Hanoi (VNA) – L’application de l’impôt minimum mondial constitue à lafois un défi et une opportunité pour le Vietnam d’accélérer la réforme et deperfectionner le cadre juridique de son système fiscal pour le rendre plusconforme aux pratiques et normes internationales.
L’Assemblée nationale du Vietnam a adopté le 29 novembre2023 une résolution sur l’application d’un impôt supplémentaire sur lessociétés conformément aux règles globales anti-érosion de la base d’imposition(impôt minimum mondial). En vertu de ce texte, un taux d’imposition minimummondial de 15% sur les grandes multinationales est appliqué depuis début 2024.
En 2021, plus de 130 pays représentant 90% de l’économiemondiale ont convenu d’introduire un taux d’imposition minimum mondial de 15%afin de mettre fin au dumping fiscal. En théorie, l’impôt sur les sociétés estde 20% au Vietnam, mais pour attirer les investissements étrangers, le paysapplique des taux extrêmement réduits. D’après le Fisc vietnamien, environ 122groupes étrangers seront concernés par l’application de l’impôt minimummondial.
Soutien auxinvestisseurs
Lancé par l’Organisation de coopération et dedéveloppement économiques (OCDE), le principe d’un taux d’imposition minimummondial de 15% concernera les multinationales dont le chiffre d’affairesmondial est d’au moins 750 millions d’euros. L’imposition minimale globale faitpartie du Plan d’action concernant l’érosion de la base d’imposition et letransfert de bénéfices (BEPS), qui compte 142 membres, dont le Vietnam. À cejour, la plupart des pays membres de l’Union européenne, le Royaume-Uni, laSuisse, la République de Corée, le Japon, Singapour, l’Indonésie et l’Australieont confirmé qu’ils appliqueront le taux d’imposition minimum de 15% à partirde 2024.
L’impôt minimum mondial est une question qui suscitebeaucoup d’attention de la part de la communauté des investisseurs étrangers etdes pays d’accueil. En tant que destination attractive de nombreux fluxd’investissements étrangers, le Vietnam devrait être significativement impactépar l’application d’un impôt minimum mondial, notamment en matière de promotionet de soutien aux investissements étrangers.
Les politiques préférentielles du Vietnam en faveur desinvestisseurs comme des incitations fiscales accordées aux entreprises,l’exonération ou la réduction des taxes douanières à l’importation,l’exonération ou la réduction des taxes d’usage et de location du terrain… nesont plus très attrayantes. Déployer rapidement des politiques pour réagir etminimiser les impacts négatifs de ce nouveau mécanisme devrait être unepriorité nationale.
Selon les statistiques, il existe actuellement dans lepays environ 335 projets d’investissement de plus de 100 millions de dollars,opérant dans les industries de transformation et de fabrication dans les zoneséconomiques et parcs industriels, qui bénéficient d’incitations fiscales. Laplupart concernent des entreprises en activité dans les hautes technologiestelles que Samsung, Intel, LG, Bosch, Sharp, Panasonic, Foxconn, Pegatron....Le capital d’investissement enregistré par ces projets représente près de 30%des investissements directs étrangers (IDE) au Vietnam, avec environ 131,3milliards de dollars. Il s’agit de projets qui seront probablement affectés parl’impôt minimum mondial.
D’après des économistes, les incitations fiscalesconstituent toujours l’un des outils importants pour attirer les investisseursau Vietnam. Lê Thi Thuy Vân, directrice adjointe de l’Institut de stratégies etpolitiques financières, remarque : “LeVietnam met en œuvre de nombreuses politiques préférentielles en faveur desinvestisseurs. Pour les projets étrangers, l’incitation fiscale varie entre 5%et 12,5% selon l’envergure des projets“. Par conséquent, Lê Thi Thuy Vânmentionne que l’application du taux d’imposition minimum mondial de 15% auracertainement un impact sur l’attraction des investissements étrangers et lesgrandes entreprises étrangères au Vietnam.
Le Dr. Nguyên Bich Lâm, ancien directeur général duDépartement général des statistiques du Vietnam, estime que si le Vietnamn’applique pas l’impôt minimum mondial, les entreprises d’IDE sur son sol n’enbénéficieront pas, car lorsque l’entreprise paie moins de 15% d’impôts dans unpays étranger (où elle possède des filiales), son pays d’origine (où se situeson siège social) récupére la différence afin que l’ensemble des impôts verséspar la société atteigne bien ce seuil. Face à cette réalité, le Dr. Nguyên BichLâm souligne que les entreprises d’IDE ne se soucieront pas trop de savoir sile gouvernement vietnamien applique ou non l’impôt minimum mondial, elles sontprêtes à payer l’impôt au taux de 15% mais demanderont au gouvernement d’avoirdes politiques préférentielles correctes.
Revoir etréajuster les lois concernées
Selon de nombreux experts, le Vietnam doit rapidementrevoir et réajuster les lois concernées (en particulier la Loi sur l’impôt surles revenus des sociétés, celles sur l’investissement, les entreprises...).
Ainsi, il devra immédiatement commencer à réajuster et à mettre en œuvre sespolitiques d’attraction des IDE dans le sens de la modernisation desinfrastructures socio-économiques, de la formation de ressources humaines dehaute qualité, du développement de l’économie verte et de la facilitation desprocédures administratives, au lieu de se concentrer uniquement sur lesincitations fiscales comme auparavant.
L’application de l’impôt minimum mondial constitue certesun défi, mais ouvre aussi des opportunités pour le Vietnam de pousser laréforme et de perfectionner le cadre juridique de son système fiscal pour lerendre plus conforme aux pratiques et normes internationales. Cela renforcerala confiance des investisseurs dans l’environnement d’investissement du pays,et améliorera sa position économique sur la scène internationale, afin qu’ildevienne véritablement une destination attractive et durable pour lesinvestisseurs. – CVN/VNA