Quand on évoque les exploits de l’artillerie vietnamienne à Diên Biên Phu, on ne peut ignorer les efforts et les sacrifices des artilleurs. C'est à dos d'homme, pour les pièces démontables, que les canons qui écraseront la garnison française gagnent les hauteurs surplombant la cuvette, au prix de mille périls. Témoignage d’un artilleur de Diên Biên Phu sur la Voix du Vietnam.

Il y a 60 ans, le jeune soldat Pham Duc Cu et ses compagnons d’armes âgés d’à peine 20 ans, ont rejoint le régiment d’artillerie qui participait directement à la bataille de Diên Biên Phu en 1954. La vaillance des artilleurs a contribué pour une part importante à la victoire de Diên Biên Phu ébranlant le monde entier. Aujourd’hui en temps de paix, le vétéran Pham Duc Cu se souvient exactement de ses jours de combats pénibles mais glorieux.

Octogénaire, le vétéran de guerre Pham Duc Cu est souvent invité aux rencontres avec les écoles et les organisations de masse de la province de Diên Biên en tant qu’orateur principal. Il leur raconte ses souvenirs et ceux du régiment d’artillerie 367 lors de la bataille de Diên Biên Phu.

Pham Duc Cu prend souvent son ancien uniforme décoré de plusieurs médailles et ordres remis par le Parti communiste et l’Etat vietnamiens pour ses contributions à la bataille de Diên Biên Phu ainsi qu’à l’édification nationale.

En 1952, Pham Duc Cu, un soldat de l’armée régulière du Vietnam, a été envoyé en Chine pour une formation sur l’artillerie. Un an plus tard, il a regagné le pays et rejoint immédiatement la bataille de Diên Biên Phu.

Dès le début de cette opération, les artilleurs avaient été strictement sélectionnés: ils avaient participé aux combats, éprouvé leur vaillance, leur dynamisme, leur fidélité à la révolution et développé une bonne santé.

Entre décembre 1953 et janvier 1954, les artilleurs du régiment 367 ont acheminé 12 canons, pesant chacun 2,4 tonnes aux champs de bataille de Diên Biên Phu.

Pham Duc Cu se souvient: « Les artilleurs participant à la bataille de Diên Biên Phu au printemps de 1954 n’oublient jamais leur parcours de traction des canons. Nous avons dû mobiliser 80 à 100 personnes pour tirer un canon de 2,4 tonnes entre Nà Nhan et la cuvette de Diên Biên Phu. Nous avons traîné le canon la nuit dans la forêt. Nous avons utilisé des pierres et des troncs d’arbre pour faciliter le transport des canons sur les routes boueuses. Puis la nuit, il faisait noir et il était interdit d’allumer la lumière, nous avons dû envoyer 2 personnes en avant en chemises blanches pour marquer la voie. Nous avançions 1 km par nuit. C’était vraiment pénible.»

A l’approche du Nouvel an lunaire du Cheval 1954, le régiment 367 a acheminé ses canons à 400m de la colline de l’Indépendance, pris le contrôle du champ dans l’ignorance de l’armée française installée au sommet de cette colline. Cette merveille a été réalisée grâce au prix des sacrifices et de l’indomptabilité des soldats vietnamiens.

Pham Duc Cu fait savoir: « Pendant les 56 jours de la bataille de Diên Biên Phu, nous étions toujours aux champs de bataille. Moi, j’ai été enseveli par les bombes et repêché par mes compagnons d’armes et j’ai été blessé à maintes reprises. Nos vêtements étaient tâchés de sang et de boue car nous étions toujours mobiles aux champs de bataille sous la pluie et le soleil et sous les bombes. Nos nourritures étaient aussi touchées par les bombes et couvertes de terre.»

Lors de cette bataille, les artilleurs avaient la tâche d’appuyer les fantassins et d’anéantir les forces de l’armée coloniale. Les soldats du régiment 367 ont aussi tenu leur promesse faite au général Vo Nguyên Giap d’abattre un avion par compagnie.

Pham Duc Cu raconte: «Les 7 artilleurs d’un canon devaient être unis comme un seul homme. Chacun devait remplir ses propres tâches pour capter l’objectif, bien viser l’objectif en évaluant bien la vitesse, la distance, la hauteur et l’orientation. Puis, il fallait exécuter exactement l’ordre pour anéantir l’objectif.»

Le régiment 367 de Pham Duc Cu a abattu 52 avions de l’armée française et endommagé un grand nombre d’autres.

Les anciens artilleurs de la bataille de Diên Biên Phu disparaissent au fil du temps. Il en reste une centaine dont Pham Duc Cu. «J’ai composé des poèmes et écrit des articles pour la presse pour chasser les peines d’un soldat. Je me sens plus chanceux que mes compagnons d’armes en rentrant vivant de la guerre pour rappeler aujourd’hui aux jeunes les pages d’histoire glorieuses du peuple. Je ne suis pas sûr d’être encore de ce monde pour le 70ème anniversaire de la victoire de Diên Biên Phu dans 10 ans. Aujourd’hui c’est peut-être ma dernière chance d’expliquer aux jeunes cette victoire du peuple.»

Et Pham Duc Cu saisit pleinement cette chance. Pour lui, les anniversaires de la victoire de Diên Biên Phu sont autant d’occasions de revivre la page la plus glorieuse de sa vie. – VNA