Hanoi (VNA) – Une résolution révolutionnaire sur le privé a été récemment publiée par le Politburo du Parti. Elle vise à lever les obstacles et freins institutionnels, créant un environnement plus favorable au développement du secteur.
Dans le contexte actuel, riche en défis mais aussi en opportunités, le secteur privé joue un rôle crucial dans la stimulation du développement durable. Des mesures concrètes et globales sont nécessaires pour “délier” les entreprises privées de leurs entraves, afin de leur permettre de se concentrer sur la production et les affaires, contribuant ainsi plus efficacement à la croissance économique. C’est pour cette raison que, au nom du Politburo, le secrétaire général du Parti, Tô Lâm, a signé la Résolution N°68, en date du 4 mai 2025, relative au développement du secteur économique privé.
Un changement global des politiques et des mentalités est requis pour “déverrouiller” les entreprises privées, et leur permettre de jouer pleinement leur rôle dans la croissance du pays.
La Résolution n°68 affirme clairement qu’après près de 40 ans de Renouveau, le secteur économique privé du pays s’est progressivement développé tant en quantité qu’en qualité, devenant l’une des forces motrices essentielles de l’économie de marché à orientation socialiste. Avec plus de 940.000 entreprises et environ 5 millions de commerces familiaux, le privé représente actuellement environ 51% du PIB, plus de 30% des recettes budgétaires de l’État, et crée plus de 40 millions d’emplois, soit plus de 82% de la main-d’œuvre totale.
Le secteur privé contribue non seulement à l’expansion de la production, du commerce et des services, mais joue également un rôle déterminant dans l’amélioration de la productivité du travail, la promotion de l’innovation et le renforcement de la compétitivité nationale.
La forte croissance de nombreuses entreprises privées vietnamiennes leur permet non seulement de dominer le marché domestique, mais aussi d’affirmer leur image de marque à l’international.
Cependant, malgré ses contributions croissantes, le secteur privé fait encore face à de nombreux obstacles entravant son développement, l’empêchant de réaliser des percées en termes de taille et de compétitivité. La majorité des entreprises privées vietnamiennes sont de petites, voire de très petites structures, dotées de capacités financières et managériales limitées, et souffrant d’un manque de synergies, tant entre elles qu’avec les entreprises à capitaux étrangers. L’un des principaux défis demeure un environnement des affaires encore insuffi-samment favorable. Les entreprises privées rencontrent souvent des difficultés d’accès aux financements, aux terrains et à d’autres ressources essentielles.
Dans un contexte économique mondial complexe, les différents scénarios envisagés pour le Vietnam en 2025 convergent vers un consensus : le développement du secteur privé est indispensable pour assurer une croissance soutenue.
Selon la Banque d’investissement et de développement du Vietnam (BIDV), le pays pourrait atteindre un taux de croissance de 7,5% du PIB dans un scénario moyen et de 8% dans le meilleur des cas.
Le Docteur Cân Van Luc, économiste en chef de la BIDV, souligne que réaliser des percées en matière de croissance économique reste un défi majeur, particulièrement dans un contexte mondial marqué par une croissance ralentie et des incertitudes grandissantes. L’économie mondiale connaît une croissance réduite, avec une prévision de 3,2% pour 2024, un léger recul par rapport aux 3,3% de 2023. Parallèlement, l’intensification des risques géopolitiques, la montée du protectionnisme commercial et la multiplication des enquêtes antidumping créent un environnement de plus en plus complexe pour les exportations et les investissements.
Au Vietnam, le secteur privé peine à se remettre des effets de la pandémie de COVID-19. Le taux de croissance des investissements privés en 2024 est de 7% seulement, bien en deçà des 17% enregistrés avant la pandémie. De plus, le ratio de création d’entreprises par rapport aux cessations d’activité est passé de 3 avant la pandémie à 1,18 en 2024. Les entreprises font face à des coûts accrus, notamment en logistique (+30%) et en salaires, et à des risques juridiques liés à des réformes foncières lentes et à des réglementations obsolètes. Depuis l’adoption des lois sur les entreprises privées en 1990, le privé a fait des progrès mais continue de rencontrer des obstacles. Le Docteur Cân Van Luc apprécie hautement la Résolution N°68, qui remplace la Résolution N°10, en date en 2017, afin de mieux soutenir le développement de ce secteur.
