Les courts-métrages du Vietnam sont de plus en plus présents sur le marché du film. Mais s’ils sont importants en nombre, leur qualité reste controversée, et peu de réalisateurs du genre ont vraiment trouvé leurs marques. Analyse. 

Depuis trois ans, les courts-métrages, essentiellement produits par de jeunes réalisateurs, attirent de plus en plus l’attention des spectateurs et des critiques de cinéma, même si le taux de fréquentation des salles obscures reste très relatif. Les festivals de films au Vietnam et à l’étranger en présentent de nombreux. Parmi les plus appréciés : Ngô-I foud you (Ngô, je t’ai trouvé), Diêu con lai (La chose qui reste), Can phong (La chambre), Hai chu chau (Oncle et neveu), Nguoi dàn ông trong bê ca (L’homme dans l’aquarium), Môt ngày (Un jour), Truc nhât voi Thu Ky (Être de service avec Shu Qi), etc.
Une certaine reconnaissance

Ces films ont non seulement gagné la sympathie des spectateurs, mais bon nombre d’entre eux ont aussi remporté des prix lors de festivals nationaux et internationaux, et ont même leurs affiches dans des cinémas à l’étranger. Les courts-métrages ont la plupart du temps un scénario simple, compte tenu de leur durée, et traitent souvent de la vie quotidienne. Les réalisateurs recourent à peu de dialogue et misent davantage sur le décor, la lumière, et la personnalité des personnages. Une manière de faire différente du long-métrage qui leur donne leur valeur ajoutée.

Lors de la cérémonie de remise des Prix Canh diêu vàng (Cerf-volant d’or) 2013, organisée par l’Association des cinéastes du Vietnam, le 9 mars à Hô Chi Minh-Ville, le film Chiêc hôp Pandora (La boîte de Pandore), de Dang Viêt Duc, a remporté le Cerf-volant d’or dans la catégorie «Meilleur court-métrage». Une consécration pour ce jeune réalisateur qui signe là son premier film reconnu. À 25 ans, il a réussi à émouvoir les spectateurs en racontant la rencontre par hasard entre un homme fou et deux enfants.


L’an passé, The Visitor (Le visiteur), de Nguyên Lê Hoàng Viêt, a devancé de loin les 101 films en compétition, venant de 46 pays dans le monde, pour se hisser dans le Top 10 des oeuvres récompensées par le Prix des courts-métrages de l’Asie-Europe 2012 (AESF-Asia-Europe Short Films Awards).

Lors du gala de projection des courts-métrages les plus marquants du Festival de films en ligne, à l’Université de Los Angeles en 2011, Ca chuôi (Poisson maculé), Duoi bong cây (À l’ombre des arbres), Nguoi dàn ông da o do (L’homme qui est là), et Môt cuôc thâm vân (Une interpellation) ont été honorés.

Début avril, 51 courts-métrages vietnamiens et 18 longs-métrages seront présentés au 6e Festival international du film vietnamien (ViFF) 2013 aux États-Unis. Le ViFF est un évènement bisannuel destiné aux cinéastes d’origine vietnamienne de tous pays dont, cette année, d’Australie, du Canada, de Singapour et de France. La moitié des courts-métrages du Vietnam qui seront proposés ont déjà été projetés lors du Festival du film en ligne il y a deux ans.

Un développement encore timide

D’après plusieurs réalisateurs chevronnés, les courts-métrages vietnamiens deviennent tendance depuis trois ans. De plus en plus de jeunes réalisateurs sortant des écoles de théâtre et de cinéma se lancent dans cette catégorie. Si cet essor se poursuit, ces films pourraient devenir l’un des genres clés du cinéma vietnamien.
Pourtant, les critiques avertis sur le sujet ne sont pas si optimistes. Beaucoup se demandent pourquoi les courts-métrages du Vietnam, pourtant de plus en plus nombreux, sont encore peu reconnus et n’arrivent pas à se faire un nom, et pourquoi les spectateurs se déplacent encore peu en salles. « Les réalisateurs du genre en font trop. Leurs descriptions abusives de la psychologie des personnages rendent les films larmoyants. Tout est forcé, analyse le réalisateur Nguyên Huu Tuân. Je pense que les réalisateurs devraient aller directement à l’essentiel et annoncer ce qu’ils veulent montrer dès les premières secondes ».

Sur le plan commercial, bien que de nombreux courts-métrages soient bien meilleurs que certains longs-métrages, ils ne trouvent pas encore leur place dans les salles obscures. Excepté quelques rares réalisateurs comme Nguyên Huu Tuân, Cuong Ngô, ou Nguyên Duc Minh, qui ont la chance d’être produits par des distributeurs, les autres tombent dans l’oubli après chaque festival. De fait, la plupart des producteurs et distributeurs ne veulent pas prendre de risques. Ils investissent d’abord dans les films qui leur assureront un chiffre d’affaires convenable.

Il est temps de trouver des orientations de développement claires et plus professionnelles, d’investir pour que ce genre se professionnalise et n’attire plus seulement les jeunes réalisateurs. –AVI