Au Vietnam, les metteurs en scène ajoutent de plus en plus d'éléments issus de la danse contemporaine dans leurs spectacles traditionnels, créant la controverse auprès du public et de certains professionnels. Ces derniers s'inquiètent de voir la culture vietnamienne disparaître au profit de l'art dit moderne.

«Aujourd'hui, les spectacles de danse mélangent à souhait les différents genres, tant et si bien que les caractéristiques de l'art traditionnel deviennent invisibles. Les metteurs en scène incorporent des mouvements bruts provenant de la danse moderne, et les représentations perdent de leur charme. Certaines me mettent mal à l'aise. De plus, il est fréquent qu'on ne comprenne pas où les créateurs veulent en venir», fustige Pham Thi Thuy, professeur de l’Université de la culture et des arts de l’Armée. 

Et à l’"Artiste Émérite" Trinh Ut Nghiêm d'ajouter : "Ce mélange des genres pourrait être intéressante, et même apporter un nouveau souffle à la danse traditionnelle. Cependant, il doit être le résultat d'une collaboration étroite entre les deux courants, afin de garder l'authenticité de la culture vietnamienne. Ce n'est pas le cas aujourd'hui".

De même, selon Nguyên Quynh Lan, professeur à l’École supérieure de danse du Vietnam, "on peut créer un nouveau genre, mais le public doit ressentir la présence de l’identité vietnamienne. Ainsi, des pièces comme Suong som (La rosée du matin) de la troupe Arabesque, ou Nguôn Sang (La source de lumière), mis en scène par Anh Phuong, ont réussi leur pari, ils ont subtilement mélangé tradition et modernité et le public a adoré, de même que les professionnels du secteur".

Difficultés dans la formation

Aujourd’hui, ce courant occupe une place importante dans plusieurs écoles, notamment l’Université de la culture et des arts de l’armée, l’École supérieure de danse du Vietnam et l’École de danse de Hô Chi Minh-Ville. Cependant, «la plupart des professeurs n'ont pas suivi de formation professionnelle. Ils sont totalement autodidactes en la matière. Chacun a sa propre façon d’enseigner», explique M me Thuy. 

De nombreux danseurs s'intéressent à ce genre mais il y a peu de professeurs expérimentés. Du reste, la majorité de ceux qui sont formés à l’étranger exercent à Hanoi, et les autres écoles sont lésées.

«Ces difficultés seront résolues si nous élaborons un programme commun pour toutes les écoles du pays. Il faut créer un système de formation professionnelle avec des professeurs et les artistes expérimentés capables de former des enseignants compétents respectant la tradition», souligne l’"Artiste du Peuple", Ung Duy Thinh, vice-président de l’Association des danseurs du Vietnam. - VNA