Une force pionnière
Pour atteindre les objectifs de développement national définis lors du XIIIe Congrès national du Parti et répondre aux exigences de la nouvelle ère, il est urgent d’innover dans la pensée, d’unifier la conscience et l’action, et de mettre en œuvre des solutions globales, audacieuses et cohérentes. L’enjeu est de promouvoir davantage le rôle du privé, de renforcer la confiance, et de créer une nouvelle dynamique de développement économique et de compétitivité nationale.
Face à cette situation, le Politburo a demandé de se concentrer sur une compréhension approfondie et une mise en œuvre drastique, coordonnée et efficace de plusieurs points clés. Selon la Résolution N°68, l’objectif à l’horizon 2030 est que le secteur privé devienne le principal moteur de l’économie nationale, une force pionnière dans les domaines scientifique et technologique, l’innovation et la transformation numérique. Les objectifs pour 2030 incluent : atteindre 2 millions d’entreprises privées et au moins 20 grandes entreprises intégrées aux chaînes de valeur mondiales.
Le privé viserait une croissance annuelle moyenne de 10 à 12%, supérieure à celle de l’économie nationale ; une contribution de 55 à 58% du PIB, de 35 à 40% des recettes de l’État, et la création d’emplois pour 84 à 85% de la population active.
La productivité du travail devrait croître de 8,5 à 9,5% par an. En matière de niveau technologique, d’innovation et de transformation numérique, les entreprises privées vietnamiennes devraient figurer parmi les trois premières de l’ASEAN et les cinq premières d’Asie.
D’ici 2045, le secteur privé devra être fort, durable, intégré de manière proactive aux chaînes de production et d’approvisionnement mon-diales. Il sera hautement compétitif à l’échelle régionale et internationale, avec pour objectif d’avoir au moins 3 millions d’entreprises actives, contribuant pour environ 60% au PIB. La Résolution N°68 précise également les tâches, les mesures et les modalités d’organisation nécessaires pour la mise en œuvre de ces objectifs.
Le Vietnam s’engage dans une nouvelle phase de réformes destinées à dynamiser son secteur privé. “La nouvelle résolution du Bureau politique est guidée par une réflexion innovante et une approche révolutionnaire du secrétaire général du Parti, Tô Lâm. Elle permettra de supprimer les contraintes institutionnelles et de créer un environnement propice au développement du privé afin qu’il devienne la force motrice pour l’intégration du pays dans le système économique mondial. Une percée significative pour ce secteur”, a estimé Nguyên Ngoc Hoà, président de l’Association des entreprises de Hô Chi Minh-Ville.
La nouvelle résolution créera un mécanisme plus ouvert, supprimant les goulets d’étranglement, selon M. Hoà. Il s’agit de garantir l’égalité dans l’accès aux marchés, aux ressources financières, foncières et technologiques. Les procédures administratives seront également simplifiées, créant un environnement commercial plus transparent et favorable. L’Association des entreprises de Hô Chi Minh-Ville souhaite que ce texte ait une orientation stratégique claire sur le rôle du secteur privé dans une économie de marché à orientation socialiste. Il comprendra des politiques
de soutien à long terme pour aider les sociétés privées à se développer de manière durable, en améliorant non seulement leur quantité mais aussi leur qualité et leur position dans les chaînes de valeur mondiales.
Égalité des chances
La Résolution N°68 vise à éliminer les barrières et les obstacles administratifs, à améliorer rapidement le climat d’investissement, et à mettre en place des politiques de soutien globales et flexibles pour créer un cadre propice au développement durable des entreprises privées. Ce qui est plus important encore, c’est que ce texte s’oriente vers la garantie de l’égalité des chances, en permettant aux entreprises privées d’accéder aux financements et aux moyens de production au même titre que les entreprises publiques et les sociétés à participation étrangère.
Ledit texte permet aux entreprises privées de participer à des projets nationaux clés, d’aider les petites et moyennes entreprises (PME) à croître et à devenir de grandes entreprises, de mettre en place des politiques de soutien au développement des grandes entreprises disposant d’une envergure importante, de capacités solides et d’une forte compétitivité, capables de jouer un rôle de leader dans certains secteurs clés et stratégiques, ainsi que d’assurer une meilleure connectivité entre entreprises et entre régions. L’objectif est de favoriser un cycle économique durable, de renforcer l’indépendance et l’autonomie du pays, et de garantir une intégration économique efficace. – CVN/VNA