Unis sous la même passion de la céramique antique
Créée fin 2009, l'Association des antiquités de Hô
Chi Minh-Ville compte actuellement une soixantaine de collectionneurs de
la mégapole du Sud et d'autres provinces comme An Giang, Tiên Giang,
Long An, Dông Nai, Lâm Dông, Bà Ria-Vung Tàu et Khanh Hoa...
Professeurs-Docteurs, chercheurs, agrégés, docteurs en médecine,
ingénieurs, enseignants, entrepreneurs, techniciens, ouvriers et
retraités sont réunis sous la même passion des céramiques antiques.
"Nous avons désormais un superbe trésor de céramiques antiques. En
effet, celui-ci est issu de nombreuses collections personnelles dont
les pièces sont particulièrement variées de style comme d'époque", se
félicite Nguyên Van Quynh, président de l'Association des antiquités de
Hô Chi Minh-Ville.
À collection idéale, rien d'impossible
Cao Duc Truong est connu des passionnés de céramiques antiques de Hô
Chi Minh-Ville aussi bien pour son trésor que pour sa profonde
expertise. Grand amateur de thé, il a commencé en 1990 à collectionner
des théières. Il possède aujourd'hui au moins 6 armoires bondées :
une profusion de pièces vietnamiennes et chinoises, de grandes époques,
repêchées en majorité de navires marchands naufragés dans les eaux
maritimes du pays.
"Parmi mes collections, les
céramiques chinoises, repêchées dans des épaves situées dans la zone
maritime de Hon Cau, Binh Thuân et Cà Mau, appartiennent aux dynasties
chinoises des Song, Yuan, Ming et Qing (10e - 18e siècles). Celles
qui sont vietnamiennes, retrouvées dans des navires à Hà Tiên, Phu
Quôc et Cu Lao Chàm, datent des dynasties des Ly, Trân, Lê et Nguyên
(11e - 18e siècles)", précise ce fin collectionneur. Et d'observer
que les pièces chinoises se signalent généralement par une apparence
brillante et des couleurs vives, alors que celles vietnamiens sont
claires et gracieuses.
La pièce maîtresse
de sa collection est un brûle-parfum de forme carrée, à l'émail d'un
brun noir datant du 17e siècle originaire du village de céramique de Phu
Lang, dans la province de Bac Ninh (Nord). Sur sa face avant, sont
finement sculptées en haut relief les 4 animaux sacrés : 2 dragons, 2
licornes, 2 phénix et une tortue. Entre les 2 dragons, en symétrie avec
l'ouverture du brûle-parfum, se trouvent 4 caractères chinois signifiant
"Vive l'empereur", lesquels sont complétés comme il se doit de
l'idéogramme "longévité", entre les 2 phénix. Un objet des plus sacrés
pour Cao Duc Truong qui l'a acquis il y a quelques années.
Et depuis le collectionneur n'a eu qu'une idée en tête, celle de
trouver son possible frère jumeau. Mais "je suis toujours rentré
bredouille", dit-il avec le sourire en montrant sur la table une pile de
photographies d'anciens brûle-parfums, prises dans les nombreux musées
du pays qu'il a visités dans cette quête.
Collectionner et préserver le patrimoine culturel
Très expérimenté en la matière, Cao Duc Truong peut identifier les
objets de chaque période, qu'il s'agisse de vases, de pots, de théières,
de bols, d'assiettes, de verres ou de bouteilles d'alcool... Selon ses
explications, si les pièces de la dynastie des Ly (11e-13e siècles) sont
très minces et possèdent un émail d'une couleur brune, celles des Trân
(13e -15e siècles) se distinguent par leur céladon. Leurs différences se
manifestent également au niveau du style, tout de finesse pour les Ly,
et de robustesse pour les Trân.
La
céramique antique vietnamienne se caractérise par de beaux motifs
décoratifs, en bas relief et couverte d'un émail (bols et assiettes),
ainsi que par une sonorité claire lors qu'on la frappe. Et celle que
l'on ne peut manquer de citer est celle de Chu Dâu, un village de la
province de Hai Duong (Nord) qui sont qualifiées par les experts de
pièces "minces comme le papier, pure comme la perle, blanche comme
l'ivoire, et chantante comme un oiseau", souligne Cao Duc Truong.
Elles constituent à elles seules la transition entre le style des Ly à
celui des Trân, un nouveau genre alliant finesse du premier à la
robustesse du second.
Pour ce collectionneur
chevronné, la beauté de la céramique peut se caractériser ainsi :
d'abord la forme, puis l'émail, ensuite l'intégrité, enfin l'âge. "Une
fois que l'on est capable d'apprécier la beauté de la céramique antique,
on s'aperçoit alors, et avec quelle fierté, de l'âme pure et du style
magnifique dont ont fait preuve nos ancêtres en les créant",
indique-t-il.
La collection et l'étude de la céramique
contribuent à la préservation du patrimoine national, selon le
président de l'Association des antiquités de Hô Chi Minh-Ville, Nguyên
Van Quynh. Son association est toujours prête à initier tous les
amateurs à l'art de la céramique. Grâce aux connaissances échangées lors
de ces rencontres, les jeunes collectionneurs sont à même de faire un
peu plus la part du vrai et du faux, activité difficile compte tenu de
la variété tout aussi importante des copies... y compris d'époque !
L'Association des antiquités de Hô Chi Minh-Ville travaille en coordination avec des musées.
Elle a co-organisé des dizaines d'expositions de céramiques afin de
faire découvrir cet art au plus grand nombre. Nguyên Van Quynh se veut
aussi rassurant.
À l'opposé de l'inquiétante "fuite
ou éparpillement" des céramiques antiques, la tendance actuelle est à la
restitution ou à la préservation des œuvres dans leur pays d'origine.
Certains des collectionneurs membres ont déjà pu acheter plusieurs
céramiques vietnamiennes à des résidents vietnamiens à l'étranger qui
les avaient acquises eux-mêmes lors des visites au pays natal. – AVI