Il y a 10 ans, en cas de maladie, de nombreuses personnes en zone montagneuse recouraient aux plantes ou à un chaman, ou encore laissaient la maladie se développer. Le Projet 1816 du ministère de la Santé leur a apporté de réels soins médicaux.

De premiers médecins de montagne...

Lorsque nous avons rencontré Mme Nguyên Thi Manh, chef du poste médical de la commune de Lung Tao, district de Dông Van de la province de Hà Giang (Nord), elle nous a raconté des histoires incroyables sur ses premières années dans ce hameau où elle donne des soins médicaux. En 2004, elle a quitté Tuyên Quang pour cette commune frontalière. A cette époque, elle avait 22 ans et tout était assez étrange pour elle. La commune comptait 670 familles dont 406 étaient pauvres. Elles manquaient de tout, de nourriture jusqu'aux vêtements comme d’éducation. Le chaman "dominait" la vie des gens car, pour eux, il guérissait les maladies en chassant les mauvais esprits. Le mot "médecin" était même très suspect à leurs oreilles !

"Quand les gens tombaient malades, je leur demandais d'aller voir le médecin, mais ils me disaient qu'ils n’en avaient pas besoin car le sorcier était là !". Lorsqu’un membre de la famille tombait malade, ils invitaient le chaman chez eux pour une cérémonie. Après, si le malade ne récupérait pas, il s'allongeait sur le lit jusqu’à la mort, refusant obstinément de voir un médecin. A cette époque, il y avait un grand nombre de résidents de Lung Tao qui mouraient à la maison, même de maladies guérissables comme la pneumonie...

Il a fallu attendre 2005, soit un an après l’arrivée de Manh à Lung Tao, pour voir les choses évoluer. "Cette année-là, un villageois a connu une insuffisance cardiaque et un membre de sa famille est allé au poste médical pour l’annoncer. Une assistance médicale lui a été donnée en urgence, puis il a été transféré à l'hôpital, et il a été sauvé.", explique Manh.

Après cette affaire, les villageois ont changé de regard sur le médecin et le poste médical. Ils ont suivi les conseils du médecin de porter des vêtements chauds en hiver pour prévenir la pneumonie, de veiller à assurer leur hygiène personnelle et celle de leur habitat pour éviter les infections. Peu à peu, le médecin a remplacé le chaman...

La sensibilisation de la population s'est améliorée, mais le poste médical de la commune de Lung Tao à cette époque était très dépourvu. Manh a reçu sa première trousse de premiers secours fin 2011 ! Les routes étaient réellement un défi pour les cadres sanitaires issus des plaines comme elle. Aller dans certains hameaux impliquait de faire des dizaines de kilomètres à pied dans la forêt. Quant un villageois tombait malade, les médecins affrontaient ces chemins en pleine nuit parfois. "Après avoir gagné la confiance des villageois, si nous n’étions pas venus lorsqu'ils ils avaient besoin de nous, nos efforts eussent été vains".

Nous avons pu constater les liens intimes qui unissent les villageois et les médecins en suivant Manh allant consulter Dinh Thi Kia, la fille de Dinh Say Phua, dans le village de Lung Tao (commune de Lung Tao).

… au Projet 1816

En 2008, en application de la politique du Parti d'envoyer des cadres intellectuels dans les zones de population clairsemée, en particulier celles montagneuses, afin d'aider les gens en termes de développement économique et socioculturel pour améliorer leurs conditions de vie, le ministère de la Santé a élaboré le Projet 1816. Ce dernier a pour objet d'envoyer en mission des médecins d’hôpitaux d'échelon supérieur dans ceux d'échelons inférieurs - communes et districts - pour transférer des technologies et améliorer les compétences des cadres médicaux locaux. Le projet s'est avéré remarquablement efficace.

Le poste médical de la commune Lung Tao, qui a connu des jours très difficiles, s'esrt transformé en établissement spacieux de deux étages comprenant six lits et huit bureaux. Le corps soignant est de six personnes, dont un médecin généraliste, une infirmière générale, un cadre de soins sanitaire, une sœur de charité et deux cadres étudiant à l’Hôpital de Thaï Nguyên. Il y a 20 infirmières dans 16 hameaux, chacun d'entre eux ayant une infirmière en poste permanent. Elles travaillent aussi comme sages-femmes. En outre, la commune dispose de cinq sages-femmes qui sont des femmes locales ayant reçu une formation de 18 mois.

Aujourd'hui, les habitants de ces hameaux n'ont pas besoin d'aller à Hanoi, ce qui est à la fois trop loin et trop cher, pour suivre un traitement médical poussé, car il faut une heure en moto pour atteindre la Polyclinique du district de Yên Minh. C'est le plus grand centre médical des quatre districts montagneux de la province de Hà Giang (Dông Van, Mào Vac, Yên Minh et Quan Ba).

Sur le chemin du retour, nous avons visité la Polyclinique de Yên Minh. Le Dr Nguyên Thi Ngoan, directrice-adjointe de l'hôpital, nous a informé qu'elle et ses collègues ont effectué une opération sur un patient souffrant de saignements de l'estomac en utilisant l'endoscopie, laquelle est utilisée ici depuis fin 2011.

Elle a également déclaré qu’autrefois, l'hôpital était seulement en mesure d'employer des techniques chirurgicales traditionnelles, laissant une longue incision qui prend beaucoup de temps à cicatriser et qui peut générer de surcroît des complications dangereuses, en particulier pour les personnes vivant en zone reculée.

Mais depuis l'emploi de l'endoscopie, l’Hôpital Yên Minh a effectué plus de 160 opérations, en recevant en outre un nombre croissant de patients d'autres districts comme Quan Ba, Mèo Vac et Dông Van. Dans le passé, les patients qui avaient besoin d'une intervention chirurgicale devaient aller à l'hôpital provincial, voire à Hanoi. Désormais, l’Hôpital Yên Minh peut effectuer presque toutes les interventions chirurgicales, y compris pour certaines pathologies délicates telles que cholécystectomie, l'hystérectomie et l'extraction de kystes ovariens.

Evoquant le Projet 1816, le Dr Luong Dinh Cham, directeur adjoint de l’Hôpital Yên Minh, a souligné que des délégations de médecins de grands hôpitaux et d'hôpitaux de ressort central viennent souvent à l'hôpital du district pour partager leurs savoir-faire. Chaque année, des médecins de l’Hôpital Yên Minh sont formés dans des hôpitaux de ressort central pour améliorer leurs compétences et maîtriser de nouvelles techniques. L'hôpital prend toujours les devants et est actif dans la formation continue du personnel médical en poste dans les hameaux.

Le Docteur Cham a confié que "l'hôpital a attaché une grande importance aux capacités de diagnostic des médecins des hameaux parce que les consultations et traitements à ce niveau sont très importantes, surtout compte tenu des conditions de transport difficiles en zone montagneuse. Si les cadres sanitaires de la commune et des hameaux ont de bonnes compétences professionnelles, ils peuvent traiter des cas d'urgence en attendant l'ambulance de l'hôpital de district".

Bien que nous n'ayons été dans la commune de Lung Tao que quelques jours seulement, nous avons vraiment pu voir le dévouement et le sens du devoir de ces médecins. Le programme de l'Etat et du ministère de la Santé de fourniture d’équipements médicaux en zone montagneuse, avec le soutien efficace des hôpitaux d'échelon supérieur, a vraiment permis d’améliorer les services de santé dans ces zones. -VNA