Hanoi (VNA) – Un bégonia aux fragiles fleurs, une grenouille épineuse, un serpent irisé aux écailles réfléchissantes ne sont que cinq des 158 nouvelles espèces découvertes au Vietnam sur un total de 380 découvertes dans la sous-région du Grand Mékong en 2021 et 2022, selon un nouveau rapport du Fonds mondial pour la nature (WWF).
Le rapport qui documente le travail de centaines de scientifiques d’universités, d’organisations de conservation et d’instituts de recherche du monde entier, appelle également à une action urgente pour réduire le risque de perte d’habitat et mettre fin au trafic d’espèces sauvages au Vietnam et dans la région.
La région du Grand Mékong est reconnue comme un point chaud de la biodiversité - également connu sous le nom de point chaud indo-birman. Elle présente une diversité d’habitats naturels avec un large éventail d’altitudes et de reliefs complexes, ce qui se traduit par un niveau extrêmement élevé de diversité biologique, les scientifiques découvrant de nombreuses nouvelles espèces chaque année.
Les scientifiques ont découvert 290 plantes, 19 poissons, 24 amphibiens, 46 reptiles et un mammifère au Cambodge, au Laos, au Myanmar, en Thaïlande et au Vietnam. Cela porte à 3.389 le nombre total de plantes vasculaires, de poissons, d’amphibiens, de reptiles, d’oiseaux et de mammifères décrits dans la région depuis 1997.
Selon le rapport, l’espèce de bégonia (Begonia catbensis) a été découverte dans les îles karstiques du parc national de Cat Ba lors d’une visite sur le terrain en 2019. Elle appartient à un groupe du genre trouvé sur les formations karstiques calcaires, qui compte actuellement 21 espèces au Vietnam, contre seulement quatre décrites jusqu’en 2007.
Bien que similaire à d’autres espèces de ce groupe, elle se distingue par la présence de poils sur les tiges minces qui soutiennent les feuilles, les feuilles tronquées et les structures en forme de feuille trouvées près de la base de ces tiges, et des structures coniques denses en forme de cloques sur la surface supérieure du limbe de la feuille, ainsi que certaines différences dans la structure de la fleur.
Du nom du parc dans lequel elle a été découverte, la population recensée en 2019 est la seule actuellement connue. Avec moins de 200 individus matures et une aire de répartition très limitée, cette espèce est considérée comme rare, et les chercheurs qui l’ont décrite ont évalué son statut de conservation comme en danger.
Heureusement, être dans le parc national offre une protection, on pense donc que la population est stable depuis au moins deux décennies. Elle fleurit et fructifie en août et peut être trouvé sur les sommets semi-ombragés de petits rochers et les pentes abruptes sous la forêt à feuilles persistantes de feuillus dans les basses terres des collines karstiques.
La nouvelle espèce de grenouille Quasipaa taoi a été découverte sur le mont de Ngoc Linh, le plus haut sommet du Centre à 2.598 m, site de découverte de plusieurs nouvelles espèces d’amphibiens. Elle a été trouvée dans le cours supérieur des ruisseaux rocheux dans la forêt sempervirente secondaire à environ 1.500 m au-dessus du niveau moyen de la mer. C’est une grande grenouille - le corps du mâle mesure jusqu’à 85 mm, celui de la femelle étant plus court d’environ 15 mm.
Les chercheurs ont observé plusieurs différences morphologiques par rapport aux autres espèces du genre Quasipaa, souvent connues sous le nom de grenouilles épineuses, et des tests génétiques ont confirmé qu’il s’agissait d’une espèce distincte. Les données génétiques correspondaient également à un spécimen enregistré dans la province voisine de Xekong au Laos. Quasipaa taoi représente la treizième espèce connue de Quasipaa et la sixième au Vietnam.
Les serpents rayon de soleil (Xenopeltidae) sont nommés pour leurs écailles irisées, Des cellules «irridophores» abondantes lui confèrent ces reflets caractéristiques : exposées à la lumière, elles brillent aux couleurs de l’arc-en-ciel. Ce nouveau membre de la famille n’est que la troisième espèce de Xenopeltis, le seul genre de la famille, rejoignant le serpent rayon de soleil commun (X. unicolor) et X. hainanensis, trouvé dans le Sud-Est de la Chine et le Nord du Vietnam.
