Hanoï (VNA) - Têtesde licorne aux yeux clignotants, lanternes magiques en papiercellophane transparent... Les jouets traditionnels ont toujours leurplace à la Fête de la mi-automne, malgré la concurrence féroce de leurshomologues modernes.
Dans son établis-sement de fabrication de tambours de licorne, dans le 5e arrondissement de Hô Chi Minh-Ville, Lâm Van Ky, 70 ans, est en trainde donner les dernières touches aux yeux globuleux d’une petite licorne,avant sa mise en vente. "À chaque Fête de la mi-automne, nousfabriquons des têtes de licorne de petite taille pour les enfants. Desjeux traditionnels qui ont marqué la jeunesse de bien des Vietnamiens", explique l’artisan chevronné.
M. Ky, un des plus âgés à exercer ce métier, rue Luong Nhu Hoc, raconte : "Auparavant,toutes les familles de cette rue fabriquaient des têtes de licorne.Des clients de tous les coins du pays venaient en acheter. Mais de nosjours, les têtes de licorne ne sont plus guère présentes que lors descérémonies d’ouverture d’événements ou de banquets. Peu de personnes leschoisissent comme cadeaux. Ce métier est instable. Pas mal d’artisansl’ont abandonné".
À Phu Binh et Phu Trung, rues spécialisées dans la fabrication de lanternes dans, respectivement, le 11e arrondissement et l’arrondissement de Tân Phu, l’atmosphère animéed’autrefois n’est plus qu’un lointain souvenir. Il n’y a plus qu’unepoignée de familles à exercer ce métier.
Les vicissitudes d’un métier traditionnel
Nguyên Thi Dào, domiciliée rue Lac Long Quân, dans le 11e arrondissement, est en train de fabriquer une lanterne en forme de carpe. "Mafamille fabrique des lanternes en cellophane transparent depuis troisgénérations. Il y a une dizaine d’années, pour chaque Fête de lami-automne, la rue débordait de lanternes de toutes sortes, aux couleursvives. On travaillait toute la nuit pour satisfaire les commandes. Touta bien changé depuis…", soupire-t-elle.
Nguyên Van Si, mari de Mme Dào, ne cache pas sa tristesse : "Àcette époque-là, chaque famille fabriquait des dizaines de milliers delanternes. Ce métier a contribué à améliorer nos conditions de vie".Les lanternes traditionnelles doivent céder leur place aux lanternesmodernes importées de Chine. Et les artisans doivent chercher un autremétier pour gagner leur vie.
Se réinventer pour survivre
Âgé de 15 ans, Lê Van Thành, de la paroisse de Phu Binh, fabrique des lanternes traditionnelles depuis cinq ans. "Audébut, mes produits étaient mauvais. Maintenant, je peux en créer selonla forme de n’importe quel personnage de BD comme Doraemon, Pikachu oualors de facture plus traditionnelle comme bateau, papillon… partageThành. Sur ma page Facebook, j’explique aussi comment fabriquer deslanternes".
"Ce métier me plaît vraiment, partage quant à lui Nguyên Van Si. Ilm’est difficile de l’abandonner. Cette année, j’ai réussi à persuaderma famille de revenir à cette profession. En dehors de la vente, noslanternes sont aussi réservées aux activités humanitaires. En outre,lors de la Fête de la mi-automne, nous enseignons leur fabrication auxenfants de centres de protection sociale ou de centres d’orphelins. Bienque vivre de ce métier est difficile, on doit le préserver".
Malgré les difficultés, Lâm Van Ky a aussi décidé de poursuivre cetartisanat. Selon lui, ce métier devra se réinventer pour survivre : Pourle relancer, il faudra être capable de se renouveler, de faire preuvede créativité. C’est à cette condition que nos produits pourront êtrevendus non seulement dans le pays mais aussi à l’étranger".
Afin de maintenir le métier, il faut conquérir de nouveaux marchés. Lê Thi Tham, domiciliée dans le 11e arrondissement, a créé des plis aux cadres des lanternes pour faciliter le transport.
"Ce métier disparaîtra si l’on ne fait pas preuve de créativité",considère Dang Uyên, de l’arrondissement de Tân Phu. Ainsi, au lieu depetites lanternes, il en a produit de belles tailles pour des magasinsou hôtels. Chaque lanterne étoilée ou en forme d’éléphant ou de carpeest vendu un million de dôngs. "Je ne fabrique plus de petiteslanternes comme les autres familles. C’est en cherchant de nouvellesorientations que l’on s’en sortira", assure M. Uyên.
Pour sa part, Mme Ngoc Anh, domiciliée rue Lo Gôm, dans le 6e arrondissement, a créé une page web et vend ses produits sur lesréseaux sociaux, où elle présente chaque étape de production deslanternes traditionnelles. "Il faut utiliser les outilstechnologiques pour se faire connaître. J’envisage de présenter mesproduits dans des foires ou expositions, dans ou hors du pays", informe-t-elle.
S’il respire l’héritage des anciens, ce métier doit aussi s’adapter aumonde moderne, aux nouveaux acheteurs, qui sont bien différents de ceuxd’il y a quelques décennies. Allier savoir-faire traditionnel etcapacité de se réinventer, telle devra être la stratégie des artisansdans les années à venir. - CVN