Hoa Binh (VNA) - Le 29e jour du 12e mois lunaire, les Muong célèbrent le réveillon au pâturage. Ils portent un flambeau et frappent des gongs pour appeler les buffles à rentrer à l’étable. Selon leurs croyances, il s’agit de remercier ces animaux après un an de bons et loyaux services.
Alors que dans le Nord les pêchers fleurissent de partout, les arbres sur le bord des routes bourgeonnent à foison. En venant visiter la commune de Binh Thanh, district de Cao Phong, dans la province de Hoà Binh (Nord), les touristes auront la chance de découvrir les us et coutumes de cette ethnie Muong.
Lancement des balles d’étoffes
Dans une maison sur pilotis des Muong, les visiteurs sont fascinés par les objets remarquables et distinctifs de l’identité culturelle de cette ethnie. Notamment par les gongs que l’hôte a suspendus à l’endroit le plus solennel de la maison.
Les balles d’étoffe attirent aussi les visiteurs. Ces balles rondes et grosses comme le poing d’un enfant sont faites de morceaux d’étoffe de différentes couleurs. On bourre l’intérieur de riz ou de graines de coton (le riz nourrit l’homme et le coton l’habille). Tout autour, des franges multicolores servent à les stabiliser. À l’occasion du Têt, lancer des balles d’étoffes colorées est un jeu très populaire des Muong de Hoà Binh. Le terrain de jeu est grand et comporte en son milieu une longue perche de bambou. À son sommet est fixé un cerceau sur lequel est collé un papier, rouge d’un côté qui symbolise le soleil, et de l’autre, jaune, la lune. Ces deux faces représentent l’hymen, la virginité de la jeune fille. Les joueurs se tiennent debout de part et d’autre du bambou. Les gagnants sont ceux qui parviennent à faire passer la balle à travers le cerceau. Ce petit objet est ainsi considéré comme “la balle de l’amour”.
On peut voire également le khèn (sorte de flûte de Pan), ou encore la nageoire caudale d’un poisson…, des butins de la chasse. Tous ont des significations très importantes dans l’esprit des Muong.
Chez les Muong, quelques jours avant les festivités, les femmes préparent le mokugyo (cloche bouddhique en bois), un flambeau et les gongs. C’est une coutume existant depuis les temps anciens et les habitants locaux préservent absolument ces caractéristiques culturelles uniques à l’heure actuelle.
Appel des buffles
"Autrefois, les enfants aimaient pratiquer ce rituel symbolique", raconte Nguyên Van Thuong, l’un des anciens du village.Après le réveillon, ces jeunes portaient les flambeaux, frappaient sur les gongs et les mokugyo pour appeler les buffles à rentrer à l’étable. Après plusieurs tours du village, les enfants s’arrêtaient et faisaient semblant de compter 1, 2, 3, 4…, puis criaient "Mon cheptel suffit !".
Ensuite, les membres de la famille vont chercher de l’eau pure au ruisseau pour la déposer sur l’autel des ancêtres avant de la reverser dans un grand vase pour l’usage quotidien. Les Muong croient que l’utilisation de cette eau amènera la chance et le bonheur pour toute l’année.
Outre l’appel des buffles, les Muong accrochent également des gâteaux de riz gluant en forme de tube sur les outils de travail tels que charrues, herses et palanches. Ceux-ci sont considérés comme des amis des agriculteurs et, à ce titre, ils sont ainsi invités à célébrer le Têt avec la famille. Les gens croient qu’un buffle ou une charrue doivent également se reposer après une année de labeur. Ces outils de travail sont très importants pour les Muong qui ont à cœur d’exprimer le respect et la reconnaissance de l’hôte.
De plus, d’après les croyances populaires, à l’occasion du Têt traditionnel, la famille qui suspendra la nageoire caudale de poisson la plus grande obtiendra de bonnes récoltes et la prospérité durant toute l’année.
Le Têt traditionnel de l’ethnie Muong est la fête la plus importante de l’année. Les festivités débutent le 29e jour du 12e mois lunaire, soit un jour plus tôt que les Kinh (ethnie majoritaire au Vietnam).
Nettoyage des objets
Durant le Têt, les femmes Muong ne sont pas trop pointilleuses sur la préparation des mets, car le culte des ancêtres est le plus important. ‘‘Nous faisons particulièrement attention à la préparation des offrandes, au nettoyage et à la décoration de l’autel. Nous croyons qu’en vénérant les morts, nous bénéficierons de la protection des ancêtres’’, partage Nguyên Van Thuong.
Selon lui, pendant les 23e et 24e jours du dernier mois lunaire, tous les membres de la famille, notamment les hommes - fils, gendres ou neveux -, doivent se réunir pour réparer et entretenir les tombes des ancêtres, avant de les inviter à la maison pour célébrer le Têt.
Le 27e jour, les femmes vont à la rivière et nettoient les objets de la famille, en particulier tous les outils de travail, pour accueillir le Têt dans les meilleures conditions possibles.
Les us et coutumes des Muong de Hoà Binh, originaux et encore vivaces, font indiscutablement partie du patrimoine immatériel du Vietnam. -CVN/VNA