L’art culinaire dela cour royale de Hue est considéré comme l’apogée de la gastronomievietnamienne : il en sublime le raffinement, la noblesse et l’attrait.Certains mets de la cour royale utilisent des ingrédients qui pourraientpresque paraître triviaux. Ce qui fait la différence, ce sont lestechniques de préparation et de présentation qui confinent au grand art.
Ton Nu Thi Ha, l’une des rares personnes qui perpétuentl’art culinaire de la cour royale de Hue : « Pour qu’un plat soitvraiment savoureux, il faut l’assaisonner plusieurs fois. Par exemple,pour certains plats, on poivre jusqu’à cinq fois : durant la marinade,au cours de la cuisson, à la fin du cuisson, au moment de présenter leplat et au moment où l’on se sert. Comme ça, le mets gardera toutes sessaveurs. », a-t-elle révélé.
Dans l’art culinaire de la courroyale de Hue, chaque mets est une unité harmonieuse de goûts et decouleurs, de yin et de yang, de chaud et de froid. Phan Thanh Hai,directeur du centre de préservation des vestiges de l’ancienne capitalede Hue, fait savoir : « L’art culinaire de la cour royale de Hue estraffiné et noble sans être sophistiqué. Tous les plats sontconfectionnés avec des ingrédients vietnamiens bien sélectionnés et bientraités. Ils sont à la fois savoureux, nourrissants et bons pour lasanté. »
Lors du récent festival de Hue de 2014, lecomité d'organisation a fait préparer six mets spécifiques de la courroyale de Hue dont on pensait avoir perdu la recette et dont le seulénoncé suffit à faire saliver : salade aux crevettes glissantes,concombres de mer aux crevettes et aux légumes, gâteau à la patatepourpre et gâteau au millet, salade au poulet et au canard, canard auriz gluant et gâteau de riz gluant enrobé dans du papier aux cinqcouleurs. C’est Ho Thi Hoang Anh qui était responsable du choix desingrédients, de la préparation et de la présentation de ces mets qui ontété servis à quelque 600 convives. Baptisée « ambassadrice de lagastronomie de Hue », elle est d’ailleurs la descendante d’un certain HoVan Ta, qui fut en son temps chef de l’équipe en charge des repas del'empereur Khai Dinh.
Selon Ho Thi Hoang Anh, la vaisselleutilisée dans les banquets royaux était en porcelaine, des servicesspécialement conçus pour la cour. Quant aux baguettes, elles pouvaientêtre en ivoire, en pierre précieuse garnie d’or ou en kim giao, unesorte de bois précieux permettant de détecter le poison dans les plats. «Pour reconstituer ces plats, nous avons choisi les meilleursingrédients, autrefois réservés à la cour royale. » a dit Ho Thi HoangAnh. « Par exemple, les concombres de mer et le poivre de Phu Quoc,considérés comme les meilleurs au Vietnam, le siponcle nu (Sipunculusnudus, plus connu sous le nom de bibi) de Quang Ninh, les coquillesSaint-Jacques de Truong Sa, l’aile de l’île de Ly Son, les graines delotus de Hue... », a-t-elle conclu.
Il faut prendre du tempspour savourer ces plats très recherchés. Nguyen Phuong, un Hanoien qui aeu le privilège de compter au nombre de ces convives, nous livre sesémotions après avoir goûté des gâteaux de riz gluant enrobé dans dupapier aux cinq couleurs. « C’est très original ces gâteaux. Ils étaientconfectionnés d’une manière très recherchée, avec de nombreuxingrédients qui leur donnent une saveur unique. » a-t-il indiqué.
Savourerles mets autrefois réservés à la famille royale tout en regardant unspectacle de musique de cour… Qui dit mieux ? Le centre de préservationdes vestiges de l’ancienne capitale de Hue poursuit ses recherches envue de reconstituer d’autres plats de la cour impériale au service deconvives vietnamiens et étrangers. -VNA