L’éléphant est un symbole du Tây Nguyên (Hauts Plateaux du Centre). Mais le braconnage et la déforestation font que dans la province de Dak Lak, surnommée au Vietnam le «Pays des éléphants», l’espèce est condamnée à disparaître si rien n’est fait. Et le temps presse...

Les scientifiques sont unanimes : les éléphants sauvages sont proches de l’extinction au Vietnam. Selon le Centre de préservation des éléphants de la province de Dak Lak, ces dernières années, la superficie de forêts naturelles a considérablement diminué, entraînant avec elle une diminution rapide du nombre d’éléphants sauvages et, par voie de conséquence, d’éléphants domestiqués.

Aujourd’hui, Dak Lak ne compte plus que cinq troupeaux d’éléphants sauvages pour un total de 60 à 70 individus contre 550 en 1980. Et depuis 2009, 17 spécimens ont été tués. En cause notamment : la diminution des zones de pâturage, le manque de nourriture et le manque d’eau pendant la saison sèche, mais aussi - et surtout - le trafic de défenses, d’os et de poils de la queue. Ce commerce illégal mais juteux encourage le braconnage. En effet, les poils de queue ont comme fonction d’effrayer les mouches, moustiques et autres insectes. Sans ces poils, les éléphants peuvent être facilement victimes de ces parasites. La coupe de la queue des éléphants pour fabriquer des produits d’artisanat met directement en danger leur survie.

La situation n’est guerre plus reluisante du côté des éléphants domestiques. Dak Lak en recense actuellement 49 contre 150 en 1980, soit une baisse de 90% en 32 ans. Depuis 2007, pas moins de 21 spécimens ont trouvé la mort, principalement en raison du manque de nourriture, de techniques d’élevage inadaptées et des abus pour le tourisme.

Selon le Centre de protection des éléphants de la province de Dak Lak, sur les 49 éléphants domestiques, 43 sont en âge de se reproduire (19 mâles et 24 femelles). Problème : la fécondité n’atteint que 0,6% depuis 30 ans. Pire, elle est nulle ces dernières années. En cause : les propriétaires, qui préfèrent (sur)exploiter ces pachydermes à des fins touristiques plutôt que de penser à leur bien-être. Ainsi, souvent, les bêtes souffrent de maladies et/ou de malnutrition, avec des conséquences sur leur espérance de vie. Si le taux de mortalité actuel reste aussi élevé sans qu’il y ait de nouvelles naissances, les éléphants de Dak Lak sont condamnés à disparaître d’ici dix ans.

Huynh Trung Luân, directeur du Centre de préservation des éléphants de Dak Lak, sait parfaitement que la préservation et le développement des effectifs d’éléphants domestiques se basent sur la reproduction. «Si des politiques existent, dans les faits, il est très difficile de les faire appliquer, dit-il. Il n’existe par exemple encore aucune aire pour faire se rencontrer les éléphants. Ce qui serait pourtant essentiel».

Des solutions palliatives ?

La protection efficace des populations d’éléphants sauvages passe inexorablement par le maintien de leur habitat. Pourtant, ces dernières années, des milliers d’hectares de forêts ont été rasés en raison de l’exploitation illégale.

Entre 2005 et 2012, la superficie forestière de trois districts où vivent les éléphants sauvages a diminué de 14.000 ha. Les pachydermes, faute de ressources suffisantes, ont ainsi cherché pitance ailleurs, dévastant les cultures et mettant en danger la vie des personnes.

Autre responsable de la diminution des effectifs : le braconnage, qui se pratique encore en toute impunité ou presque, les sanctions n’étant pas assez dissuasives et les gardes-forestiers en nombre insuffisant pour lutter efficacement.

Les éléphants de Dak Lak sont de l’espèce asiatique Elephas maximus. Symbole tant socio-économique, culturel que spirituel de la communauté des ethnies des hauts plateaux du Centre, leur préservation est essentielle. Deux raisons à cela : sauver un gène précieux, et conserver un des traits culturels des habitants du Tây Nguyên permettant de maintenir un développement stable du secteur touristique de Dak Lak.

Dans cette optique, la province a approuvé en 2013 le projet sur la préservation des éléphants d’ici 2020. Crédité de 85 milliards de dôngs, son objectif est d’instaurer une gestion durable des éléphants sauvages et domestiques, d’empêcher et de prévenir les conflits entre les pachydermes et l’homme, et de mieux contrôler le braconnage. Reste à savoir si cela suffira. – VNA