Depuis 18 ans, le prêtre Nguyên Huu Triêt chargé de la cure de Tân Châu Sa (Hô Chi Minh-Ville), consacre son temps libre et son énergie à collectionner d’anciennes lampes à huile ou à pétrole. Aujourd’hui, il possède plus de 1.400 modèles dans sa chambre de prêtre, juste derrière l’église.

De nombreux Vietnamiens se souviennent encore des lampes à pétrole auxquelles on avait recours à chaque fois qu’il y avait des coupures d’électricité dans la soirée. Si c’est l’histoire d’un passé néanmoins récent, il est difficile de trouver aujourd’hui une lampe à pétrole dans nombre de familles. Elles ont presque disparu du quotidien de notre vie moderne. Mais chez le prêtre Nguyên Huu Triêt, on trouve une collection de plus de 1.400 lampes à pétrole et à huile constituée lors de ces 18 dernières années. Et il est le seul dans le pays à collectionner d’anciennes lampes à pétrole.

Les anciennes lampes sont exposées dans des vitrines ou pendues au plafond, en bref, les luminaires sont omniprésents dans la chambre du collectionneur. Leur diversité va de la forme au matériau employé : terre cuite, céramique, porcelaine, verre et métal, notamment en cuivre... Il s’agit de lampes de maison, de bureau, de marine de voiture à cheval ou de bicyclette..., qui témoignent des différentes cultures de l’histoire nationale, les plus anciennes remontant à celles d’Oc Eo (Ier -VIIe siècle) et de Dông Son (500-250 av. J.-C.)... Mais on en trouve des dynasties des Ly (1009-1225), Trân (1225-1400), Lê (1428-1788) et Nguyên (1802-1945), ou encore de villages tels que ceux de Bat Tràng (Nord), de Thanh Hoa (Nord), de Sài Gon ou encore du delta du Mékong... «Ces lampes sont non seulement une source de lumière mais aussi des œuvres d’art témoignant des valeurs esthétiques des époques dont elles viennent», indique le collectionneur.

Le prêtre Nguyên Huu Triêt est né dans une famille lettrée de la province de Hai Duong (Nord). Son père était maître et médecin traditionnel. Sa famille n’était pas riche, mais possédait deux objets antiques précieux. Il s’agissait d’un service à thé en émail bleu et d’une pipe à eau, tous deux de la dynastie chinoise des Qing (1644-1911). Ces objets ont été délicatement conservés par l’ensemble de la famille, ne quittant l’armoire familiale que lors d’occasions particulières, grandes fêtes, visiteurs d’importance...

En 1984, après le décès de son prédécesseur, Nguyên Huu Triêt a arrangé sa nouvelle chambre où il trouva six ou sept vieilles lampes à pétrole couvertes de poussière. Au lieu de les jeter, le curé Nguyên Huu Triêt se dit : «Pourquoi ne pas en chercher d’autres pour compléter cette petite collection ?» L’amour des anciens objets que ses parents lui ont transmis l’a ainsi conduit à étudier les anciennes lampes à pétrole : déterminer origine, valeur, matériaux... implique en effet de consulter de nombreux documents historiques, ou d’apprendre d’amis...

En tous lieux, s’il découvre de vieilles lampes, il cherche à les acheter. Il y a des lampes qui sont de belles antiquités mais si chères que le prêtre ne peut les acquérir, et il les regrette beaucoup. Actuellement, la lampe la plus chère que ce collectionneur ait achetée vaut environ 900 dollars. Les autres vont de quelques dizaines à quelques centaines de milliers de dôngs, quand ce n’est pas moins de dix mille dôngs ou tout simplement un cadeau d’un ami ou d’une connaissance...

Dans la collection du curé Nguyên Huu Triêt, il y a des lampes de 17 pays du monde : Inde, Chine, Japon, France, Israël, Singapour, Allemagne, Cambodge, Malaisie, États-Unis... Il se les ait procuré dans des brocantes au Vietnam. La plupart des luminaires de la collection du prêtre Nguyên Huu Triêt sont intacts et fonctionnels.

Le prêtre Nguyên Huu Triêt est fier d’être le Vietnamien à «saisir la lumière du temps à travers différentes époques». «Nos jeunes d’aujourd’hui ne connaissent que la lumière électrique. Beaucoup d’enfants n’imaginent ni ce que sont les lampes à pétrole, ni la vie des gens d’un passé pourtant récent encore qui s’éclairaient avec. Je conserve ces vieilles lampes afin que les jeunes connaissent mieux le passé de leurs ancêtres », déclare ce collectionneur de 67 ans. – AVI