Patrimoine culturel immatériel national depuis mars 2013, la peinture de Dông Hô doit maintenant relever le défi de sa préservation et de sa transmission. D'autant qu'elle souhaite également une reconnaissance auprès de l'UNESCO.

Après avoir été reconnu par l'État vietnamien patrimoine culturel immatériel national, le métier de dessinateur d'estampes de Dông Hô (dans la province de Bac Ninh, à l'Ouest de Hanoi) poursuit la quête de protection de son art. Le Premier ministre Nguyên Tân Dung a autorisé ses défenseurs à élaborer un dossier à l'UNESCO afin d'obtenir le titre de "Patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde d'urgence" pour la période 2012-2016. La province de Bac Ninh a procédé aux premières étapes de l'élaboration du dossier. Selon le calendrier, ce dernier sera soumis d'ici deux ans à l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture.

L'artisan octogénaire Nguyên Dang Chê et sa famille ont économisé pendant des années avant de réussir à construire un Centre d'archives des peintures traditionnelles de Dông Hô en 2008. Situé à quelques encablures du village, sous la digue de la rivière Duông, c'est à la fois un établissement de production, un lieu d'exposition, de présentation et de vente des estampes de Dông Hô. Les visiteurs peuvent observer les artisans travailler et s'initier aux processus de production, tels que l'impression ou la confection des pigments.

Nguyên Dang Chê dispose d'environ 250 œuvres différentes, nouvelles comme anciennes, enrichies de modèles inédits. Ainsi, en 2011, Alain Henry, alors directeur de l'Agence française de développement (AFD) à Hanoi, lui a offert une nouvelle réédition du livre du professeur français Maurice Durand sur l'imagerie populaire du Vietnam. Ce dernier présentait, entre autres, des estampes de Dông Hô. " M. Henry m'a également restitué une trentaine de modèles de peintures qui avaient été perdues et que je n'avais jamais vues ", raconte-t-il.

De l'essor à l'effort

La peinture de Dông Hô est une tradition datant du XVI e siècle. Il s'agit d'estampes réalisées à partir de planches xylographiques qui sont ensuite enluminés. Populaires, ces images le sont par leur mode de fabrication artisanale, leur prix et leur esthétique, autant de facteurs qui expliquent leur succès.

Au fil du temps, Dông Hô est devenu une “école” réputée pour ses techniques d'aplats de couleur. À l'approche du Têt traditionnel, avant la guerre, Dông Hô et Hàng Trông (à Hanoi) en vendaient près de deux millions d'exemplaires. On estimait alors à 2.000 le nombre de séries différentes, ce qui donne une idée de la variété de sujets représentés par ces images. " Le village comptait 17 familles pratiquant la peinture d'estampes ", informe Nguyên Dang Chê.

Cependant, la fragilité du support papier, conjuguée à un manque d'intérêt de plus en plus considérable pour la culture traditionnelle, a peu à peu relégué cet art graphique au rang de vestige d'un passé révolu. Aujourd'hui, ces familles ne sont plus que deux pour le perpétuer de manière significative : celles de Nguyên Dang Chê et de Nguyên Huu Sam.

Ce dernier s'occupait il y a quelques années d'un groupe d'exportation de ces peintures. " J'ai consacré toute ma vie à la préservation de ce que nous ont légués nos ancêtres. De ces centaines d'œuvres, chacune possède sa propre âme, chacune recèle d'un aspect particulier de la culture vietnamienne ", confie-t-il. Et d'ajouter : " La tradition s'éteint progressivement sous l'influence de la peinture moderne, presque tous les artisans se tournent vers le papier votif ".

Nguyên Huu Sam s'est battu bec et ongle pour que ses enfants prennent la relève, et ses efforts ont payé. Son fils Nguyên Huu Qua commence à s'y pencher avec le plus grand intérêt, au grand bonheur de son père.
Le Service de la culture, des sports et du tourisme de Bac Ninh a suggéré au Comité populaire provincial d'apporter un soutien financier aux artisans pour les aider dans leur démarche. " Il s'agit là d'un acte important des autorités locales en faveur des villageois ", estime Nguyên Van Phong, directeur dudit service.

Tout récemment, le service a ainsi présenté une trentaine de modèles de dessins de Dông Hô à des établissements nationaux et étrangers, afin de faire connaître cette peinture populaire au grand public.

Dans le cadre de ces démarches, sa reconnaissance par l'UNESCO comme "Patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente" permettrait sans nul doute à cette tradition de retrouver une certaine vigueur. - VNA