Dong Nai (VNA) - Tà Lài, une commune de la province de Dông Nai (Sud), est connue pour ses produits en brocatelle aux motifs distinctifs. Pourtant, les tisseuses ont de plus en plus de difficultés à vivre de leur métier, la demande ne cessant de chuter.
Le 4e hameau de la commune de Tà Lài, district de Tân Phu, compte 118 familles, essentiellement de l’ethnie Châu Ma. Elles pratiquent de nombreux métiers traditionnels dont le tissage de brocatelle, source complémentaire de revenus pour ces femmes dont l’essentiel du travail reste agricole.
Les artisanes, dont le savoir-faire se transmet de mère en fille, tissent foulards, tissus chatoyants aux motifs divers : animaux, oiseaux, plantes, nature… Chacun reflète la façon de vivre et la vision de la communauté Châu Ma sur la vie, le monde, la nature...
Ces dernières années, en raison de la globalisation et de l’afflux de produits industriels, le tissage traditionnel de Tà Lài a eu tendance à reculer devant les assauts de la concurrence, notamment, du textile bon marché. Actuellement, le 4e hameau de la commune ne compte plus que 30 familles connaissant le tissage dont seuls dix en vivent encore.
Passion d’une artisane
Mme K’Diêu, 50 ans, artisane depuis 30 ans, a vu ce petit monde évoluer lentement. Selon elle, ce métier nécessite précision, patience, habilité et créativité. Pour commencer, il faut chercher les plantes qui serviront à fabriquer des fils. Elles sont séchées pour en retirer l’écorce puis pilées et égrugées pour en extraire les fibres. Le deuxième stade consiste dans le lavage et la teinture des fils ainsi obtenus. Le troisième stade est le plus complexe : rechercher des motifs à tisser pour obtenir des produits raffinés, originaux. Pour tisser une jupe ou une chemise, une semaine de travail est ainsi nécessaire.
D’après Mme K’Diêu, actuellement, avec le développement de l’économie de marché et l’inclusion du pays dans l’économie globale, beaucoup de produits en brocatelle sont fabriqués à l’aide des hautes technologies. Les minorités ethniques n’ont plus besoin de cultiver des plantes pour les fibres. Il leur suffit simplement d’aller au marché pour s’approvisionner en matières premières. La plupart des jeunes ont choisi d’être ouvriers dans les zones industrielles au lieu de rester et de pratiquer ce métier, mettant en péril le maintien de l’activité et même son existence.
Pourtant, Mme K’Diêu n’a pas baissé les bras et continue à promouvoir les savoirs ancestraux. "Afin d’aider les habitants de mon village à vivre de leur métier, j’ai cherché à écouler les produits. Heureusement, j’ai reçu des commandes de certaines localités comme Lâm Dông, Dak Lak, Kon Tum… (hauts plateaux du Centre). Chaque commande permet d’améliorer les conditions de vie des habitants", explique la quinquagénaire.
En dehors du tissage des produits de brocatelle destinés à la vente, Mme K’Diêu et quelques tisseuses qualifiées du village tentent de revigorer les traditions face à l’apathie des jeunes générations.
Étant chef de l’Association des femmes de la commune de Tà Lài depuis 20 ans, Mme K’Diêu cherche à renforcer les connaissances, le rôle et la position des femmes dans la famille et la société, et à les aider à mieux gérer l’économie familiale. Ses efforts ont permis non seulement de préserver le tissage traditionnel des Châu Ma mais aussi d’améliorer les conditions de vie des habitants locaux, notamment des femmes.
Un projet de réservation
Le tissage de brocatelle des Châu Ma de la commune de Tà Lài est considéré actuellement par les autorités locales comme un des métiers les importants dans la stratégie de développement touristique du district de Tân Phu.
Dans le Parc national de Cat Tiên, qui se trouve à cheval sur les provinces de Dông Nai, Binh Phuoc (Sud) et Lâm Dông (hauts plateaux du Centre), un stand expose des produits en brocatelle des Châu Ma, contribuant ainsi à attirer les touristes.
En outre, depuis 2008, la province de Dông Nai met en œuvre le projet de "Restauration et développement du tissage de brocatelle traditionnel des Châu Ma dans la commune de Tà Lài, district de Tân Phu" dans lequel les autorités locales et de nombreux individus investissent dans la restauration du village de métier par le biais de la construction d’établissements de production, de l’organisation de cours de formation sur le tissage et la couture en faveur des femmes et jeunes filles. À l’issue de ces cours, la plupart des participantes disposent d’un revenu plus élevé grâce à ce métier supplémentaire.
Pourtant, Nguyên Huu Ky, chef du Bureau de l’économie et des infrastructures du district de Tân Phu, estime que l’État devrait aider les familles de l’ethnie Châu Ma à moderniser leurs équipements et à accéder aux nouvelles technologies pour fabriquer des produits conformes aux goûts des consommateurs. -CVN/VNA