Hanoi (VNA) - Il y a 25 ans, le professeur français Odon Vallet, historien des religions, créait la Fondation Vallet dans le but de soutenir des étudiants brillants mais en proie à des difficultés financières. Il a consacré à cette cause la totalité des 100 millions de dollars qu’il avait hérités de son père. Des rencontres déterminantes ont suivi, et depuis 2001, de jeunes Vietnamiens comptent parmi les bénéficiaires des bourses Vallet. Une aventure extraordinaire qui s’est poursuivie jusqu’à ce jour, avec d’anciens boursiers devenus scientifiques, ingénieurs, gestionnaires… mais aussi donateurs, au nom de la fondation qui les a soutenus.
L’histoire commence donc en 1999 en France. Cette année-là, l’association Rencontres du Vietnam est déjà très active au Vietnam. Fondée par le physicien Trân Thanh Vân et son épouse, la biologiste Lê Kim Ngoc, tous deux professeurs en France, cette association organise des rencontres entre scientifiques vietnamiens et internationaux, et finance plusieurs projets humanitaires au pays. L’une de ses activités consiste en l’attribution de bourses à des étudiants de la Licence d’excellence, comme le rappelle son président Trân Thanh Vân.
«En l’an 2000, le professeur Odon Vallet a assisté à une remise de bourses organisée par ‘Rencontres du Vietnam’ pour des étudiants de la Licence d’excellence. Voyant ceux-ci recevoir leurs récompenses des mains propres de professeurs lauréats du prix Nobel, le professeur Odon Vallet a proposé de rejoindre notre initiative. C’est ainsi que nous avons créé spécialement la série de bourses Vallet qui en quelques années a pris une importance considérable dans l’univers éducatif du Vietnam», indique-t-il.
Cette série de bourses Vallet-Rencontres du Vietnam a donc officiellement vu le jour en 2001.
Espéran Padonou est un docteur en mathématiques français d’origine béninoise. Ancien boursier de la Fondation Vallet, il en est devenu le vice-président et directeur.
«En 25 ans, la Fondation Odon Vallet a dépensé 137 millions d’euros en France, au Vietnam et au Bénin. Cela s’est traduit par l’attribution de 80.000 bourses dans les trois pays, dont 50.000 au Vietnam. Parmi les boursiers vietnamiens figurent plus de 400 médaillés à des olympiades scientifiques mondiales. Plus de 300 d’entre eux ont intégré ensuite l’École polytechnique de Paris, la meilleure école d’ingénieurs de France et peut-être d’Europe. Parmi les boursiers figurent également plus de 1.000 médecins et chirurgiens», précise-t-il.
Pourquoi le Vietnam occupe-t-il une proportion aussi dominante parmi les trois pays bénéficiaires de la Fondation Vallet? Qui d’autre est mieux placé que le professeur Odon Vallet lui-même pour répondre à cette question?
«Moi, je suis Français, mais je suis aussi à moitié Vietnamien. Le Vietnam est un pays extraordinaire qui n’a pas d’équivalent au monde pour les qualités intellectuelles des jeunes. Nous remettons des bourses à des jeunes qui dans d’autres pays n’auraient pas le même niveau de vie, et auxquels donc, on ne remettrait pas ces bourses. Vous êtes tous des élèves, garçons ou filles - j’y tiens beaucoup - d’excellence», a-t-il déclaré.
Le professeur Odon Vallet a tenu ces propos à des boursiers et d’anciens boursiers de sa fondation, réunis le 21 septembre dernier à Hanoï pour célébrer le 25e anniversaire de l’organisation. À cette occasion, le ministre vietnamien des Sciences et des Technologies, Huynh Thành Dat, a tenu à saluer une fondation de bourses non gouvernementale «parmi les plus grandes, les plus prestigieuses, les plus persévérantes et les plus durables dans notre pays».
«Au-delà de leur valeur matérielle, ces bourses constituent une source d’encouragement significatif aidant les boursiers à poursuivre leur rêve. Ainsi en 25 ans, la Fondation a contribué à semer des graines de talent dans des domaines des sciences naturelles, des techniques et de la médecine, permettant à ces jeunes de maximiser leurs capacités et de devenir des scientifiques, des experts et des dirigeants contribuant activement au développement national. Les bourses Vallet ont également créé de meilleures opportunités d’études pour des élèves dans des zones lointaines et reculées, issus de minorités ethniques et pour des élèves en situation difficile mais qui font preuve de détermination», a-t-il noté.
En 2003, Nguyên Dinh Hà, alors étudiant à l’Institut national des sciences appliquées de Rouen Normandie, recevait 4.500 euros de la Fondation Vallet. Cette bourse récompensant ses excellents résultats d’études l’a libéré de petits boulots manuels pour se consacrer à la préparation du concours d’entrée à l’École polytechnique de Paris, qu’il allait évidemment réussir haut la main. Dinh Hà a fait ensuite une brillante carrière dans les finances, avec la création d’un fonds d’investissement à Singapour. Il est devenu, depuis une décennie, un contributeur de la Fondation Vallet.
«La plus grande chance pour moi a été de rester proche de vous, les trois professeurs fondateurs de la bourse, et de bénéficier de vos conseils pour mon parcours scolaire et professionnel, et aujourd’hui encore, vous continuez de me donner des leçons de vie. L’impact de vos actions au cours des 25 ans est immense. Et ça augmentera au fil du temps, car nous, les anciens boursiers, sommes devenus utiles à la société. Grâce à la bourse, on a eu de bonnes conditions pour réussir dans les études, et trouver un bon travail. De nombreux anciens boursiers ont intégré de grandes écoles françaises et mondiales, d’autres occupent aujourd’hui des positions importantes au Vietnam. En langage d’investissement, j’appellerais cette réussite un «effet de levier»… La bourse donne aux lauréates et aux lauréats une égalité de chance. Pour moi, c’est un miracle, une preuve de méritocratie», a-t-il partagé.
En 2001, 300 Vietnamiens ont reçu la bourse Vallet. En 2024, ils étaient 2.100 à bénéficier de la générosité de ce Français altruiste et visionnaire, qui table désormais sur une longévité de sa fondation au moins égale à celle d’un certain… Alfred Nobel. – VOV/VNA