Hanoi (VNA) - Le tourisme vietnamien connaît actuellement de nombreux succès grâce à l’exploitation des valeurs du patrimoine et de la culture locale. Des destinations comme Ninh Binh, Ha Giang ou Hoi An (Quang Nam) témoignent de l’efficacité de cette approche.
Cependant, ce processus d’exploitation est également confronté à de nombreuses difficultés. Certaines localités manquent de stratégies à long terme, se concentrant uniquement sur le « tourisme saisonnier » ou suivant les tendances sans investir de manière durable.
Le patrimoine comme pôle d’attraction
Ces derniers jours de mai, le tourisme à Ninh Binh a enregistré de nombreux signes positifs grâce à une série d’événements spéciaux qui ont attiré un grand nombre d’habitants et de touristes. On peut citer en particulier des programmes artistiques tels que « Le patrimoine pour la vie », le Festival du chapeau conique - Vietnam 2025 ou encore des spectacles artistiques dans l’ancienne capitale de Hoa Lu, qui ont créé un espace culturel et artistique imprégné d’identité, constituant un atout majeur pour le tourisme.
Possédant à la fois un patrimoine culturel et naturel, en particulier le complexe paysager de Trang An, le premier double site du patrimoine mondial du Vietnam, Ninh Binh a investi massivement pour promouvoir l’image d’une destination attrayante avec des sites tels que Tam Coc - Bich Dong, Hang Mua, ou la pagode Bai Dinh, qui offrent non seulement des expériences variées mais contribuent également à promouvoir l’identité culturelle régionale.
Ce qui est remarquable, c’est que Ninh Binh n’exploite pas le tourisme à tout prix, mais se concentre sur la conservation des paysages et des valeurs du patrimoine comme Trang An, l’ancienne capitale de Hoa Lu, ou la pagode Bai Dinh. Les infrastructures touristiques sont soigneusement planifiées pour limiter le bétonnage et préserver la beauté naturelle et vierge. C’est aussi une manière d’attirer les visiteurs, en particulier les touristes étrangers.
Parallèlement à Ninh Binh, Hoi An est également devenue l’un des symboles du tourisme culturel du pays, en combinant avec succès l’architecture urbaine ancienne et en stimulant les activités artisanales traditionnelles et les fêtes folkloriques. Non seulement Hoi An a préservé presque intact l’aspect de sa vieille ville avec ses maisons en bois, ses toits de tuiles yin-yang et ses rues étroites, mais elle a également fait revivre des métiers artisanaux tels que la fabrication de lanternes, la couture traditionnelle et la menuiserie artistique.
Les fêtes folkloriques telles que le festival des lanternes ou les chants de « Bai Choi » sont organisées régulièrement, devenant un point fort de l’expérience des visiteurs. De nombreux touristes ont confié qu’en visitant Hoi An, ils avaient le sentiment d’être dans un « musée de l’histoire architecturale et urbaine », un lieu où les habitants vivent au cœur même du patrimoine, en préservant leurs coutumes, leurs habitudes, leurs manières de se comporter et leur gastronomie. C’est cette synergie entre les valeurs matérielles et immatérielles qui a créé l’identité propre de Hoi An, lui conférant un attrait particulier.
À Ha Giang, dans le plateau karstique de Dong Van, l’architecture des maisons en terre battue, les murs en pierre, l’art distinctif de la danse du khèn (une sorte de flûte), ou encore la découverte des coutumes des minorités ethniques Mong, Dao, Tay, offrent de nombreuses expériences intéressantes aux touristes. En outre, Ha Giang attire les visiteurs grâce à des festivals imprégnés d’identité culturelle, comme le Festival des fleurs de sarrasin, le Festival du khèn Mong, ou le Festival du marché de l’amour de Khau Vai. Chaque festival raconte une histoire sur la vie et les belles traditions culturelles des communautés montagnardes.
Au cours des cinq premiers mois de 2025, le nombre de visiteurs étrangers au Vietnam a atteint plus de 9,2 millions, soit une augmentation de 21,3 % par rapport à la même période de 2024. Rien qu’en mai 2025, le pays a accueilli 1,53 million de visiteurs étrangers, soit une augmentation de 10,5 % par rapport au mois de mai de l’année précédente. Les destinations qui ont su exploiter en profondeur les valeurs du patrimoine et de la culture locale ont contribué à ces chiffres impressionnants.
