Hanoï (VNA) - Face au risque de barrières commerciales et de tarifs réciproques imposés par les États-Unis, de nombreuses entreprises vietnamiennes ont ajusté de manière proactive leur orientation stratégique, intensifié leur promotion commerciale et diversifié leurs sources de revenus.
Dans un contexte de concurrence intense, les entreprises domestiques cherchent à se tourner vers de nouveaux débouchés d’exportation. Parmi les marchés prioritaires figurent l’Union européenne (UE), le Japon, la République de Corée, ainsi que les pays ayant signé un accord de libre-échange avec le Vietnam. Pour réduire leur dépendance à un seul marché, les sociétés misent également sur la technologie, la transformation numérique, l’automatisation des lignes de production, l’amélioration de la qualité et le respect des délais de livraison.
Nouvelles orientations prometteuses
Selon Lê Hang, secrétaire générale adjointe de l’Association vietnamienne des exportateurs et producteurs de produits aquatiques (VASEP), les exportations de ces produits connaîtront un changement significatif en mai et juin en réponse aux mesures tarifaires réciproques imposées par les États-Unis. Les entreprises vietnamiennes se concentrent sur l’augmentation de leurs exportations vers ce pays, notamment de crevettes et de pangasius, afin de profiter de la période précédant l’imposition de droits de douane.
Mme Hang prévoit que les exportations totales vers les États-Unis en mai et juin augmenteraient de 10 à 15% par rapport à avril, grâce à des commandes rapides et à des stratégies de réduction des prix destinées à maintenir leurs parts de marché.
Parallèlement, les exportations vers la Chine et les pays membres de l’Association des pays de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) ont montré des signes de ralentissement, n’augmentant que de 3 à 5%. Les ventes en UE et au Japon devraient, quant à elles, maintenir une croissance stable de 8 à 10%.
D’après Li Deyi, Pdg d’Anqiang Wood Industry, le marché américain ne représente qu’environ 12% du chiffre d’affaires de son entreprise. Si les droits de douane augmentent considérablement à l’avenir, les sociétés envisageront de se tourner vers d’autres marchés tels que le Canada, le Japon, les Émirats arabes unis ou l’Asie du Sud-Est.
Bach Khanh Nhut, vice-président de l’Association vietnamienne de la noix de cajou (VINACAS), remarque que l’industrie explore activement le marché du Moyen-Orient, qui compte environ 300 millions de consommateurs et représente une opportunité considérable pour développer de nouveaux débouchés.
Grâce à l’Accord de libre-échange entre le Vietnam et le Royaume-Uni (UKVFTA), les exportations vers ce pays continuent de croître fortement, notamment dans pour les équipements, le textile-habillement et la chaussure.
Par ailleurs, les pays membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), l’Inde, le Moyen-Orient et l’Afrique émergent comme de nouvelles orientations prometteuses pour les sociétés vietnamiennes. Récemment, de nombreuses entreprises des secteurs de l’aquaculture, du textile, du bois et de l’agroalimentaire ont activement exploré de nouveaux débouchés tels que le Brésil, l’Amérique latine et le Moyen-Orient.
Pour Truong Van Cam, vice-président de l’Association vietnamienne du textile et de l’habillement, “les exportations se concentrent encore sur les grands marchés. Toutefois, l’élargissement effectif vers de nouveaux débouchés comme l’UE, le Canada, le Mexique ou le Moyen-Orient est une exigence cruciale pour renforcer la résilience du secteur”.
Lâm Quôc Thanh, directeur général de Satra, indique que le Japon et la République de Corée deviennent des destinations importantes pour les produits vietnamiens, offrant des marchés plus stables et moins affectés par les politiques protectionnistes. ”Nous continuons à rechercher de nouveaux clients et à renforcer notre présence sur des marchés comme l’Afrique et le Moyen-Orient, notamment dans les pays disposant d’accords de libre-échange, afin de bénéficier des avantages tarifaires”.

Face à la pression tarifaire croissante des États-Unis, les entreprises vietnamiennes se tournent vers l’Allemagne, première économie européenne, réputée pour son fort pouvoir d’achat, son réseau de distribution moderne et son environnement commercial transparent et stable.
Le marché allemand en ligne de mire
L’Allemagne est actuellement le deuxième partenaire commercial du Vietnam au sein de l’UE, après les Pays-Bas. La croissance des exportations vietnamiennes vers ce marché est principalement tirée par les produits agricoles et aquatiques, ainsi que l’électronique. Dans un contexte d’incertitude du commerce mondial, l’expansion du débouché allemand est perçue comme un moyen pour les sociétés vietnamiennes de renforcer leur résilience.
Selon l’ambassadeur du Vietnam en Allemagne, Vu Quang Minh, les deux pays, en tant que partenaires stratégiques de confiance, devraient consolider leur coopération, notamment dans les domaines commercial et économique. Il souligne que l’agriculture, la pêche et l’environnement sont des secteurs clés à fort potentiel. Compte tenu de la complémentarité des deux économies, le diplomate appelle à une coordination politique plus étroite afin de stimuler les échanges commerciaux bilatéraux et de favoriser une meilleure présence des produits de chaque pays sur le marché de l’autre. ”L’Allemagne, avec sa large base de consommateurs à fort pouvoir d’achat, est clairement positionnée pour devenir le premier marché d’exportation stratégique alternatif du Vietnam”, suggère-t-il, ajoutant que l’Accord de libre-échange UE - Vietnam (EVFTA) offre également aux deux parties des avantages tarifaires considérables.
Le Dr. Per Brodersen, directeur de l’Alliance agroalimentaire allemande, déclare que le Vietnam entre dans une nouvelle phase dotée d’un fort potentiel de croissance en matière de production et de valeur des exportations. Il identifie de nombreuses opportunités de coopération dans les exportations de produits agricoles et aquatiques, en soulignant l’importance de partager des informations sur les préférences des consommateurs, les exigences d’importation et les stratégies d’accès aux marchés.
De nouvelles normes techniques
Pour stimuler les échanges commerciaux bilatéraux, le vice-ministre de l’Agriculture et de l’Environnement, Trân Thanh Nam, propose que les associations industrielles allemandes organisent régulièrement des événements de réseautage avec les entreprises vietnamiennes. En retour, les exportateurs vietnamiens devront accroître leur participation aux foires commerciales et expositions, faire des études de marché pour mieux comprendre la demande allemande.
Il suggère également que les associations des artisans des deux pays établissent des liens au sein de la chaîne d’approvisionnement afin de réduire les coûts logistiques et de garantir la qualité des produits, de la production jusqu’au point de vente. Des coentreprises plus solides aideront les produits vietnamiens à se conformer aux normes d’importation et à intégrer les circuits de distribution allemands, notamment les supermarchés.
La conseillère commerciale du Vietnam en Allemagne, Dang Thi Thanh Phuong, rappelle que les produits exportés doivent répondre aux nouvelles normes techniques de l’UE, notamment bois, vêtements, textiles et chaussures. Ces normes incluent la sécurité alimentaire, les restrictions chimiques, le marquage CE et la responsabilité sociale des entreprises. Elle souligne également que les règles d’origine dans le cadre de l’EVFTA demeurent un défi. En cas de doute, les douanes allemandes peuvent exiger des importateurs qu’ils déposent une garantie de droits, laquelle est remboursée après vérification des documents d’origine. - CVN/VNA