Hanoï (VNA) - Lorsqu’Airbus a émis une alerte technique urgente à 23 h le 28 novembre, Vietjet s’est retrouvée confrontée à l’un des défis opérationnels les plus critiques de son histoire.
Cette alerte a été immédiatement suivie d’une consigne de navigabilité d’urgence (EAD) obligatoire émise par l’Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne (AESA). Celle-ci imposait la mise à jour ou le remplacement du logiciel de commandes de vol ELAC sur l’ensemble des Airbus A319, A320 et A321 dans le monde avant 6 h 59 le 30 novembre..
La consigne visait à prévenir un risque rare mais potentiellement grave : dans certaines conditions, le logiciel pouvait être perturbé par des interférences dues au rayonnement solaire, susceptibles d’entraîner des manœuvres de piqué involontaires. Près de 6 000 appareils à l’échelle mondiale ont été concernés. Au Vietnam, 81 avions ont nécessité une intervention urgente, dont 69 exploités par Vietjet.
Selon un article de Tuoi Tre News, ce délai de seulement 32 heures a constitué une course contre la montre technique sans précédent pour le secteur aéronautique vietnamien..
Activation immédiate des opérations d'urgence
Quelques heures après réception de l’alerte d’Airbus, Vietjet a activé son Comité de réponse aux urgences, mobilisant simultanément ses équipes d’ingénierie, d’exploitation des vols, de planification et de technologies sur l’ensemble de son réseau, précise l’article.
Grâce à son système de gestion de la maintenance AMOS, reposant sur le big data et l’intelligence artificielle (IA), la compagnie a pu procéder à une évaluation en temps réel de sa flotte, identifiant les configurations, les localisations et les contraintes opérationnelles de chaque appareil. En parallèle, des plans d’urgence ont été élaborés afin de préserver la stabilité du réseau, notamment par le redéploiement des avions et l’optimisation des horaires pour limiter les perturbations pour les passagers.
La logistique a encore complexifié l’opération. Airbus estimait qu’une mise à jour logicielle nécessitait habituellement deux à trois heures par appareil, alors que les équipements spécialisés étaient en nombre limité et que les avions opéraient dans plusieurs pays.
Un tournant décisif a été atteint à Da Nang, où Nguyen Van Trung, ingénieur chez Vietjet fort de plus de 15 ans d’expérience pratique, est parvenu à réaliser une mise à jour complète du logiciel ELAC en seulement 45 minutes, sans omettre aucune étape de sécurité obligatoire.
Les mises à jour logicielles des aéronefs sont des procédures complexes et à plusieurs niveaux. Chaque appareil possède une configuration unique qui doit être vérifiée, standardisée, testée et recoupée. Un ingénieur effectue la mise à jour tandis qu’un autre surveille indépendamment les paramètres et la documentation.
Les mises à jour logicielles aéronautiques sont des procédures complexes et multiniveaux. Chaque avion possède une configuration spécifique qui doit être vérifiée, standardisée, testée et recoupée. Un ingénieur effectue la mise à jour tandis qu’un second en contrôle indépendamment les paramètres et la documentation.
« Rien ne peut être négligé », explique Trung. « Mais l’expérience permet de savoir précisément où gagner du temps et où cela est absolument impossible. »
Le premier appareil mis à jour, le VN-A644, a marqué une avancée déterminante. La procédure optimisée de 45 minutes a aussitôt été standardisée et diffusée auprès des équipes d’ingénierie de Noi Bai, Tan Son Nhat, Da Nang et des bases internationales, accélérant ainsi le déploiement sur l’ensemble de la flotte.
Technologie, travail d'équipe et vitesse
Parallèlement aux mises à jour logicielles, Vietjet a préparé des solutions matérielles de secours en prépositionnant des unités ELAC provenant d’avions immobilisés, prêtes à être remplacées immédiatement en cas de besoin. La compagnie a également bénéficié du soutien de Vietjet Thailand et d’autres transporteurs, dont Vietnam Airlines et Bamboo Airways, qui ont fourni du matériel supplémentaire afin d’élargir les capacités d’intervention.
La numérisation de la documentation technique sur iPad, l’utilisation de bibliothèques logicielles standardisées et la visibilité en temps réel de la flotte ont permis de réduire considérablement les délais administratifs tout en garantissant une conformité totale aux exigences de sécurité d’Airbus et de l’AESA.
Les mises à jour ont été programmées entre les vols sur les principales bases techniques de la compagnie, assurant la continuité des opérations tout en respectant les délais réglementaires.
Opération achevée avant l’échéance
Le 30 novembre à 3 h 00, les 69 avions de Vietjet concernés avaient tous effectué avec succès les mises à jour logicielles requises, soit près de quatre heures avant l’échéance fixée par l’AESA. Aucun appareil n’a été immobilisé en raison de cet incident et la stabilité du réseau a été maintenue tout au long de l’opération.
Pour l’équipe dirigeante, les ingénieurs et le personnel d’exploitation de Vietjet, ces dernières heures de novembre ont représenté bien plus qu’une simple mission technique.
Comme l’a souligné To Viet Thang, vice-président permanent de Vietjet, ces 32 heures d’effort constituent un moment charnière : elles ont permis de transformer une procédure standard de trois heures en une intervention de 45 minutes, sous une pression extrême, tout en maintenant des normes de sécurité irréprochables.
Un test de résilience opérationnelle
Selon Uong Viet Dung, directeur général de l’Autorité de l’aviation civile du Vietnam (CAAV), Vietjet et les autres compagnies aériennes vietnamiennes ont agi de manière proactive dès l’émission de l’alerte par Airbus.
Malgré le nombre exceptionnellement élevé d’appareils concernés, Vietjet s’était préparée minutieusement en matière de capacités techniques, de ressources humaines, d’équipements et de systèmes numériques, ce qui lui a permis de satisfaire aux exigences de navigabilité d’urgence dans les délais impartis. -VNA