Hanoï (VNA) - Cette question estl’intitulé du livre qui a remporté la médaille de bronze du Prixnational d’architecture 2020-2021. Publié en vietnamien et en françaisaux éditions des Sciences sociales (NXB Khoa học Xã hội), il est signépar Nguyên Viêt Huy, un architecte vietnamien qui a étudié et travaillépendant plusieurs années en France.
«Mon livre a été construit autourd’une hypothèse, d’une interrogation qui n’en est pas tout à fait une.L’architecture et le paysage des villages du delta du fleuve Rougesont-ils une chance pour la conception de nouvelles cités dans lecontexte de l’urbanisation généralisée? Pourquoi ne nous inspirons-nouspas de ce savoir-faire traditionnel pour consolider ledéveloppement actuel? Pourquoi détruire et arracher toutes ces racinesmerveilleuses?»
Ces questions, Nguyên ViêtHuy se les est posées et a tenté d’y répondre dans sa thèse de doctoraten aménagement urbain à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. NguyênThu, une éditrice de la maison d’édition des Sciences sociales, a euvent de cette thèse par l’intermédiaire d’un ami commun, et a demandé àl’auteur de la traduire en vietnamien et d’en faire un livre.
«Cette thèse pourrait, àmon sens, être une bonne suggestion pour les personnes chargéesd’aménager le delta du fleuve Rouge. Il serait en effet idéal de pouvoirpréserver des éléments traditionnels dans la construction de nouvellescités. Toutes les données, tous les arguments du livre me paraissentbien documentés et très utiles», nous dit-elle.
Encouragé par l’éditrice,Nguyên Viêt Huy s’est démené entre l’enseignement et ses projetsarchitecturaux pour traduire sa thèse dans la langue de sescompatriotes.
«C’est un livre de la viequotidienne. Je l’ai écrit pour en faire cadeau à mon grand-pèrepaternel qui adore le banian, la fontaine et la cour de la maisoncommunale, toutes ces images typiques d’un village du delta du fleuveRouge. Je crois que les lecteurs qui sont nés ou qui ont grandi dans unezone rurale du Nord Vietnam s’y retrouveront. Et certains, notammentceux qui ont quitté leur village natal, constateront peut-être que deséléments de la province de Bac Ninh décrits par l’auteur ressemblentétrangement à ce qu’ils ont connu chez eux, à Hai Duong ou Thai Binh»,nous confie Nguyên Viêt Huy.
Né à Cho, un villageagricole de la province de Bac Ninh réputé pour le caractère studieux deses habitants, Huy estime qu’il a la chance d’avoir grandi dans unvillage paisible typique du Nord Vietnam. Mais de retour au villageaprès de longues années, il constate avec amertume que les autres, etlui-même d’ailleurs, possédaient un joyau sans jamais en avoir étéconscients.
«Quand j’étudiais puistravaillais en France, j’avais beaucoup à faire avec la notion de villeintelligente. En réfléchissant un peu, je me suis rendu compte avecstupéfaction que les villages vietnamiens, a fortiori ceux du delta dufleuve Rouge, avaient ce caractère intelligent depuis toujours»,raconte-t-il. «En effet, que ce soient l’endroit où ils ont étéinstallés, les matériaux locaux utilisés pour les construire ou lespaysages qui les constituent, tout semble avoir été conçu par les plusgrands maîtres architectes. Or, à l’époque il n’y avait pasd’architecte. Ces villages ont été construits dans une parfaite harmonieentre l’homme et la nature. Quoi de plus intelligent que cettecombinaison banian, fontaine, cour de la maison communale? Si j’ai écritce livre, c’est pour dire aux aménageurs urbains de bien réfléchir etde faire preuve de courage en conseillant aux promoteurs, au lieu detout détruire, de garder ces éléments traditionnels qui sont d’unevaleur infiniment plus grande que ce qu’ils peuvent imaginer»,souligne-t-il.
Dans la préface du livre «Lesvillages du delta du fleuve Rouge au Vietnam: Une chance pour lespaysages urbains?», le professeur Eric Dubosc, de l’École nationalesupérieure d’architecture de Paris la Villette, a écrit: « Le mérite dece livre est de nous ouvrir les yeux sur les traces vivantes de cetteharmonie secrète, que nous ne regardions plus, celle entre l’homme etson milieu… Ce livre de Nguyên Viêt Huy ne concerne pas seulement ceuxqui s’intéressent au delta du fleuve Rouge. Il a une valeuruniverselle». - VOV/VNA