Le gardien des derniers langurs du delta du Mékong

Trân Van Thành, habitant du district de Tri Tôn, province d’An Giang, a consacré une grande partie de sa vie à la protection d’un groupe de langurs à face dorée d’Indochine (Trachypithecus germaini), une espèce menacée d’extinction.

M. Thành nourrissant des langurs argentés d’Indochine au mont Cô Tô, district de Tri Tôn, province d’An Giang. Photo : CTV/CVN
M. Thành nourrissant des langurs argentés d’Indochine au mont Cô Tô, district de Tri Tôn, province d’An Giang. Photo : CTV/CVN

Hanoï (VNA) - Trân Van Thành, habitant du district de Tri Tôn, province d’An Giang, a consacré une grande partie de sa vie à la protection d’un groupe de langurs à face dorée d’Indochine (Trachypithecus germaini), une espèce menacée d’extinction.

Sur les cimes du mont Cô Tô, dans le district de Tri Tôn, province d’An Giang, dans le delta du Mékong, perché à 614 m d’altitude, vit un homme au grand cœur : Trân Van Thành. Surnommé “Thành Vooc” (Thành langurs), il consacre du temps et de l’énergie à la protection et au bien-être d’une espèce menacée : le langur à face dorée d’Indochine.

Le chant d’espoir des langurs

Dès que l’appel familier de M. Thành retentit dans la forêt, “Mai, Mai, viens manger ! ”, une scène extraordinaire commence. Les langurs à face dorée d’Indochine, habituellement si timides et farouches face aux humains, descendent des arbres avec empressement. Ils se rassemblent autour de lui, impatients de savourer les mets qu’il leur offre.

En 1996, alors qu’il cueillait des légumes en forêt, M. Thành est tombé par hasard sur un langur caché dans un arbre. “Avec sa fourrure toute en nuances de gris se fondant avec les rochers et les arbres de la forêt, il était difficile à repérer”, raconte-t-il.

Au départ, il l’a confondu avec un macaque, ceux-ci étant nombreux en montagne. Mais en y regardant de plus près, il a remarqué sa queue plus longue et plus épaisse, ainsi que sa fourrure bien particulière.

Après cette rencontre, bien que le langur ne reparaisse pas, à chaque cueillette de fruits et légumes en forêt M. Thành a gardé l’œil ouvert pour tenter de retrouver la créature.

Le jour où il a enfin à nouveau croisé le chemin d’un langur, ne cherchant nullement à le capturer. Au contraire, il lui a parlé doucement, l’appelant “Mai, Mai” et tentant de l’attirer avec des bananes, du jacquier, des nouilles instantanées et du pain.

Au début, le langur restait méfiant et gardait ses distances, puis s’est montré petit à petit plus audacieux, descendant des arbres pour récupérer la nourriture que M. Thành lui lançait. À force d’habitude, il s’est même rapproché jusqu’à prendre la nourriture directement auprès de Thành. C’était un langur mâle.

Peu de temps après, alors que M. Thành se trouvait chez lui près de la zone de Vô Hôi Lon, il a entendu des bruits inhabituels. Le langur était revenu, accompagné d’un groupe de cinq individus, dont deux jeunes.

M. Thành est rentré chercher des paquets de nouilles instantanées. Dès lors, les visiteurs ont pris l’habitude de venir se nourrir à son domicile.

Progressivement, les habitants du village et les gardes forestiers ont entendu parler de M. Thành et de son histoire de langurs.

Les gardes forestiers se sont finalement rendu au sommet de la montagne pour vérification et ont aperçu le groupe d’animaux à la fourrure gris-argent et aux pattes noires, confirmant qu’il s’agissait bien de langurs à face dorée d’Indochine, une espèce rare et menacée inscrite dans le Livre rouge du Vietnam.

Les gardes forestiers ont sensibilisé les habitants locaux à l’importance de protéger ces animaux rares, en interdisant la chasse, le piégeage ou toute forme de captivité. Conscients de leur responsabilité, les villageois veillent désormais bénévolement à la protection des primates.

Dès qu’ils repèrent des braconniers armés de fusils, de pièges ou toute personne susceptible de chasser les langurs, ils les signalent aux autorités.

Nguyên Thành Liêm, chef du Bureau de la protection des forêts et de la conservation de la nature de l’office provincial de protection des forêts, déclare que les langurs sont toujours restés soigneusement protégés. Depuis leur apparition, aucun habitant ne les a chassés pour leur viande ni capturés.

Une espèce menacée sous haute protection

Les langurs revenant fréquemment dans les zones Vô Hôi Lon, Vô Hôi Nho et Sân Tiên, points culminants de la montagne, pour quémander de la nourriture, les gardes forestiers ont fourni pendant des années de la nourriture, notamment des fruits et des nouilles instantanées à M. Thành, afin qu’il puisse la distribuer aux langurs.

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Le mont Cô Tô, dans le district de Tri Tôn, province d’An Giang (delta du Mékong). Photo : CTV/CVN

Les efforts de protection impliquent également des patrouilles et des contrôles réguliers pour empêcher le braconnage.

Selon M. Thành, il y a actuellement 14 langurs dans la montagne. La province compte 37 montagnes et collines, mais le mont Cô Tô est le seul endroit où réside cette espèce.

Le Service des ressources naturelles et de l’environnement d’An Giang a recensé six langurs en 2014 et neuf en 2020, tous vivant en montagne.

Ce site constitue un habitat idéal, avec des forêts naturelles composées de petits et grands arbres, associées à des arbustes et buissons. La montagne renferme également des grottes dans lesquelles on trouve de petites cavités et des canopées ombragées où les langurs peuvent se réfugier. Cependant, en raison du nombre toujours extrêmement faible de la population, le risque d’extinction reste très élevé, c’est pourquoi ils ont besoin d’une protection à tous les niveaux.

Selon M. Liêm, la préoccupation actuelle est de trouver un autre groupe de langurs à introduire dans la montagne afin qu’ils se reproduisent avec les langurs déjà présents.

“Ils constituent désormais le seul groupe de langurs de la montagne, si bien qu’une consanguinité prolongée pourrait conduire à une stagnation génétique et à un risque d’extinction très élevé”, avertit-il.

Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) de 2016, les langurs à face dorée d’Indochine sont “en danger critique d’extinction”.

En vertu du décret gouvernemental N°06/2019, l’espèce est classée dans le groupe IB - Animaux forestiers en danger.

Dans la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), l’espèce est inscrite à l’Annexe II. - CVN/VNA

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