En 1936, lecontexte politique en France connaissait des changements favorables auxpeuples d'Indochine. Au même moment au Vietnam, le Parti communisted'Indochine lançait le mouvement du Front démocratique.
Dans les années 1936-1939, le travail principal de Vo Nguyen Giap fut dedonner des cours à l'école privée Thang Long (Hanoi). En même temps, ilfaisait ses études de droit et consacrait son temps à la presse.
La plume du Vietnam libre
Tous les jours, en passant rue Trang Tien, il s'arrêtait pour lire lesinformations sur un panneau de l'Agence de radio, d'information et depropagande. Un après-midi de juin 1936, le jeune enseignant apprit lavictoire du Front populaire en France. Il se dit que la situationpolitique dans le monde évoluerait en faveur de la lutte du peuplevietnamien. Et il pensa à créer un journal pour "saisir l'opportunité".
La création et la parution d'un journal en vietnamiennécessitaient des formalités très compliquées, édictées parl'administration coloniale, et il fallait attendre longtemps.
Heureusement, le journal Hon Tre (Âme de jeunesse) du mouvement scout, àcause de pertes financières, devait suspendre la publication et leresponsable du journal était prêt à en concéder le droit d'auteur. VoNguyen Giap décida avec son camarade Dang Thai Mai (1902-1984) etd'autres enseignants de l'école Thang Long de se cotiser en vue de fairerevivre le journal Hon Tre, mais avec un contenu différent. Le 6 juin1936, parut le nouveau journal Hon Tre, premier journal en vietnamienmilitant officiellement pour la démocratie, l'amnistie des détenuspolitiques, le soutien au Front populaire français et le rassemblementdes souhaits des différentes couches sociales vietnamiennes en vue deles rapporter à la délégation d'investigation du gouvernement du Frontpopulaire français, conduite par le délégué Justin Godart, qui allaitarriver en Indochine.
Le journal de Vo Nguyen Giap et sescollaborateurs fut bien accueilli et apprécié. Des élèves de l'écoleThang Long en assurèrent la vente. Malheureusement, ce journalrévolutionnaire fut interdit par l'administration coloniale à l'issue deson 5e numéro. Toutefois, ce journal annonçait le mouvement de lapresse du Front démocratique d'Indochine durant la période 1936-1939.
Journaliste révolutionnaire, passionné et dévoué
Il était difficile de publier un journal en vietnamien dans cecontexte. Vo Nguyen Giap et ses collaborateurs décidèrent alors depublier un journal en français. Le 16 septembre 1936, premier numéro dujournal "Le Travail", avec comme rédacteur principal Vo Nguyen Giap, quiaborda beaucoup de thèmes : soutien au congrès d'Indochine, au Frontdémocratique, vie paysanne et lutte foncière, grèves d'ouvriers, demineurs...
A cette époque, Vo Nguyen Giap travaillaitavec enthousiasme malgré une santé chancelante. En apprenant une grandegrève de mineurs, il pédala 200 km de Hanoi à Cam Pha (province de QuangNinh, Nord-Est) pour y faire un reportage. La grève eut lieu le 13novembre 1936 à Cam Pha avec 10.000 participants. Une semaine après, lamanifestation s'élargit à toute la région minière avec la participationde 50.000 grévistes.
L'administration coloniale mobilisades légionnaires pour intimider les grévistes. Les articles dujournaliste Vo Nguyen Giap parurent dans de nombreux numéros du journal"Le Travail" . Ils attirèrent l'attention de l'opinion publiquenationale et en France aussi, portant le soutien à la lutte des mineurs.
"Le Travail" exista pendant sept mois, avec 30 numéros.Le 16 avril 1937, l'administration coloniale en interdit la publication.
Des efforts continus
A cette époque, VoNguyen Giap était membre du Comité de mouvement révolutionnairesemi-officiel, créé par le Parti communiste d'Indochine. Ce comités'intéressait particulièrement aux activités de la presserévolutionnaire. Une série de journaux en français et en vietnamienparaissait officiellement. Si l'un était interdit, l'autre prenait larelève pour se rendre maître de l'opinion publique. Les journaux enfrançais étaient Rassemblement, En avant, Notre voix ; les publicationsen vietnamien : The gioi (Monde), Doi nay (De nos jours), Tin tuc(Informations), Ngay moi (Nouvelle journée), Thanh nien dan chu(Jeunesse démocratique)... Vo Nguyen Giap écrivait principalement pourles journaux en français, mais également pour les papiers envietnamien.
En 1937, Vo Nguyen Giap participa aumouvement de lutte pour la liberté d'expression. Il se vit confier parle Comité de mouvement révolutionnaire semi-officiel la tâched'organiser la conférence des journalistes du Nord et de fonderl'Association amicale des journalistes du Nord. La première conférencedes journalistes du Nord se tint le 24 avril 1937 à Hanoi. Lesconférenciers élurent Vo Nguyen Giap président du Comité de presse.
Dans le travail de journalisme, Giap participa à presque toutes lesétapes du métier, de l'écriture des éditos, articles de commentaires,enquête, reportage au travail de rédacteur, en passant par les travauxde secrétaire de rédaction, de maquettiste, de correcteur et même depersonne chargée de la diffusiion.
En 1991, l'Associationdes journalistes vietnamiens remit un insigne aux journalistes ayant aumoins 25 ans de métier. Vo Nguyen Giap reçut cet insigne avec fierté.
Durant ses longues années d'activités révolutionnaires, il s'attacheaux travaux de la presse. Il partage ses expériences journalistiquesdans son article "Quinze ans d'écriture journalistique avant laRévolution d'Août", paru en août 1991 dans la revue "Nha Bao và CôngLuân" (Journaliste et Opinion). Pour lui, ce métier est un "art trèsintéressant" et "la réalisation d'un numéro de journal est commel'organisation d'un combat coordonné". -VNA