Dans le 4e arrondissement de Hô Chi Minh-Ville, le métier de luthier (également appelée Tây Ban Cam) s’est particulièrement développé ces 50 dernières années. Ce métier a toujours existé dans la ville, et réussi à préserver son authenticité et son côté artisanal.

Dans l’ouvrage «Les villages de métiers traditionnels à Hô Chi Minh-Ville», Trân Van Khê est considéré comme l’ancêtre de ce métier. Il est né en 1928 à Nam Dinh, puis a immigré à Saigon pour pratiquer la menuiserie dans le 4e arrondissement. Des prêtres et des soldats français lui ont demandé de réparer leur guitare cassée. C’est ainsi qu’en 1950, il s’est engagé dans la fabrication des instruments à cordes puis a formé des jeunes. À l’époque coloniale, la guitare était rare, on devait l’acheter à l'étranger à un prix très élevé.

«Ba Don» (selon les gens du Sud, «Don» signifie instruments à cordes ), de son vrai nom Nguyên Van Tran, est né en 1947. Depuis un demi-siècle, trois générations de sa famille ont exercé ce métier. Son père a fabriqué des guitares à partir des années 1960. Actuellement, sept de ses enfants - cinq garçons et deux filles – sont engagés dans cet artisanat. Son atelier, nommé Trang Kieu, situé dans la rue Nguyên Van Linh, district de Binh Chanh, est géré par Nguyên Van Trang, son deuxième fils. Sa femme, Pham Thi Thanh Kieu, est aussi née dans une famille de luthiers. Selon Trang, la guitare a un franc succès auprès des jeunes. Fort de 20 ouvriers, son atelier produit une centaine de guitares par jour. Ce chiffre ne répond pas à la demande actuelle, alors il prévoit d’embaucher plus d’ouvriers.

Dans l’atelier de Trang, nous avons assisté à chaque étape de fabrication d’une guitare, qui en comprend une dizaine. Fabriquer la caisse, coller le contour, assembler le manche... L'étape finale est de fixer les cordes. La phase la plus difficile et la plus importante est de fabriquer la caisse. La qualité d’une guitare dépend étroitement de la caisse. Aussi cette étape cruciale est-elle prise en charge par des ouvriers qualifiés. On n’utilise une machine que pour peindre et assembler le manche. Les autres étapes sont réalisées à la main et demandent une très grande précision.

De nombreuses sortes de bois sont utilisées, pour chaque partie, et parfois même du bois importé pour fabriquer des guitares de très bonne qualité. L’atelier fabrique guitare classique, moderne, violon, mandoline… Le prix dépend de la qualité du bois, et va de 500.000 à 2 millions de dongs, ce qui reste raisonnable.

Dans la mégapole du Sud, sur un kilomètre de la rue Nguyên Thien Thuat (dite «rue des instruments»), dans le 2e quartier, 3e arrondissement, une quinzaine de magasins vendent des instruments. Ceux-ci se retrouvent un peu partout dans le pays et même à l’étranger comme en République Corée, en Malaisie et en Europe. - AVI