Le double avantage du tourisme lié au patrimoine
La Docteure Hoàng Thi Diêp, ancienne vice-directrice générale de l’Autorité nationale du tourisme du Vietnam, a déclaré que dans de nombreux endroits, le tourisme basé sur la culture et le patrimoine est devenu un moteur de subsistance et un secteur économique clé pour les localités. Le tourisme culturel et patrimonial génère à la fois des revenus et des emplois, tout en créant des ressources pour la conservation et la valorisation du patrimoine. C’est le double avantage du tourisme combiné au patrimoine. Le tourisme patrimonial génère des revenus, qui sont utilisés pour conserver, restaurer, promouvoir et valoriser le patrimoine.
Cependant, malgré ces succès, de nombreuses localités peinent encore à développer un tourisme culturel durable. En particulier, certaines localités exploitent encore le tourisme de manière à court terme, en suivant les tendances, ou en faisant du « tourisme saisonnier ». Par exemple, elles se concentrent uniquement sur l’organisation de festivals ou de fêtes en début d’année. De nombreux produits touristiques liés au patrimoine ne sont encore que des spectacles, manquant de profondeur de contenu et d’expérience. Dans certaines localités, la forte croissance du tourisme a eu des impacts négatifs sur le patrimoine, tels que la commercialisation excessive, l’abus du patrimoine et des restaurations non conformes.
Par conséquent, pour exploiter le patrimoine culturel dans le tourisme, selon les experts, il est nécessaire d’investir à long terme et de manière synchronisée, d’assurer une coordination étroite entre les secteurs du tourisme et de la culture, les autorités locales, et surtout la participation de la communauté.
À Hoi An, par exemple, les habitants sont formés pour participer directement aux services touristiques, de la pratique des métiers traditionnels à la préparation de plats locaux... en passant par la performance d’arts traditionnels comme le chant Bài Chòi. Au complexe paysager de Trang An, le modèle « entreprises et habitants participent ensemble à la protection et à l’exploitation » a été hautement apprécié par l’UNESCO et considéré comme un modèle à reproduire. Cela permet non seulement de créer des moyens de subsistance durables pour les habitants, mais aussi de préserver le patrimoine culturel traditionnel.
La professeure Nguyên Thi Thu Phuong, directrice de l’Institut de la culture, de l’art, du sport et du tourisme, a affirmé que dans le contexte de l’explosion de la technologie numérique et des médias multimédias, qui stimule la demande de consommation dans les centres de l’industrie culturelle, la concurrence entre les destinations touristiques s’intensifie, et les localités désireuses de développer le tourisme doivent être capables de raconter des histoires culturelles à travers leurs produits touristiques.
À cet égard, certains experts estiment également qu’il est nécessaire de mettre en place des politiques de soutien et d’incitations à l’investissement ciblées ; de renforcer la surveillance de la conservation et de l’exploitation du patrimoine ; et d’appliquer la technologie numérique pour raconter l’histoire du patrimoine de manière plus attrayante, afin d’attirer les jeunes générations et les visiteurs étrangers.
Donnant l’exemple de Ninh Binh, Johnathan Baker, chef de bureau de l’UNESCO au Vietnam, a déclaré que cette région particulière n’était pas seulement honorée pour ses valeurs universelles exceptionnelles, mais qu’elle est également un paysage dynamique, avec des communautés locales profondément liées aux ressources naturelles et culturelles. Cependant, comme de nombreux autres sites du patrimoine mondial, Trang An est confronté au défi de trouver un équilibre entre le développement touristique et la conservation du patrimoine.
Selon Johnathan Baker, il ne s’agit pas seulement d’attirer plus de touristes, mais aussi de savoir comment le tourisme peut nourrir les patrimoines vivants, contribuer à améliorer la qualité de vie de la communauté et préserver l’identité culturelle de Trang An. Le patrimoine et les écosystèmes sont des valeurs précieuses et limitées ; une fois endommagés, il est très difficile de les restaurer complètement. Par conséquent, l’investissement et le développement doivent aller de pair avec la préservation du patrimoine pour les générations futures.
Le tourisme culturel et patrimonial restera certainement une orientation stratégique pour le Vietnam à l’avenir. Cependant, le développement du tourisme à partir du patrimoine exige une solution systématique et durable. Il faut être particulièrement prudent, éviter un développement rapide qui dégraderait le paysage. Parallèlement, il est essentiel d’encourager la communauté locale à participer activement à la gestion du patrimoine, en liant les intérêts de la communauté locale à la conservation et à la valorisation du patrimoine. Une partie des revenus du tourisme patrimonial doit être réinvestie dans la conservation, la restauration, la valorisation, la réhabilitation et la gestion du patrimoine. – NDEL/VNA