Il y a un siècle, les costumes des fonctionnaires français et de la haute société vietnamienne étaient fabriqués par les paysans de Tu Thuân. Ce village en banlieue de Hanoi s’est développé grâce à ce savoir-faire.

Au début du XXe siècle, à l’époque coloniale française, les Vietnamiens portaient volontiers des vêtements occidentaux. Plusieurs maisons de couture étaient situées dans les rues Hàng Hom et Hàng Bè, à Hanoi. Mais leurs patrons n’étaient pas originaires de la ville. Les vêtements étaient conçus et fabriqués par les paysans du village de Tu Thuân, du district de Phu Xuyên dans l’ancienne province de Hà Tây (actuellement banlieue de Hanoi).

Dào Du, 76 ans, représentant la troisième génération de couturier de Tu Thuân, se rappelle : «Dans les années 1950, j’ai quitté le village pour Hanoi afin d’apprendre le métier de couturier avec Nguyên Hoà, Nguyên Lai et d’autres jeunes hommes du village».

Formation pour les jeunes


Avant la Révolution d’août 1945, des maisons de couture, notamment Toàn Thuân Anh, Toàn Thuân Em et Thuân Thinh, se sont implantées dans le Vieux quartier de Hanoi. Toutes appartenaient aux villageois de Tu Thuân. Grâce à la demande des fonctionnaires français et des membres de la haute société vietnamienne de l’époque, le métier de couturier a alors connu son âge d’or.

«Mais lorsque j’ai appris ce métier dans la maison Toàn Thuân Em, au 73, rue de Hàng Gai, les complets-vestons ne se vendaient plus beaucoup, partage M. Du. Le pays s’était lancé dans la Résistance contre les Français, peu de monde avait donc besoin de tenues occidentales. Toutefois, nous étions déterminés à apprendre ce métier afin de maintenir le savoir-faire du village».

Fin 1980, M. Hoà, M. Du et M. Lai ont fait appel à leurs enfants pour relancer les maisons de couture dans leur village. D’autres jeunes étaient aussi intéressés par ce métier. Ces paysans ont donc mis en place des cours de formation pour les jeunes dans d’autres villages de la commune de Vân Tu. «Nous sommes paysans. Mais les jeunes villageois aiment apprendre ce métier, commente M. Hoà. Nous formons environ cent élèves par année. Au terme de leur apprentissage, ces jeunes sont capables de fabriquer non seulement des complets-vestons, mais aussi des +ao dài+ (tunique fendue traditionnelle des Vietnamiennes) et des robes pour les femmes».

À Tu Thuân, on ne trouve presque pas de maisons sans étage ou de route en terre. Le village figure parmi les plus développés du district de Phu Xuyên et de la banlieue de Hanoi. Il compte près de 30 ateliers de couture, qui fonctionnent avec des capitaux de dizaines de milliards de dôngs. Par ailleurs, trois des enfants de M. Hoà vendent leurs complets-vestons dans les provinces et villes du Nord, dont Bac Ninh, Bac Giang, Hai Phong, Thai Binh et Hoà Binh. À noter que les couturiers sont tous des hommes. Les femmes ne jouent qu’un rôle d’appui. -CVN/VNA