Les arts martiauxtraditionnels du Vietnam sont plus qu’un sport. En les pratiquant, ons’imprègne en effet de la culture, du caractère et de l’esprit d’unpeuple. De nombreux étrangers ont déjà été conquis, et certains sontdevenus des maîtres de telle ou telle école. Le Festivalinternational de Vo Vietnam s’est tenu pour la première fois en 2007 àBinh Dinh (Centre). Cette province, surnommée le «berceau du VoVietnam», est devenu le rendez-vous bisannuel des adeptes d’artsmartiaux vietnamiens comme étrangers. Au 5e Festivalinternational de Vo Vietnam tenu cette année, nombre d’adeptesétrangers, de France, de Belgique, d’Allemagne, d’Italie, de Suisse…,étaient de la fête. Beaucoup sont déjà maîtres d’une école de VoVietnam. Thuy Phap ou le mouvement de l’eau Les jours du festival, une vraie ferveur régnait dans le stade de BinhDinh. À tour de rôle, les groupes se produisaient sur scène. «Etmaintenant le groupe de Thuy Phap, de Belgique», annonce lecommentateur. Un jeune Européen de grande taille s’approche alors dumicro et dit en vietnamien : «Xin chào. Tôi là Jean-Philippe, truongdoàn Thuy Phap Viêt Nam» (Bonjour. Je m’appelle Jean-Philippe, chef dugroupe Thuy Phap vietnamien). Puis, au milieu des applaudissementschaleureux du public, toujours dans un vietnamien correct, il présenteson école d’arts martiaux, le Thuy Phap. «Thuy Phap signifie lemouvement de l’eau. Comme son nom l’indique, cet art martial est à lafois souple et tranchant», explique-t-il. Sur scène apparaissent quatreBelges en kimono noir barré d’une ceinture verte. Les mouvementss’enchaînent, tantôt souples tantôt explosifs, devant les yeux ébahisdes spectateurs.
«J’ai 25 ans, et suis élève de l’écoleThuy Phap depuis dix ans. Je me suis pris de passion pour cet artmartial dès ma première rencontre avec le maître Huynh Chiêu Duong quienseignait les arts martiaux vietnamiens dans mon lycée, à Bruxelles»,confie Jean-Philippe. En 2002, le maître Viêt kiêu Huynh Chiêu Duongintroduit le Thuy Phap en Belgique. Deux ans après, cet art martialvietnamien était au programme d’études de plusieurs lycées belges. «Les exercices de Thuy Phap sont profitables à tous, hommes et femmes,jeunes ou âgés. Plus je m’exerce, plus je le trouve fantastique. Le ThuyPhap connaît un développement rapide en Belgique comme en France»,explique Jean-Philippe. Ce Belge est tellement amoureux du Vo Vietnamqu’il décide, à la suite du festival 2012, de rester au Vietnam pours’entraîner. L’occasion pour lui d’approfondir sa pratique duvietnamien, d’en apprendre un peu plus sur la culture locale etaccessoirement de trouver une «petite amie» vietnamienne. L’esprit d’un peuple martial Le groupe italien, quant à lui, était dirigé par le maître BiondoRuggero. L’école représentée était Binh Dinh Sa Long Cuong, créée par leroi Quang Trung au XVIIIe siècle. Pratiquée depuis 1975 en Italie, enFrance et aussi au Canada, cette école du Vo Vietnam rassemble plus de3.000 adeptes. Pratiquant assidu depuis une vingtained’années, Biondo Ruggero se souvient de son premier maître, Luu VanTrong, un Viêt kiêu. «Il m’a donné une passion infinie pour le Binh DinhSa Long Cuong. C’est une école d'un caractère agressif, caractériséepar des mouvements rapides, brefs, simples, explosifs». Les disciples du Son Long Quyên Thuât de France et d’Italie ont forcél’admiration du public par une représentation impressionnante, enprésence du maître Olivier Barbey et de son épouse. «Créé en 1945 àParis par le feu maître Viêt kiêu Nguyên Duc Môc, l’école Son Long QuyênThuât compte aujourd’hui quelque 10.000 disciples dans plusieurs pays,dont la France, la Suisse, l’Autriche, le Burkina Faso, l’Algérie»,explique Olivier Barbey, un Suisse qui est le doyen de l’école Son LongQuyên Thuât.
Épanouissement du sport à l’étranger «Les arts martiaux me captivent depuis l’enfance. J’ai appris diversstyles. Plus grand, lors d’un festival international d’arts martiauxorganisé en Suisse, j’ai rencontré le maître Môc qui m’a fait découvrirle Vo Vietnam. J’ai alors commencé à apprendre le Son Long Quyên Thuâtauprès de lui», raconte-t-il. Et d’insister : «Môc était un maîtretalentueux et authentique. Son principe : les adeptes de l’école SonLong Quyên Thuât devaient apprendre la vertu avant d’apprendre les artsmartiaux». À 21 ans, après avoir obtenu le plus hautgrade de l’école Son Long Quyên Thuât, Olivier Barbey est nommé «grandmaître» en Suisse. Après la mort de Nguyên Duc Môc en 2009, OlivierBarbey lui a succédé en tant que doyen de l’école Son Long Quyên Thuât. L’école Trang Si Dao était aussi représentée aufestival. Créée en 1980 en Belgique par le maître Viêt kiêu Dông VanHung, elle rassemble elle aussi nombre de pratiquants belges, français,algériens, allemands... Parmi eux, Helène Van Der Elst : «C’est ladeuxième fois que je participe à ce festival. Tout est merveilleux. Enpratiquant le Trang Si Dao, je me trouve plus énergique, plus confianteen moi-même». Son mari et ses deux enfants sont devenus eux aussi depratiquants de ce style. Plus qu’un sport, le Vo Vietnamne cesse de prendre de l’ampleur à l’étranger. «Le Vietnam a unecivilisation millénaire. À travers ses arts martiaux, on peut découvrirla culture et l’esprit d’un peuple martial». Une pléthore d'écoles et de styles Les Vo Vietnam regroupent des arts martiaux créés ou pratiqués auVietnam. Ils sont constitués d’une multitude de techniques de combat, depratiques et de styles, développés au Vietnam au fil des siècles. Lesarts martiaux traditionnels vietnamiens sont nés dans les campagnes etles villages. Des fouilles archéologiques (Dông Son) témoignent del’existence, dès la préhistoire et la haute antiquité, de techniquesguerrières utilisées par nos ancêtres. Cet art du combat servait auxpaysans de moyen de défense et de survie, à un niveau local, d’abord, etensuite, pour lutter contre les multiples tentatives d’invasion etd’occupation du pays. Le Vo Vietnam, comme tous les artsmartiaux, inclut différentes techniques de combat : combat à mainsnues, coups de poings et de pieds, et maniement de nombreuses armestraditionnelles. Il demeure encore très difficile de recenser les écolesde Vo Vietnam, ou de les structurer de manière satisfaisante. On peutnéanmoins en citer quelques-unes : Viêt Vo Dao, Tinh Vo Dao, Thiêu LâmHông Gia Truyên, Nhât Nam, Trang Si Dao, Son Long Quyên Thuât, Binh DinhSa Long Cuong, Thuy Phap… C’est la preuve de la richesse du Vo Vietnam,capable des créations les plus diverses à partir d’une basetraditionnelle. -CVN/VNA