
Hanoï (VNA) - ÀDà Nang, Lê Thanh Binh est un pionnier dans la culture hydroponique delégumes bio. Sa particularité : ses serres sont toutes installées surd’anciennes décharges.
Sur le territoire de l’arrondissement de Son Trà, ville de Dà Nang(Centre), est apparu ces dernières années un espace vert de 600 m². Ils’agit d’un jardin potager bio où les légumes sont cultivés sous serreselon la technique hydroponique (thuy canh en vietnamien).
L’hydroponie ou culture hydroponique (ou encore agriculture hors-sol)est la culture de plantes réalisée sur un substrat neutre et inerte (detype sable, pouzzolane, billes d’argile, laine de roche etc.).
Ce substrat est régulièrement irrigué d’un courant de solution quiapporte les sels minéraux et les nutriments essentiels aux plantes. Souschaque serre, des rangées de planches percées contiennent des légumesen pot. "Pouvez-vous imaginer que ce jardin potager était autrefois une décharge publique ?",lance Lê Thanh Binh, 40 ans, à un groupe de visiteurs. Devant leursurprise, il raconte son histoire, celle d’un ingénieur du BTP qui s’estreconverti en maraîcher bio.
Le potager hydroponique, késako ?
Diplômé de l’Université de construction de Dà Nang en 2000, l’ingénieurLê Thanh Binh a d’abord travaillé dans son secteur. La vie citadines’avérant pesante, il a décidé de quitter Dà Nang pour rentrer dans sonvillage natal, dans la province de Quang Ngai (Centre).
La pollution croissante tant environnementale qu’alimentaire l’a incité àse lancer dans un projet ambitieux : la culture de légumes bio. Mais,par manque de terres cultivables, sa démarche s’avérait irréalisable.Cependant, en observant ici et là, aux bords du village, des terres enfriche qui se transformaient jour après jour en décharges, une idée lui atraversé l’esprit : transformer ces lieux abandonnés en jardins. Ils’agissait de faire "d’une pierre deux coups" afin de réutiliser ces espaces dégradés et produire des légumes de qualité.
Pour Binh, la meilleure solution consistait à choisir la culturehydroponique, une méthode pratiquée avec succès dans divers pays,notamment le Japon et Israël. Animé par cette idée, Binh a décidé departir, à ses frais dans ces deux pays, où il est resté des mois dansdes localités maraîchères à étudier cette méthode de culture novatrice.
De retour à Quang Ngai, soutenu par l’administration locale, Binh acommencé à concrétiser son projet. Sa pratique à titre expérimentale de2012 à 2015 a rencontré pas mal de difficultés, notamment dansl’écoulement des produits en raison de prix de vente trop élevés. "Leslégumes thuy canh nécessitent de gros investissements dansl’installation des serres, les soins permanents, l’achat d’unecamionnette frigorifique, ce qui explique des prix plus élevés que leslégumes ordinaires", explique l’horticulteur. Avant d’avouer tristement : "Mon projet a connu l’échec, et j’ai perdu des milliards de dôngs".
Quand les décharges font peau neuve
"L’or s’éprouve par le feu, et l’homme par le malheur". LêThanh Binh a fait sien ce proverbe. L’horticulteur décide de revenir àDà Nang, où les consommateurs sont plus sensibilisés à la question desaliments propres, pour déployer son projet de légumes thuy canh.
Il a d’abord cherché un terrain approprié de préférence une décharge. Ila visé un vaste espace débordant d’immondices dans le district de SonTrà. Avec un double objectif : dépolluer le site et créer des emplois.Son projet a été approuvé par l’administration locale qui lui a louécette décharge de 600 m². Binh a investi un milliard de dôngs dansl’installation des serres, l’équipement des réseaux de planches etd’irrigation…
Un jardin potager high-tech est littéralement sorti de terre. "Lesmatériaux et les équipements, je veux qu’ils puissent être montés etdémontés facilement, au cas où la ville récupérerait le terrain pour unautre projet", confie Binh.
Dans ce jardin singulier, les légumes proviennent de diverses variétés,en tête cresson, salade violette, liseron d’eau…Selon Binh, pour laculture hydroponique, le choix des semences est très important. Vientensuite l’application d’une technique culturale précise, concernantentre autres l’irrigation avec des nutriments adaptés à chaque périodede croissance, l’assurance d’une humidité et d’une températureappropriées… "Tout cela est contrôlé et rajusté en permanence grâce à un programme informatique", indique-t-il.
Lors de la première récolte en 2018, le jardin de Binh a fourni 200 kgde légumes bio, tous vendus en quelques heures. Stimulé par ce premiersuccès et soutenu par l’administration locale, Binh a déployé d’autresprojets dans d’autres décharges de la ville.
Actuellement, il dispose de trois jardins potagers qui couvrent 2.000m², où six maraîchers travaillent en permanence. Chaque mois, ilsfournissent 700 kg de légumes. Binh a l’ambition de louer une autredécharge dans le quartier de Nai Hiên Dông pour y cultiver tomates,concombres, fraisiers… toujours selon la méthode thuy canh. "Jesouhaite aussi développer dans mes serres cette forme de tourisme où lesvisiteurs deviennent maraîchers, l’espace de quelques heures, histoirede s’immerger dans la culture locale", ajoute-t-il avec un large sourire. -CVN/VNA