Les chercheurs ont collecté plusieurs spécimens en 2006 dans des forêts à feuilles persistantes d’une région montagneuse de la province de Kon Tum, entre 1.500 m et 2.500 m au-dessus du niveau moyen de la mer. À l’origine, on pensait qu’il s’agissait de X. hainanensis, mais des analyses morphologiques et moléculaires ultérieures ont montré que les spécimens appartenaient clairement à une espèce distincte, avec un certain nombre de différences dans leurs modèles d’écailles et leurs squelettes.
La nouvelle espèce a reçu le nom de X. intermedius car la forme et l’allongement de sa tête et la taille de son œil sont intermédiaires entre ses deux espèces sœurs. C’est une espèce fouisseuse, qui loge généralement sous des arbustes et les buissons, le plus souvent sous terre. - et la forme de son corps le rend mieux adapté à un mode de vie fouisseur que X. unicolor mais moins que X. hainanensis.
Comme tous les serpents rayon de soleil, il a une surface d’écailles très irisée mais est bien camouflé, étant d’une couleur brun clair uniforme sur le dessus et d’un jaune crémeux plus pâle en dessous. Les serpents rayon de soleil se nourrissent de grenouilles et de petits serpents et tuent leurs proies par constriction. Les chercheurs ont observé que la nouvelle espèce faisait de même.
Les Hauts Plateaux du Centre du Vietnam sont connus pour leur grande diversité d’amphibiens et de reptiles, y compris de nombreuses espèces cryptiques (morphologiquement indiscernables mais génétiquement distinctes). Des études récentes ont révélé de nombreuses espèces nouvelles pour la science dans cette région.
Ces nouvelles espèces subissent une forte pression de la déforestation, de la destruction des habitats, de la pollution, des maladies propagées par les activités humaines, de la concurrence avec les espèces envahissantes et des impacts dévastateurs du commerce illégal d’espèces sauvages. De nombreuses espèces ont disparu avant d’être découvertes, a fait savoir Nguyen Van Tri Tin, responsable du programme de conservation de la faune du WWF-Vietnam.
Par conséquent, une action urgente est nécessaire pour prévenir l’extinction des espèces sauvages en protégeant leurs habitats, en aidant à la restauration des populations d’espèces naturelles, en réensauvagant et en empêchant d’autres activités, la chasse illégale et le commerce d’animaux sauvages, a-t-il indiqué.
Pour freiner le déclin des espèces, la Conservation de la biodiversité, un volet qui fait partie du projet de gestion durable des forêts et de conservation de la biodiversité (VFBC), financé par l’Agence américaine pour le développement international (USAID) est en train d’accélérer le réensauvagement (rewilding), une approche de conservation des écosystèmes. Le Fonds pour l’environnement mondial (GEF) a lui financé à travers le PNUD le projet "Intégration des objectifs de gestion des ressources naturelles et de conservation de la biodiversité dans la planification du développement socio-économique et la gestion des réserves de biosphère au Vietnam" (Projet BR).
Le réensauvagement, ce n’est pas simplement de la réintroduction d’espèce. Il s’agit de recréer tout un écosystème, de retrouver l’état naturel d’une région, et ensuite, de passer la main à la nature. L’introduction d’espèces - du haut de la chaîne alimentaire notamment, des prédateurs ou des grands herbivores - vise ainsi à restaurer les interactions trophiques descendantes et les cascades trophiques associées pour promouvoir des écosystèmes biodiversifiés autorégulateurs.
A ce jour, le Vietnam a adhéré et contribué activement aux traités internationaux pertinents (Convention sur la diversité biologique ; Convention de Ramsar ; Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction.; Protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques, Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages, Protocole additionnel de Nagoya – Kuala Lumpur sur la responsabilité et la réparation relatif au Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques.
En outre, les engagements internationaux et les exigences des réalités nationales ont été codifiés dans un système de documents juridiques normatifs, des plans et des stratégies. Dans les temps à venir, le ministère des Ressources naturelles et de l’Environnement coordonnera avec les ministères, secteurs, localités et organisations concernés pour se concentrer sur la recherche et le perfectionnement du système de documents juridiques sur la conservation de la nature et la biodiversité. – VNA