Les Hauts plateaux du Centre est une région où passé et présent se confondent dans un paysage de montagnes et de forêts mystérieuses. Ici, on peut entendre résonner les gongs dans le lointain. Ici, vivent de nombreuses minorités ethniques aux coutumes particulières, sinon parfois extraordinaires, telle celle des statues des maisons funéraires qui est propre à cette région culturellement comme spirituellement.

Selon la coutume, après les funérailles, les J’rai, Bahnar, Êdê... construisent sur la tombe du défunt une petite maison funéraire ( Nhà mô Tây Nguyên) pour la protéger contre pluie et soleil. À l’intérieur sont déposés les objets du défunt. Après une, deux ou trois années, sa famille détruira cette maison pour en construire une autre, plus grande, entourée d’une clôture et agrémentée à l’extérieur de statues en bois : les « tuong nhà mô » ou statues de maison funéraire. Celles-ci représentent des formes humaines, d’oiseaux et d’autres animaux, ou des activités de la vie quotidienne. 



Pour les populations de la région du Tây Nguyên, mais plus particulièrement pour les J’rai, Bahnar et Êdê, la mort est le commencement d’une vie dans un autre monde. Ils considèrent que l’âme est encore présente, et nécessite nourriture, vêtements, maison et compagnons tout comme les vivants. Ces statues sont considérées comme les serviteurs du défunt.

Guidé par le patriarche Ro Châm Kra du village Kep 1(commune de Mo Nông, district de Chu Pah, province de Gia Lai), nous nous dirigeons vers la zone des maisons funéraires de son village. Là, nous découvrons un monde de statues en bois représentant humains, animaux et symboles de la vie dans l’au-delà, de plus en plus nombreux.

Ces statues sont relativement simples mais leurs formes sont suggestives et témoignent d’une grande humanité. C’est un jeune couple faisant naturellement l’amour, une femme enceinte, des nouveaux-nés... «Les habitants de mon village considèrent les Hlun (défunts) comme les vivants. Ils doivent avoir à manger et une vie spirituelle comme s’ils vivaient encore. Ce sont les sentiments simples mais sacrés que les vivants ont pour les morts» , explique le patriarche Ro Châm Kra.

Les statues de maison funéraire expriment tous les messages de vie du village réservés aux défunts. Le patriarche Ro Châm Kra a passé près de 60 ans à sculpter des Hlun dont il a une profonde connaissance spirituelle. «Ma femme est décédée il y a quatre ans, je lui offrirai un couple de statue en bois pour qu’elle ne sente pas seule» a-t-il confié. 



Ces statues sont un élément spirituel indissociable des communautés des ethnies minoritaires du Tây Nguyên. – AVI