"Pour un décorateur floral, l’important c’est la passion", exprime Hà Minh Khôi, patron d’une boutique de fleurs dans la rue Hô Xuân Huong, à Hanoï.
Khôi considère que la création de compositions florales est un travail àla fois exigeant et stressant. Le décorateur floral travaille avec soinet minutie. Une bonne résistance au stress et une capacité à resterconcentré en dépit des événements sont aussi des atouts. "Les fleurs sont fragiles, leur beauté et leur fraîcheur dépendent des conditions climatiques… ", ajoute-t-il.
Issu d’une famille pauvre de 9 frères et sœurs de la province de Bà RiaVung Tàu (Sud), Hà Minh Khôi a aidé financièrement ses parents dèsl’âge de 8 ans, avec ses frères et sœurs, en travaillant dans les champsde maïs ou les vergers d’abricotiers…
Cette pauvreté n’a pas empêché sa maman, Nguyên Thi An, 68 ans, d’avoir toujours une passion pour les fleurs. "Parfois ma mère n’avait que 30.000 dôngs pour faire les courses mais consacrait quand même 10.000 dôngs à l’achat de fleurs !", raconte Khôi. Lors de l’anniversaire de ses enfants, Nguyên Thi An leur offrait toujours un vase de fleurs.
Cet amour pour les fleurs a été transmis à son fils Khôi. Enfant, ilallait souvent à l’église, demandant aux sœurs de l’aider à composer desvases de fleurs. Son premier commerce de fleurs, Khôi l’a débuté aucollège, à l’occasion de la Journée internationale des femmes le 8mars. Après le bac, Khôi est parti pour Hô Chi Minh-Ville pour faire sonapprentissage chez un fleuriste. À l’époque, le jeune homme rêvait degagner sa vie ainsi. Son premier travail, ce fut de couper et traiterles fleurs pour préparer la composition florale du patron. Assidu, Khôitravaillait sans relâche et apprenait le métier en lisant, étudiant lestechniques de conservation des fleurs et autres végétaux, de créationdes compositions florales à l’aide de fleurs certes, mais aussi defeuilles, d’herbes ou d’autres matériaux végétaux… Après 2 moisd’apprentissage, il était fin prêt pour ouvrir sa boutique.
Un talent impressionnant
Khôi a d’abord cherché du travail chez un autre fleuriste dont lepatron lui a conseillé de parfaire son apprentissage avec desprofessionnels étrangers. "Ce qui m’a permis de conserver ma passion, c’est le travail et l’étude sans cesse",confie-t-il. Ses compétences s’améliorant sans cesse, Khôi gagne laconfiance des clients de la boutique tenu par un étranger. Son talentimpressionne son patron qui lui conseille de participer à un concourspour devenir membre de l’Institut américain de design floral(AIFD-American Institute of Floral Design). Il s’agit d’une institutioncréé en 1965 et qui est dédiée à la reconnaissance et à la promotion del’art du design floral en tant en carrière professionnelle.
Participant à l’examen de l’AIFD, Khôi s’est qualifié pour la partiethéorie, répondant pendant 40 minutes à 50 questions sur l’art de lacomposition florale. Cependant, le jeune homme n’a pu partir auxÉtats-Unis pour participer à l’examen pratique. Il a échoué à obtenirle visa car son niveau d’anglais n’était pas satisfaisant. Pourl’améliorer, Khôi a suivi un cursus de 6 mois, ce qui lui a permisd’obtenir enfin le fameux visa.
En 2016, Khôi est parti aux États-Unis pour participer à l’examenpratique de l’AIFD. A l’âge de 25 ans, il est devenu le premier membrevietnamien de cet institut.
Son nom est devenu au fil des années de plus en plus connu. Al’occasion de Noël 2016, Khôi a même été invité en France afin de créerune œuvre pour la couverture (numéro printemps) du magazine Nacre,revue tendance d’art floral. Le jeune artiste, qui s’est inspiré duprintemps japonais, a composé une œuvre spéciale avec des renoncules,jacinthes, tulipes et lis glorieux, dégageant une belle harmonie tant entermes de composition que de couleurs.
En 2018, Khôi a remporté le premier prix de la Vietnam InternationalFloral Expo, concours de composition florale qui a vu la participationde 14 candidats originaires de 14 pays et territoires.
Fin 2019, Khôi a ouvert sa boutique à Hanoi, dont le chiffre d’affairemensuel oscille entre 300 millions et plus d’un milliard de dongs.Nguyên Lê Dôn Vinh, un collaborateur, a fait savoir que Khôi travaillepassionnément, précisant que "pour préparer une événement, Khôi atravaillé 3 jours et 3 nuits sans interruption. A cause du stress et dumanque de sommeil, il a saigné du nez et on a dû le perfuser". D’après Dôn Vinh, "Khôiest un perfectionniste et un passionné. Pour composer une œuvre, ce quicompte le plus pour lui, c’est la beauté, ce n’est pas le bénéficequ’il peut en tirer".
Nguyên Chi Thành, 41 ans, organisateur d’événements, dont des mariages,estime que Khôi est un décorateur subtil qui aime passionnément sonmétier. "Khôi se passionne pour son métier, et il va parfois au-delà de ses limites physiques", dit Thành.
Un travail à la fois exigeant et stressant
Pour préparer des événements, le décorateur travaille souvent dans lestress. Khôi se souvient toujours des fois où les fleurs commandées àl’étranger sont arrivées tard au Vietnam, ou leur qualité n’était passatisfaisante. Ces incidents ont coûté cher au décorateur. Pour préparerun grand événement, un mariage par exemple, Khôi examine le lieu,concevoir un plan, commande les fleurs et exécute le cadre descompositions. Tout cela prend entre 4 et 6 mois.
Khôi suit régulièrement des stages en Malaisie, aux Pays-Bas, en France, au Japon et aux États-Unis… "Undes maîtres qui a eu beaucoup d’influence sur ma carrière m’a dit unjour : un compositeur floral doit avoir l’âme pure, sensible et le cœurému devant la beauté. L’artiste doit aussi avoir de la technique, del’expérience et pour cela, il faut étudier sans cesse. Plus j’étudie cemétier, plus je découvre de belles choses".
Ce printemps, Khôi a réalisé une autre œuvre florale qui est apparue pour la seconde fois sur la couverture de la revue Nacre. Une bonne nouvelle lui est arrivée fin 2019 : il a été élu par la revue Forbes Vietnam parmi les "30 figures de moins de 30 ans les plus remarquables du Vietnam en 2020".
Actuellement, Khôi anime aussi des ateliers en art floral en faveur depassionnés qui n’ont pas d’objectif professionnel, et qui souhaitentjuste parfaire leur technique, pour le plaisir. Le jeune maîtres’intéresse aussi à un autre groupe de personnes, celui des femmesenceintes, avec comme souhait de les initier à la décoration floralecomme moyen de se détendre, de goûter à la vie. - CVN/VNA