Le Têt traditionnel avec les Thai de Muong Lo
Muong
Lo est le deuxième grenier à riz du Nord-Ouest et la «capitale» des
Thai qui composent près de 50% de la population locale. Pour les
érudits, le nom de Muong Lo évoque les gens d’une terre à l’identité
particulière, riche des cultures uniques des minorités ethniques des
zones montagneuses du Nord.
L’adage du Nord-Ouest «Nhât
Thanh, nhì Lò, tam Than, tứ Tấc» énumère les quatre greniers de la
région : Muong Thanh (à Diên Biên Phu), Muong Lo (à Yên Bai), Than Uyên
(à Lai Châu), Muong Tâc (à Son La).
Muong Lo n’est pas seulement
connu pour son agriculture, il l’est aussi pour sa culture ancienne et
originale. La culture des Thai s’exprime plus particulièrement au Nouvel
An lunaire.
Têt des Thai noirs
Ici, le riz
gluant aux cinq couleurs (xôi ngu sac en vietnamien)est le plat qui ne
fait jamais défaut. Convergence de valeurs traditionnelles comme
modernes, il répond au concept du Yin et du Yang.
Pour le
préparer, il faut prendre du riz gluant de Tu Lê (Tan La en Thai), une
variété à la fois aromatique et souple, le plus célèbre de la vallée de
Muong Lo. L’eau pour faire la cuisson à la vapeur se doit
obligatoirement d’être du ruisseau de Muong Lo.
Les Thai
préparent deux types de banh chung traditionnel au Vietnam, le gâteau
carré de riz gluant farci de viande de porc et de haricots verts
poivrés. Enveloppé dans des feuilles de dzong (Phrynium placentarium),
l’un est blanc et l’autre noir, grâce à l’utilisation de cendre de
paille. Le banh chung, dont le goût provient essentiellement des
feuilles de maranta, est essentiel pour les offrandes aux ancêtres la
veille puis les premiers jours du Têt.
Le moment
essentiel, c’est l’invitation des ancêtres à fêter le Têt avec leurs
descendants, le soir du 30e jour du 12e mois lunaire. C’est le chaman
qui pratique les rites. Il prend la chemise de chacun des membres de la
famille en serrant leur épaule puis leur bras, avant de prendre un
bâtonnet de bois brûlant pour aller au bout du village afin d’inviter
les défunts, invitation qu’il renouvelle au pied de l’escalier de la
maison sur pilotis.
À propos d’invitation, cette fois-ci, elle est
plus que jamais un rite de courtoisie. Lorsqu’un hôte arrive, le maître
de maison l’accueille solennellement à l’échelle : après avoir échangé
quelques mots d’usage, la boisson coule à flots, alors que les plats
sont en revanche frugaux. Ces libations durent parfois jusqu’à minuit,
agrémentées de chants et danses aux sons de la flûte khèn.
Par
ailleurs, on ne balaye pas le premier jour de l’année car ce serait
refouler la chance, raison pour laquelle le ménage est fait avant le
Réveillon.
Têt dans le hameau Cai
Lorsque
le brouillard couvre Muong Lo et ses routes, on entend les rires et
discussions dans le petit village de Ban Cai, une atmosphère typique du
Têt ici.
Celui-ci est le moment le plus important de toute
l’année pour les Thai et, dès le 29e jour du 12e mois lunaire, toutes
les familles tuent des porcs dès l’aube pour préparer les mets.
Hoàng
Van Hào, un habitant, confie que cette année, sa famille a tué un
cochon de 70 kilos et préparé plus de 100 banh chung car ils ont eu une
bonne récolte et un bon nombre de poulets et de porcs. Il espère que la
Nouvelle Année à venir sera plus prospère encore.
Le soir
du 30e jour du dernier mois lunaine, le repas du Réveillon réunit toute
la famille. On boit de l’alcool, puis le chef de famille fait des
offrandes aux génies du foyer et, surtout, aux ancêtres : viandes
cuites, banh chung, brocatelles et taels d’argent, respectueusement
placés sur l’autel. Et si l’on a des gongs, on en joue afin de
bénéficier d’une année où la chance sera au rendez-vous.
À minuit, ils se réunissent autour d’un plateau pour boire le premier bol d’alcool de l’année et se souhaiter leurs vœux.
Le
jour de l’An, ils vont souhaiter une bonne année à leurs proches, leurs
voisins et à toutes les familles du village. Le Têt des Thai dure
jusqu’au 10e jour du 1er mois lunaire, avec de nombreuses fêtes
printanières. -VNA