Né dans la même province que le
Président Hô Chi Minh (Nghê An), Nguyên Viêt Sinh s’est engagé dans
l’armée dès 18 ans, comme tous les autres jeunes gens de son époque.
C’était alors en 1961, moment où la guerre d’indépendance contre les
agresseurs américains se trouvait dans sa phase la plus tendue et que le
front du Sud avait besoin plus que jamais des subsides du Nord.
Le jeune engagé et ses frères d’armes ont été envoyés dans la
province de Quang Binh (Centre), à proximité du 17e parallèle démarquant
le Nord du Sud. Là, les jeunes soldats se sont joints à la force
spéciale qui a cherché à ouvrir la voie et à transporter des
marchandises vers le Sud. Les travaux étaient pénibles. Chaque jour, les
jeunes transporteurs devaient marcher plus de 40 km dans les forêts
sombres, sur des pistes boueuses, au milieu des serpents venimeux. Dans
de telles conditions, chaque jeune transportait entre 20 et 25 kg de
marchandises (riz et essence). Seul Nguyên Viêt Sinh transportait 40 à
50 kg, puis 75 kg même... Un exploit quand l’on sait que Nguyên Viêt
Sinh ne mesurait pas plus de 1m70 pour seulement 60 kg !
«Pendant ces années, nous avons marché avec l’âme sereine. Chaque
fois que nous transportions lourd, nous pensions à notre slogan : un
kilo de marchandise aidera nos compatriotes du Sud à ne pas verser leur
sang, une balle tuera un ennemi», explique simplement notre héros Nguyên
Viêt Sinh. Lui même ne savait pas qu’avec de tels actes et réflexions
si simples, il serait décoré, un jour, du titre de héros.
L’exploit du transporteur Nguyên Viêt Sinh fait l’objet d’une leçon
du manuel d’histoire de 5e classe, où sont rapportées les paroles
suivantes de Nguyên Viêt Sinh : «Parallèlement au convoi de camions
transportant jour et nuit des marchandises vers le Sud, c’était la
troupe de transporteurs avec sur leur dos des hottes remplies de riz et
d’essence, traversant les forêts, les montagnes et les cours d’eau. Il y
avait des pentes tellement abruptes que si nous n’y prenions garde nous
pouvions facilement marcher sur la tête de la personne derrière nous».
Et d’ajouter : «Pour éviter le guet et les patrouilles ennemies, il
arrivait parfois que nous devions nous glisser dans des égouts ou
étendre des étoffes de nylon sur la piste et marcher sur cette couche de
nylon pour ne pas laisser de traces. Pour communiquer avec les autres,
nous devions murmurer».
Plus d’un an après son
engagement dans l’armée, Nguyên Viêt Sinh a reçu en 1962 le titre de
soldat d’élite. Une fierté pour le jeune transporteur et sa famille.
C’était aussi un grand encouragement à faire plus d’efforts encore et
encore.
La guerre dans le Sud était de plus en
plus atroce. Pour mieux soutenir la lutte de libération nationale, le
corps de troupes de Nguyên Viêt Sinh a lancé un programme
d’encouragement des transporteurs à augmenter leur rendement. Étant chef
d’une escouade de neuf personnes, Nguyên Viêt Sinh a cherché à parfaire
son travail et ceux de ses coéquipiers. «Notre escouade comprenait neuf
personnes, mais nous essayions de faire le travail de dix ou onze
personnes. Si quelqu’un dans le groupe tombait malade, nous nous disions
de ne pas cesser le travail. Les personnes en bonne forme aident les
malades à transporter plus de marchandises, ceux qui marchent plus vite
épaulent ceux qui marchent plus lentement...», se souvient le héros.
Grâce à la volonté de Nguyên Viêt Sinh, son escouade et lui même ont
toujours été en tête des unités et personnes distinguées.
De nombreux écrivains et journalistes sont montés au front rencontrer
Nguyên Viêt Sinh pour écrire des articles sur le héros. L’exploit de
Nguyên Viêt Sinh est connu dans l’histoire de la piste légendaire de
Truong Son. Il a été l’un des premiers soldats et transporteurs de
Truong Son à avoir reçu le titre de héros des forces armées, en 1967.
Une décision signée du Président Hô Chi Minh même. Ainsi, Nguyên Viêt
Sinh a été l’un des premiers héros décorés durant la guerre
anti-américaine.
Dans le livre "Bare feet, iron
will" (Pieds nus, volonté de fer), l’auteur James G.Zumwalt – ancien
lieutenant-colonel du corps des Marines, a relaté l’exploit de Nguyên
Viêt Sinh dans les pages consacrées à la piste légendaire de Truong Son.
«Avant que les camions puissent circuler sur la piste, porter les
marchandises dans des hottes a été le moyen de transport majeur. Nguyên
Viêt Sinh était le modèle exemplaire qui exprime le plus la
détermination de ces transporteurs. Chaque fois, il transportait 45 à 50
kg. En quatre années, en 1.089 journées de travail, il a transporté
plus de 55 tonnes de marchandises sur son dos et parcouru 41.025 km,
soit un tour de la Terre à l’équateur. En moyenne, il transporte son
propre poids de marchandises». A côté de ces informations, se trouve un
petit portrait de Nguyên Viêt Sinh à 21 ans, souriant en uniforme,
portant casque militaire et l’insigne de travailleur d’élite.
En avril 2012, le héros Nguyên Viêt Sinh a reçu le certificat de
record du Vietnam de «Transporteur de la piste de Truong Son ayant
transporté des marchandises et soldats blessés sur le trajet le plus
long, un tour de la Terre».
Le vieux soldat,
colonel à la retraite de 71 ans, a souri en recevant ce nouveau
certificat. Il a consacré cinquante années de sa vie à l’armée.
Aujourd’hui, revenu à la vie civile aux côtés de sa femme, de ses
enfants et de ses petits-enfants, son bonheur est de cultiver les
bonsaïs et de raconter ces années de la piste de Truong Son à ses
petits-enfants. – AVI
Il y a près de 50 ans, la
presse internationale a qualifié le soldat-transporteur Nguyên Viêt
Sinh de «recordman» pour avoir fait presque un tour de la planète durant
ses six années de service dans l’armée. Aujourd’hui à la retraite,
notre héros, septuagénaire désormais, mène une vie simple à Vinh (Nghê
An, Centre).