Hanoi (VNA) - Lorsque le Têt arrive, un mât rituel, ou Cây nêu en Vietnamien, est érigé dans certaines régions du Vietnam, plus particulièrement dans les zones rurales et montagneuses. Il symbolise le bonheur, la santé, la vie paisible pour le foyer durant les premiers jours de l’année lunaire.
L’érection du Cây nêu est un ancien rite populaire des Vietnamiens. Selon la coutume, il s’agit d’une longue perche, de 5 à 7 mètres, d’un bambou précis, le phyllostachys (Parashorea chinensis), ou gô chò en Vietnamien, au sommet duquel on fixe un cesseau et un parchemin rouge. Le bambou symbolise très justement la vitalité, la souplesse et la résistance. Ce mât est érigé devant les maisons, les temples, les palais et les pagodes pendant le Têt afin d’écarter les démons et les fantômes : en effet, selon la croyance populaire traditionnelle des Vietnamiens, il délimite la frontière entre le monde des vivants et celui des démons.
Au Nord, selon la coutume des Kinh (des Viêt), le Cây nêu est en général dressé le 23e jour du 12e mois lunaire, et retiré le 7e jour du premier mois lunaire.
Le 23e jour du douzième mois est celui, selon la croyance populaire, où le Génie du foyer enfourche sa carpe pour s’envoler vers le Ciel afin de faire son rapport annuel des activités et du comportement de la famille à l’Empereur de Jade. En d’autres termes, les foyers ne sont plus protégés durant cette période, d’où la nécessité du Cây nêu.
Autrefois, son érection marquait le début de la préparation du Têt Nguyên Dan : tout le monde arrêtait les travaux ordinaires afin de se consacrer aux préparatifs des festivités, du nettoyage de la maison à la préparation des rites, des plats...
Des vœux pour les 1ers jours du Nouvel An
Les pratiques dans d’autres ethnies que les Kinh varient. Ainsi, chez les Muong, non seulement on dresse le Cây nêu le 28e jour du 12e mois pour le retirer le 7e jour du premier mois lunaire, mais on en dresse plusieurs, dans la cour, dans la cuisine, dans le jardin, dans la porcherie, dans l’étable..., alors que dans l’ethnie H’mông vivant au Nord-Ouest du pays, du 3e au 5e jour du premier mois lunaire seulement : c’est également la fête traditionnelle Gâu Tào - à Lào Cai, consacrée à la prospérité et au bonheur.
Chaque ethnie a son propre Cây nêu, comme les mâts rituels du jeu de Nem con (boule en tissus colorés) organisé lors de la fête Lông tông - ou fête de la descente au champ des ethnies Tày, Nùng, Dzao et San, les perches du sacrifice du buffle des ethnies minoritaires des hauts-plateaux du Centre, ou encore les mâts pôn pông des Muong.
Le Cây nêu est aussi appelé l’arbre de l’univers, pour les amateurs, un Yggdrasil, mutatis mutandis, local, mais qui relie la Terre et le Ciel. Il est décoré de différents objets selon les us et les coutumes de chaque région.
Tout ce qui y est attaché symbolise des vœux de bonheur, de santé et de paix pour l’homme. Par exemple, les plaques décorées appellent le bonheur sur la famille, la branche de banian, la chance et la longévité, des plumes de poulet symbolisent l’oiseau sacré qui apporte toujours son aide à l’homme, un feuillage de rond de papier rouge qui représente le Soleil, la cime étant la place où l’oiseau sacré, l’Ambassadeur du soleil, s’arrête.
«Selon les légendes, les objets suspendus sur le mât et le bruit du +khanh+ font comprendre aux démons et aux fantômes que la terre sur laquelle il se dresse a un propriétaire, afin qu’ils ne l’approchent pas», explique le professeur Ngô Duc Thinh, ancien directeur de l’Institut de recherche sur la culture du Vietnam.
Le mât rituel est érigé à la fin de l’année pour qu’il s’élance dans le ciel pour accueillir les premiers rayons de soleil du printemps. On y accroche une lanterne à son sommet pour que les ancêtres puissent retrouver le chemin du foyer pour célébrer le Têt avec leurs descendants. -CVN/VNA