Depuis près de 40 ans, legrand maître Nguyên Van Chiêu vit, pense et vibre Vovinam, cet artmartial vietnamien que l’on ne présente plus. Aujourd’hui plus quejamais, il se consacre corps et âme à son essor, et ce bien au-delà denos frontières.
Pour la rédaction de cet article, Nguyên VanChiêu nous a conviés à son domicile dans le 8 e arrondissement à Hô ChiMinh-Ville, où l’on a découvert ce sexagénaire dégageant une grandesérénité.
Retour aux origines
Le maître NguyênVan Chiêu commence la pratique du Vovinam en 1965 sous la tutelle dumaître Trinh Ngoc Minh. À 21 ans, il devient instructeur : « Entre 1965et 1975, le taekwondo et le judo connaissaient un développement rapide àHô Chi Minh-Ville. Un jeune comme moi, passionnés d’arts martiaux,était tout sauf un cas exceptionnel. J’ai appris ces deux disciplines,mais je sentais qu’il me manquait quelque chose. C’est avec des amis queje suis ensuite devenu l’un des disciples des maîtres Trân Ngoc Anh etLê Sang, qui m’ont tout appris». Il nous explique avec ce flegme qui lecaractérise qu’il était « prédestiné au Vovinam. Après seulement deuxans de pratique, en 1967, j’ai reçu ma ceinture noire 3e dan. C’estainsi qu’à 23 ans, j’ai pu enseigner à l’école martiale Pétrus Ky(aujourd’hui l’école Lê Hông Phong à Hô Chi Minh-Ville, ndlr)».
En 1969, le jeune maître Nguyên Van Chiêu risque sa vie (le pays estalors en plein conflit, ndlr) pour revenir dans la ville de Quy Nhon(province de Binh Dinh, au Centre) et établir le mouvement du Vovinam ausein même de «la terre des arts martiaux du pays». Là, il prend encharge 12 clubs, et développe aussi le Vovinam dans plusieurs autreslocalités du Centre comme Quang Binh, Dà Nang, Khanh Hoà, Phu Yên, etc.Un essor qui fait tache d’huile du Nord au Sud (Gia Lai, Dak Lak,Dông Nai, Vinh Long, Cân Tho, Bên Tre, Hanoi...) avec, début 2010,quelque 60.000 pratiquants réguliers à travers le pays.
Après1975, le pays pacifié, il retourne à Saigon (Hô Chi Minh-Villeaujourd’hui). Trois ans plus tard, il inaugure le premier dojo et ouvreson premier cours dans le 8e arrondissement, qui devient en quelquesannées le berceau et la référence du Vovinam de la ville. Un phénomènequi s’étend bien au-delà d’un simple art martial. Ses cours attirentparfois plus de 2.000 pratiquants, dont plusieurs champions accomplisqui se sont illustrés à maintes reprises lors des compétitionsnationales.
La passion qu’il nourrit pour cet art martial estpartagée par l’ensemble des membres de sa famille : alors que son épouseest une pratiquante assidue, son fils est le chef de file de ladiscipline Vovinam du Service municipal de l’éducation physique et dessports, et sa fille est la vice-présidente de la Fédération européennede Vovinam en Grande Bretagne.
Donner au Vovinam une dimension planétaire
C’estégalement au grand maître Nguyên Van Chiêu que l’on doit l’expansion duVovinam par-delà les frontières. Après une tournée réussie en Russie en1990, il pose les pieds en Espagne en 1997, sur l’invitation depratiquants ibériques. Il commence à y prodiguer son enseignement, cequi marque le début de la «conquête du monde» de cet art martial.
Aujourd’hui en 2013, Nguyên Van Chiêu s’est rendu dans une dizaine depays à cette noble fin. Selon lui, les élèves étrangers, au-delà del’apprentissage purement technique, sont captivés par la profondeurphilosophique et les valeurs que véhicule cet art martial. Ils l’aimenten raison de ses mouvements simples, logiques, de ses coups faciles àassimiler. Une simplicité qui lui confère une efficacité indéniable ensituation réelle. Si le taekwondo a pour point fort les mouvements dejambes et le karaté ceux des mains, l’art martial vietnamien combinesavamment ces éléments.
Nguyên Van Chiêu est actuellement lemaître de Vovinam le plus haut gradé au monde. Ce n’est pas pour riens’il est vice-président de la Fédération mondiale de Vovinam,vice-président de la Fédération nationale de Vovinam, et directeurtechnique international. Il est allé promouvoir et enseigner cet artmartial dans de nombreux pays comme la Russie, la Biélorussie,l’Espagne, l’Italie, la Roumanie, l’Allemagne, la Belgique, la Pologne,la France, la Thaïlande, l’Indonésie, Singapour, l’Inde, le Cambodge,les États-Unis... Le Vovinam est déjà pratiqué dans plus de 50 pays etterritoires, le tout avec un encadrement de qualité puisqu’il existedésormais de nombreuses fédérations de Vovinam en Asie, en Europe, ainsique dans des pays comme la Russie, l’Allemagne, l’Iran... En bref, unrayonnement qu’il n’est pas exagéré de qualifier de planétaire.
Comme l’on peut s’en douter, la demeure du grand maître Nguyên VanChiêu est une adresse de prestige qui accueille régulièrement despratiquants étrangers. Chaque année, il reçoit des dizaines dedélégations en provenance d’Italie, de France, d’Espagne, du Laos, duCambodge, etc.
Le Vovinam est désormais un sport reconnu par denombreux pays. En 2009, il devient le premier art martial vietnamien àêtre introduit dans la liste des disciplines comptant pour les 3 esAsia indoor Games (Jeux sportifs d’Asie en salle). En 2011, il fait sonentrée officielle dans le programme des compétitions des 26 es SEAGames (Jeux sportifs d’Asie du Sud-Est) en Indonésie. Et il égalementinscrit dans les disciplines représentées aux Jeux asiatiques en salle2013. Une réussite à mettre au crédit du grand maître Nguyên Van Chiêu,qui a consacré toute sa vie aux arts martiaux, plus précisément aux artsmartiaux traditionnels vietnamiens.
Quelques mots sur le Vovinam
Le Vovinam, aussi connu sous le nom de Viêt Vo Dao, a été fondé par lefeu Grand Maître Nguyên Lôc, il y a 70 ans. En 1938, à Hanoi, sur labase de la lutte libre et d’arts martiaux nationaux ainsi que del’héritage de l’essence des arts martiaux du monde, Nguyên Lôc a créécette discipline. Après sa mort, son meilleur disciple, le grand maîtreLê Sang, a poursuivi et développé le Vovinam dans le Sud etprogressivement à l’étranger. En plus de 70 ans, cet art martial estdevenu très prisé et pratiqué un peu partout dans le monde. - VNA