la Chine, et se placer au même rang que les souverains chinois. Car à l’époque, le roi chinois Song Taizon, 2 e empereur de la dynastie des Song ( 960-1279 ), avait baptisé son règne «Thai Binh Hung Quôc» ( état pacifique en extension, ndlr ) », analyse le collectionneur.
M. Khai possède des pièces Thai Binh Hung Bao, premières monnaies de métal fabriquées sous le règne de Dinh Tiên Hoàng (968-979). Source: VNA
Quelques raretés
C’est avec une fierté peu dissimulée que Kim Khai nous présente quelques uns de ses autres trésors cachés. Et notamment ces deux pièces Gia Hung Thông Bao, datant du règne de Gia Long (1802-1820). Il affirme : « Elles comptent parmi les plus rares que je possède, car cette série avait été remoulée après sa mise en circulation, et je dispose là des premiers spécimens ».
Le vieil homme a également déniché des pièces de 2 dôngs, émises dans le Nord du Vietnam pendant les années 1946-1950. « Elles ont aujourd’hui une grande valeur. J’ai investi beaucoup de temps et d’efforts pour les obtenir », ajoute-t-il. Leur côté pile montre le portrait de l’oncle Hô avec l’inscription «Président Hô Chi Minh». Leur côté face représente un épi de riz courbé et l’exergue «Viêt Nam dân chu công hoà» (République démocratique du Vietnam).
Une épaisseur qui en dit long
Selon M. Khai, « les monnaies émises sous les dynasties des Lê postérieurs et des Hô sont esthétiquement les plus accomplies. Notamment celles du règne de Hô Quy Ly ( 1336-1407 ). Leur diamètre est plus étroit que celles des époques précédentes mais les inscriptions et ornements sont d’une grande beauté. Une pièce de ce genre est aujourd’hui estimée à 50 millions de dôngs ».
À contrario, la qualité de celles mises en circulation sous le règne du seigneur Nguyên Phuc Khoat (1738-1765) est considérée comme mauvaise. Moulées en zinc mélangé à d’autres impuretés, elles sont très difficiles à préserver et très fragiles. « Une monnaie en dit long sur l’histoire de son époque. La quantité de pièces émises pendant une période qui connaît des difficultés financières sera réduite, de même que leur épaisseur », explique-t-il.
« Je crois que les monnaies ont une âme. Si ce n’est pas le cas, elles m’ont tout de même porté chance toute ma vie », confie le collectionneur qui nourrit cette passion depuis son plus jeune âge. - VNA