Un nouveau genre pictural vient d’être présenté au public hanoïen par la peintre Nguyên Thi Lan Huong : la peinture-céramique. L’originalité est que l’on ne peint pas sur la céramique finie mais directement sur l’argile brute.

Soie, papier, bois… autant de matériaux utilisés depuis des lustres comme support de la peinture. Ces derniers temps à Hanoi, sont apparus des céramiques plates peintes comme des tableaux. Un nouveau genre pictural à mettre au compte de Lan Huong. L’exposition intitulée «Coloris à trois», récemment tenue à Hanoi, a fait la fierté de la peintre Lan Huong. Il s’agit de carreaux de mosaïques peints dont la vivacité des couleurs n’a rien à envier aux peintures à l’huile ou aux gouaches. Faisant connaissance avec cet art pictural, les visiteurs n’ont pas raté l’occasion de s’essayer à cette nouvelle technique. Tout le matériel avait été prévu. Une double joie pour Lan Huong qui a pu partager son enthousiasme et son savoir-faire.

La peintre Lan Huong

Une vie d’artiste liée à l’argile

Après le départ du public, elle a eu l’idée subite de rassembler la terre éparpillée et les couleurs pour créer des œuvres, sur place. Elle s’est mise passionnément au travail, s’enfonçant dans la nuit. Le lendemain, après une nuit de labeur, elle avait donné naissance à quatre oeuvres : trois sur la mer et une représentant des kapokiers fleuris.

«Ma vie de peintre est désormais liée à la terre cuite», raconte Lan Huong. Cette passion l’a prise le jour où elle a été invitée à concevoir de nouveaux modèles pour la faïencerie de Huong Canh, province de Vinh Phuc (Nord). «En voyant ces céramiques briller dans le feu du four, j’ai trouvé cela d’une grande beauté, confie-t-elle. Et je me suis dit : pourquoi ne pas utiliser ces carreaux comme supports de mes tableaux ?»


Ses quelques œuvres lors de l’exposition baptisée «Couleurs» en octobre 2012
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La peintre a décidé d’investir presque tout son argent dans un four à brique. Les premiers temps, Lan Huong a fait de la poterie, fabriquant vases, pots de fleurs, récipients divers et variés… sur lesquels elle laissait son pinceau divaguer. «Mes premières œuvres, je les ai offertes à des amis et connaissances qui, de leur côté, ont stimulé ma créativité», avoue-t-elle. Après, lui est venue l’idée de peindre sur une surface plane d’argile, comme s’il s’agissait d’une toile ou de papier. Par rapport à ces derniers, l’argile s’avère «plus accommodante», selon les termes de Lan Huong, qui explique : il suffit d’une heure de travail pour réaliser une peinture sur argile. «Le processus de création est beaucoup moins compliqué qu’avec d’autres matériaux. On peut donner les effets d’un lavis, d’une peinture à l’huile, d’une gouache et même sculpter l’argile… », éclaire-t-elle.

Accidents professionnels

L’argile est un beau et noble support, facile à travailler. L’étape de la cuisson exige une vigilance de tous les instants sous peine de voir son travail anéanti. Et de citer comme exemple le cas d’une peinture représentant un paysage pastoral, qu’elle avait façonnée avec beaucoup de soin. D’un format de 40 m x 2 m, la peinture «brute» a été coupée en plusieurs pièces pour faciliter la cuisson. Par malchance, deux de ces briques se sont cassées et sont tombées dans le feu. «Si elles s’étaient cassées hors du four, on aurait pu les rattacher. Le tableau souffre ainsi d’un défaut incorrigible», déplore-t-elle.


Deux peintures sur la mer de Lan Huong

Autrefois artisanale, la faïencerie de Huong Canh se tourne de plus en plus vers les techniques industrielles. Un avantage pour la peintre Lan Huong qui trouve désormais des carreaux plus résistants. «J’aime créer des peintures de grand format, qui semblent avoir une vie et une âme», explique-t-elle. Elle est fière de ses peintures-céramiques aux couleurs parfaitement harmonisées avec le brun foncé de l’argile, «d’une beauté époustouflante» comme l’ont observé ses collègues.

Originalité de la peinture-céramique

La création d’une peinture sur carreaux de céramique comprend deux étapes principales : malaxage de l’argile et peinture proprement dite. L’étape de la cuisson est la plus délicate, c’est la raison pour laquelle le peintre doit se doubler d’un potier. L’argile bien malaxée est étendue selon le format souhaité. Après une journée au soleil, la surface bien plane est fin prête pour le dessin. Une peinture de grand format (1,2 m x 0,8 m par exemple) doit être coupée en plusieurs pièces carrées pour la cuisson. À noter que la couleur change pendant la cuisson. Un côté aléatoire qui ajoute à la magie de cette technique. -VNA