Hai Phong (VNA) - Libérés de leur addiction, ces anciens toxicomanes ont décidé de rester au Centre de désintoxication de Gia Minh à Hai Phong en tant que "collaborateurs". Leur histoire.
Pour les 700 toxicomanes qui suivent une cure, ils sont vus comme des "grands frères". Immersion dans le Centre de Gia Minh, ville de Hai Phong (Nord).
"Moi qui ai été toxicomane, je connais le syndrome de sevrage, c’est-à-dire l’ensemble des troubles physiologiques et comportementaux qui surviennent à l’arrêt de consommation d’une drogue. Et je souhaite faire profiter les pensionnaires du Centre de mon expérience", confie TNM, un collaborateur du Centrede désintoxication de Gia Minh, ville de Hai Phong. Et d’ajouter : "La désintoxication est un processus difficile et les cas de rechute sont nombreux".
Collaborateurs bénévoles
Couvrant 70 ha dans le district de Thuy Nguyên, à Hai Phong, le Centre de désintoxication de Gia Minh recense plus de 700 pensionnaires. Sa particularité réside dans la présence d’une dizaine de collaborateurs qui sont tous d’anciens toxicomanes. Leur cure réussie, ils se sont portés volontaires pour travailler bénévolement au Centre. Leur mission est de vivre auprès des pensionnaires, les guider dans leurs activités quotidiennes, les encourager et leur donner des conseils...
Chaque jour, un collaborateur organise une séance d’exercices physiques dans la cour, un autre fait l’entretien du jardin de plantes médicinales, un troisième, la récolte des légumes… Partout, l’ambiance est conviviale. On travaille ensemble, on cause, on badine, on rit… Pour les pensionnaires, ces collaborateurs sont comme des "grands frères", avec lesquels on peut se confier sans retenue.
"Au début, les nouveaux pen-sionnaires se heurtent à de multiples difficultés en raison du manque de drogue et de la privation de liberté, raconte le collaborateur TNM. Je les encourage, je leur dis qu’il faut faire des efforts pour s’en sortir, rien n’est facile. Et qu’après, ils auront la joie de retrouver une vie digne auprès des leurs".
Selon le collaborateur NPT de multiples méthodes d’aide sont appliquées, qui font appel à la persuasion et non à la punition. Chaque pensionnaire a sa propre histoire personnelle qui l’a mené à la toxicomanie... La comprendre permet d’aider plus efficacement.
"Parfois, ces pensionnaires res-semblent à des enfants têtus qui ont besoin d’être stimulés, encouragés. Nous leur donnons continuellement des conseils. Et quelle joie de les voir changer au fil des jours ! C’est pour nous un grand bonheur", avoue NPT.
Forts de leurs expériences, de leur dévouement et de leur patience, ces collaborateurs sont un lien étroit entre pensionnaires toxicomanes et cadres gestionnaires, selon Nguyên Hai Hung, directeur du Centre de Gia Minh. Et d’éclairer : "Grâce à eux, la cure est plus efficace. Car, mieux que personne, nos collaborateurs comprennent la psychologie des usagers en phase de sevrage et les difficultés qu’ils affrontent".
Confiance en soi et liberté
À la porte du Centre de Gia Minh, une pancarte porte cette inscription : "Bienvenue aux nouveaux pensionnaires". Il s’agit d’un espace ouvert de 70 ha, sans murs ni clôtures.
"Le Centre fonctionne sur la base de la confiance ainsi que de la maîtrise de soi. Car, comme je le dis toujours aux pensionnaires : une fois que l’on a confiance en soi, on est libre", affirme le directeur Nguyên Hai Hung.
Pour lui, les collaborateurs du Centre sont à la fois dévoués et expérimentés. Certains restent là certes pour soutenir leurs collègues d’infortune, mais aussi parce qu’ils redoutent leur retour dans la société. De peur du regard des autres, de retrouver les mêmes fréquentations, de se retrouver seul face à soi-même, de la rechute...
C’est le cas de TNM. Issu d’une famille aisée dont le père était haut placé au sein de l’appareil étatique, TNM est tombé dans la drogue à son adolescence. Il a été envoyé au Centre de désintoxication de Gia Minh sans que personne ne le sache, hormis ses parents. "Maintenant, je ne veux pas rentrer à la maison. J’ai peur des regards dédaigneux de tous", confie-t-il.
Le collaborateur NMC, séropositif depuis une vingtaine d’années, confie : "J’ai déjà pensé à me suicider. Et puis, Mme Tâm, chef adjointe du Centre, m’a remis d’aplomb avec ces mots : +Dans la vie, toute chose ou tout homme a sa valeur. L’important, c’est de savoir vivre une vie digne en accord avec ce que l’on est+". À présent, sur le conseil de Mme Tâm, NMC pratique la méditation et est devenu végétarien. Dans l’avenir, ces collaborareurs bénévoles pourraient être nommés "cadres gestionnaires" du Centre et être salariés. -CVN/VNA