Hanoi (VNA) - Portés par les États ou par les compagnies aériennes, certificats et autres attestations de vaccination pour voyageurs en temps de Covid-19 commencent à voir le jour. Mais leur généralisation donne matière à réflexion.
Alors que la vaccination contre le Covid-19 progresse dans le monde, le passeport vaccinal représente un des moyens les plus sûrs de relancer progressivement l’économie, notamment dans le secteur du tourisme, de la culture et de la restauration. Cela a germé de nouvelles idées sur la façon dont les vaccins pourraient progressivement permettre un retour à la normale.
Les justificatifs et les applications mis en place à la fois par les pouvoirs publics et des entreprises privées pourraient certifier le statut vaccinal de chacun et permettraient de réserver l’accès aux clubs de sport, aux cinémas et aux restaurants aux personnes protégées.
Dans la course au sésame pour retrouver une liberté de mouvement, certaines organisations, particulièrement concernées, ont pris un temps d’avance par rapport aux Etats et aux institutions internationales. L’Association internationale du transport aérien (IATA), a par exemple lancé, en novembre, le « Travel Pass », permettant d’éditer l’équivalent d’un passeport sanitaire, en rassemblant l’ensemble des documents exigés selon le lieu de destination.
L’industrie touristique et le secteur de l’aviation sont parmi les principaux promoteurs du passeport vaccinal, qui laisse entrevoir la reprise de leurs activités. Logiquement, c’est dans le secteur du voyage, du tourisme et de l’événementiel que les entreprises se montrent le plus enthousiastes et proactives, tant elles souffrent des conséquences de la crise sanitaire.
Les compagnies aériennes ont vu leurs recettes d’exploitation brutes amputées de 370 milliards de dollars en 2020, selon l’Organisation de l’aviation civile internationale (Icao) et le manque à gagner, pour le secteur du tourisme, a probablement dépassé 1.000 milliards de dollars, estime l’Organisation mondiale du tourisme.
La création d’un passeport vaccinal se heurterait à plusieurs obstacles
L’idée d’un passeport vaccinal suscite l’intérêt de plusieurs pays, dont certains l’ont déjà mis en place, et de l’industrie touristique durement affectée par la pandémie, mais elle est loin de faire l’unanimité sur la scène internationale.
Sans remettre en cause la pertinence de la promotion de la vaccination contre le SARS-CoV-2, plusieurs professionnels du secteur sont inquiets des projets de passeport vaccinal, pour la circulation entre pays, tant du point de vue de leur faisabilité que de leur efficacité d’un point de vue sanitaire.
Un passeport vaccinal repose sur l’hypothèse que les vaccinés ne soient plus contagieux s’ils venaient à recroiser le SARS-CoV-2, et se propose de certifier cet état de fait. Or, dans l’immédiat, il n’existe aucune certitude concernant la capacité des vaccins commercialisés actuellement à rendre 100 % des vaccinés sans danger pour autrui.
Si le certificat simplifie l’obtention d’un visa pour les étrangers, les touristes vaccinés seraient soumis à deux semaines de quarantaine à leur entrée. De retour chez eux, ils doivent endurer à leur entrée les mêmes précautions. Des réglementations aussi strictes et une quarantaine fastidieuse rendent la demande de voyages presque nulle. Les déplacements internationaux augmenteront si sans aucune quarantaine, a fait remarqué le directeur général de Flamingo Redtours, Nguyên Công Hoan.
En l’absence de certitudes scientifiques sur le fait que les vaccins permettent de ne plus être porteur du virus, conditionner l’accès à certains lieux n’apporte pas de sécurité en matière de prophylaxie.
D’ailleurs, au siège de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), on a recommandé de «ne pas exiger de preuve de vaccination comme condition d’entrée» pour les voyageurs internationaux « étant donné les preuves limitées (bien que croissantes) concernant la performance des vaccins sur la réduction de la transmission et étant donné l’inégalité persistante en matière de distribution mondiale des vaccins ».
Par souci d’équité, le passeport vaccinal ne devra être instauré qu’à partir du moment où la vaccination sera accessible pour tous, mais cela prendra plusieurs mois. Selon un décompte de l’Agence France-Presse (AFP), jusqu’au 26 février, seules 222 millions de doses ont été administrées dans le monde, sur une population mondiale d’environ 7,8 milliards.
Selon le directeur de VietSense Travel, Nguyên Van Tai, les nouveaux vaccins n’en sont qu’à leurs débuts, le nombre de personnes vaccinées, les résultats ne sont toujours pas cohérents et une certification de vaccination ne peut dès lors pas apporter une garantie sanitaire totale.
Le responsable a estimé que’en plus du passeport vaccinal, il est nécessaire d’ajouter d’autres solutions pour prévenir le Covid-19, notamment la mise en œuvre du message 5K (sigles vietnamiens de masque, désinfection, distance, sans rassemblement et déclaration médicale) du ministère de la Santé.
«Je pense que le débat sur la mise en place et les modalités d’utilisation de ce passeport doit avoir lieu pour répondre aux interrogations des citoyens. Par conséquent, je crois qu’à l’heure actuelle, le +tourisme vaccinal+ est une option inappropriée à la fois dans le monde et au Vietnam», a-t-il estimé. – VNA