La ville de Dà Lat abrite une collection bien originale. Depuis une trentaine d’années, Nguyên Dang Thanh amasse dans son humble demeure des vieilleries de toutes sortes. Il en possède aujourd’hui plus de 10.000, certaines valant une petite fortune.

À 64 ans, Nguyên Dang Thanh, un cultivateur expérimenté, possède une petite maison d’une vingtaine de mètres carrés située rue Hoàng Diêu, dans la ville de Dà Lat, province de Lâm Dông (hauts plateaux du Centre). Membre du Club provincial des collectionneurs d’objets anciens de l’UNESCO, il a fait de cette demeure un véritable entrepôt d’antiquités. Plus de 10.000 objets y sont exposés, chaque espace étant de fait occupé par un objet, le lit du vieil homme ne faisant pas exception. Le résultat d’une trentaine d’années de recherches.

Un musée miniature

Cet espace est une incroyable caverne de souvenirs. L’atmosphère qui y règne a tout à la fois quelque chose de passéiste, spirituel et exubérant. Depuis des années, les visiteurs ne cessent de poser la même question à ce paysan : comment a-t-il pu trouver le temps et l’argent de dénicher toutes ces vieilleries ?
«Depuis que j’ai commencé il y a une trentaine d’années, ma préoccupation n’est pas de dégoter des objets, mais plutôt de leur trouver une place. J’en possède de toutes sortes, de l’appareil photo aux épées anciennes, en passant par les pierres précieuses», confie Nguyên Dang Thanh. Dans ce musée miniature personnalisé, les poteries sont nombreuses, la plupart datent de la dynastie des Ly (1010-1225). Certaines d’entre elles sont recouvertes d’un émail vert, le plus précieux, d’autres d’un émail jaune.


Le «couteau d’ordre» aurait l’un des symboles du roi de l’ethnie Cham.

Afin de gagner un peu d’espace, M. Thanh a aussi envahi son jardin. Il y a entreposé 70 gongs et une grande quantité de vieux objets des ethnies de la région du Tây Nguyên comme des choé (jarres), des gùi (hottes), des cung (arc) et des nỏ (arbalètes). Sans oublier d’autres d’origine britannique, française, américaine, japonaise, chinoise, cambodgienne et thaïlandaise.

Trois objets précieux de l’ethnie Cham

Parmi les antiquités que possède le vieux cultivateur, certains sont relativement banals, d’autres ont une valeur inestimable et une histoire des plus fascinantes.

Dans son récit nous dévoilant les secrets de sa chasse aux trésors, Nguyên Dang Thanh nous montre ainsi une relique mystérieuse, en ouvrant un vieux coffre en bois dans le but de se saisir du couteau qui se trouve à l’intérieur. Il mesure 25 cm de long et environ 3 cm de large, et est orné de motifs originaux, typiques de la culture Cham. L’homme raconte : «Cet objet est d’une grande beauté, et au départ, le propriétaire ne voulait pas me le vendre. J’ai dû insister longuement, des mois durant». Et d’ajouter : «Ce couteau est en cuivre doré et aurait appartenu au roi de l’ethnie Cham. C’est ce que m’ont raconté des anciens de cette minorité, eux-mêmes tenant cette légende de leurs aïeux. Mais cette origine n’est pas encore avérée. J’ai fait appel à des archéologues pour la confirmer. Selon eux, tout indique qu’il n’était pas destiné à un usage quotidien, c’était un couteau d’ordre. Celui à qui le roi Cham le confiait avait le pouvoir de diriger l’armée». Aujourd’hui cependant, cette version attend encore une officialisation des autorités compétentes.

Poursuivant la visite de son antre, M. Thanh nous présente un autre objet typique de l’ethnie Cham, un pagne. Lui aussi aurait appartenu au roi. Cette étoffe relativement raffinée est en soie et est composée de nombreux motifs multicolores.

Il mesure 95 cm de large et 174 cm de long. «Ce pagne aurait entre 300 et 400 ans, selon des archéologues. Je l’ai acheté à un membre de l’ethnie Chu Ru, dans le district de Don Duong. On peut supposer que des proches du roi de l’ethnie Cham aient confié ce tissu à un Chu Ru, alors qu’ils étaient en déplacement dans la région abritant cette minorité», suppose t-il.

Notre visite se termine avec la découverte d’une série de 12 gongs Cham. Tous étant de dimensions décroissantes, posés l’un au-dessus de l’autre. Le plus grand mesure environ 60 cm de diamètre, et le plus petit environ 20 cm. «Lors de mon voyage dans la province de Ninh Thuân (Centre), j’ai rencontré par hasard une famille de l’ethnie Chu Ru propriétaire d’un ensemble d’instruments, transmis depuis de nombreuses générations. Elle souhaitait le vendre. Selon des chercheurs archéologiques, ce serait l’unique ensemble de gongs joués pendant les fêtes traditionnelles de la famille royale de la dynastie régnante des Cham», révèle Nguyên Dang Thanh. -VNA