Hát Xoan, un art vocal sur la "Liste rouge"
Le 24 novembre 2011, l'Organisation des
Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) a
officiellement reconnu le Hát Xoan (chant printanier) de la province de
Phú Tho en tant que "patrimoine culturel immatériel de l'humanité
nécessitant une sauvegarde d'urgence". Le second patrimoine mondial du
pays inscrit sur la "Liste rouge", le premier étant le Ca trù (chant
des courtisanes).
Originaire
de Phú Tho, province de la moyenne région du Nord, terre des rois Hùng
considérés comme les fondateurs du pays (il y a environ 2.000 ans av.
J.-C.), le Hát Xoan ou Hát cua dình (chant à l'entrée de la maison
communale) serait, selon les chercheurs, le plus ancien chant
folklorique du Vietnam. Il était interprété à l'arrivée du printemps, à
l'occasion du Nouvel An ou lors des fêtes villageoises. On chantait
pour honorer les rois Hùng, les génies tutélaires des villages, la
nature, la vie et le travail, mais aussi pour bénéficier d'un temps
favorable aux cultures, de moissons abondantes...
Les
guildes du Hát Xoan sont toutes originaires de villages du centre de
l'ancien royaume Van Lang (actuellement ville de Viêt Trì, province de
Phú Tho). C'est pourquoi, le Hát Xoan conserve encore des éléments
culturels de la période de fondation du pays.
Selon un
sondage réalisé par le Service provincial de la Culture, des Sports et
du Tourisme de Phú Tho, les airs anciens de Xoan ne sont conservés de
manière relativement complète que dans quatre quartiers de Xoan
d'origine que sont les hameaux d'An Thái (commune de Phuong Lâu), Thét,
Phù Ðuc et Kim Ðái (commune de Kim Duc), tous à Viêt Trì. Actuellement,
il ne resterait plus dans la province de Phú Tho que 69 "vrais"
chanteurs de Xoan, dont 31 de 80 ans ou plus, et seulement 8 enseignant
leur art.
Conscient du risque de disparition, ces
dernières années, Phú Tho a pris des mesures d'urgence de préservation
du Hát Xoan, dont l'organisation de concours dans toute la province, de
représentations lors des fêtes du Temple des rois Hùng ou à l'occasion
de l'anniversaire de la mort de ceux-ci. En particulier, "puisque le
Hát Xoan est reconnu comme patrimoine culturel immatériel de
l'humanité, la province a élaboré un programme d'action pour le
préserver et le promouvoir", a déclaré Pham Bá Khiêm, directeur adjoint
du Service provincial de la Culture, des Sports et du Tourisme. Et de
souligner la nécessité de se coordonner avec les secteurs concernés
"pour enseigner ce chant dans les écoles de la province, ainsi que lui
accorder une place de choix dans les programmes radiophoniques et
télévisés locaux".
Une initiative saluée par Nguyên Khac
Xuong, un célèbre chercheur culturel de Phú Tho : "Il est possible
d'introduire le Hát Xoan dans les activités extrascolaires des élèves,
de Phú Tho en premier lieu. Car si les jeunes de la province ne
comprennent pas le chant printanier, ne l'aiment pas, comment
voulez-vous que ceux d'ailleurs puissent l'apprécier".
Les
airs de Hát Xoan ne sont plus seulement un patrimoine culturel
immatériel de Phú Tho et du Vietnam. Depuis peu, ils sont en effet
entrés dans la liste des biens culturels de l'humanité, avec toute la
responsabilité que cela implique. Protéger cet art vocal et le faire
sortir de cette terrible "liste rouge" des patrimoines en danger
nécessiteront d'abord de le faire aimer des jeunes, ou du moins d'un
nombre suffisant d'entre eux qui pourront reprendre le flambeau et le
transmettre à leur tour. Un vrai défi... -AVI