Le monocorde est-il vietnamien ou chinois ?

Le monocorde est un instrument de musique vietnamien constitué d'une caisse de résonance et d'une corde unique séparée en deux parties par un chevalet mobile.
Le monocorde est-il vietnamien ou chinois ? ảnh 1Le dàn bâu, est un monocorde vietnamien. Photo : internet

Hanoi (VNA) - L’opinion publique et les artistes de musique traditionnelle ​s'indignent de la déclaration de la Chine considérant que le monocorde lui appartient. Pour éclaircir cette question, le journal Thê thao & Van hoa (Sports et Culture) de l’Agence Vietnamienne d’Information présente aux lecteurs l’extrait de l’article du professeur et docteur en musicologie Tran Quang Hai.

Des documents et archives historiques

Des ouvrages historiques importants ​traitent du dàn bâu (monocorde). Selon les manuscrits An Nam chi luoc, Dai Viêt su ky toàn thu, Chi Nam Ngoc âm giai nghia, Dai Nam thuc luc tiên biên, Tân Duong thu ou encore Cuu Duong Thu, le monocorde a fait sa première apparition dans le Delta du fleuve Rouge (Nord). Puis, cet instrument a été apporté au Guangxi (Chine) par des habitants de l’ethnie Kinh, l'ethnie majoritaire du Vietnam.

Selon Hoàng Yên, auteur de l’article «La musique à Huê : Dàn Nguyêt et Dàn Tranh» publié dans le Bulletin des Amis du Vieux Huê en 1919, le monocorde a été apporté à Huê par des chanteurs aveugles du Nord de Hat xâm (chant xâm) - un art populaire créé au XIIIe siècle - pour ​satisfaire certains mandarins progressistes et passionnés ​par les sons limpides et roucoulés de cet instrument singulier.

Vers la fin du ​XIXe - début du XXe siècle, le roi Thành Thai, l'un des trois rois patriotes sous la colonisation française, adorait le son du monocorde de l’An Nam (nom du protectorat chinois sur une partie du territoire formant aujourd'hui le Vietnam de 618 à 939, avant l'indépendance du Dai-Viêt. Par la suite, le mot a continué d'être employé par les Chinois pour désigner le Vietnam ; l'usage a ensuite été repris par les Occidentaux pour désigner le Vietnam dans son ensemble). A l’époque, le monocorde a remplacé le dàn tam (instrument à trois cordes) dans les ensembles de cinq instruments de musique : cithare à seize cordes, luth à quatre cordes, viole à deux cordes, luth à caisse ronde et à deux cordes, et donc monocorde.

Le monocorde est un instrument ​utilisé ​dans les représentations de don ca tài tu (chants des amateurs du Sud) depuis les années 1930. ​​A l’époque, il faut savoir qu​'une partie de la population du Centre a migré vers ​le Sud pour y exploiter la terre vers la fin du XIXe siècle.

Le musicologue Tran Van Khê, aujourd'hui décédé, a décrit l'instrument dans sa thèse présentée à Paris en 1958 et dans le livre Vietnam/Traditions musicales publié à Paris en 1967 par la Maison d’éditions Buchet/Chastel.

Le professeur et docteur Tran Quang Hai a écrit un article présentant le monocorde dans le livre Music of the world, publié en France en 1994 par l’éditeur J. M. Fuseau, Courlay.

Récemment, la musicienne Quynh Hanh (du groupe Hoa Sim, créé à Saïgon dans les années 1960) a soutenu avec brio sa thèse de doctorat sur le « Đàn Bầu (Monocorde) à l'Université Paris Sorbonne 4 il y a sept ans. Outre la présentation de cet instrument et de l’ethnomusicologie, l’auteur a consacré une partie de sa thèse à présenter l’utilisation du monocorde dans le traitement des maladies psychiatriques ou la musicothérapie.

Alors, Vietnam ou Chine ?

Ces dernières années, la Chine a organisé des festivals de musique ethnique avec des interprétations de "dan bau". ​Le site web du China Daily USA a publié un article accompagné d'une photo de l'agence Xinhua avec pour légende "Des centaines de personnes de l'ethnie minoritaire Kinh jouent du monocorde" lors d'une fête traditionnelle en Chine. Selon cet article, l'ethnie Kinh avait émigrée du Vietnam en Chine il y a 500 ans, et comptait actuellement 22.000 représentants.

La Chine a envoyé des musiciens au Vietnam pour apprendre à jouer du "dan bau" et a invité certains chercheurs à écrire des articles sur le "dan bau". Sun Jin, de nationalité chinoise, a fait une thèse de doctorat sur le "dan bau" à l'Académie nationale de musique du Vietnam.

Selon le musicien Do Loc, en 1967, une troupe de danse et de chant de l'Armée de libération du Sud-Vietnam a donné une représentation artistique à Pékin. Le musicien Duc Nhuan a interprété un morceau de "dan bau" impressionnant. Puisque le "dan bau" appartient au Vietnam, la Chine souhaite apprendre à jouer de cet instrument de musique. Le Vietnam l'a accepté et l'artiste chinois Tian Chang est allé avec la troupe artistique du Vietnam pendant sa tournée pour étudier le "dan bau".

Selon le monocordiste Nguyen Tien, il avait présenté fin 2013 l'histoire du développement du "dan bau" du Vietnam à l'Académie de Guangxi, en Chine.

Certains artistes et chercheurs ont estimé que le "dan bau" n'attirait l'attention en Chine que​ depuis près de 20 ans. Auparavant, il n'y avait aucun enseignement du "dan bau" dans les académies de musique ​chinoises, alors que cet instrument était présent du Nord au Sud du Vietnam et enseigné dans les trois académies nationales de musique de Hanoï, de Hue et de Ho Chi Minh-Ville, avec des centaines d'élèves.

La Chine s'est déjà appropriée des patrimoines d’autres pays

La cithare monocorde de la Chine est appelée « dôc huyên câm », du Japon « Ichigenkin », de l’Inde « Gopi yantra », du Cambodge « Sadiou ». Parmi lesquelles, aucune ne peut produire les partiels harmoniques comme le « dàn bâu » vietnamien.

L'appropriation de patrimoines immatériels d’autre pays par la Chine n'est pas un fait isolé. En 2009, la Chine a soumis à l’UNESCO  des dossiers sur l'art mongol du chant Khoomei (ou chant de gorge) pour inscription au patrimoine culturel immatériel de l'Humanité.

La Mongolie s’est opposée véhémentement à la revendication chinoise sur cette forme de chant parce que le Khoomei, selon les experts mongols, provient de la région du Nord-Ouest de la Mongolie et non la Mongolie intérieure, comme ce qui était affirmé dans le dossier transmis par la Chine.

En 2010, la Mongolie a soumis ses dossiers sur le chant Khoomei qui a été reconnu en 2012 par l’UNESCO en tant que patrimoine culturel immatériel de l'Humanité.

Outre le chant Khoomei, la Chine avait eu l’intention de soumettre à l’UNESCO les dossiers sur l’Arirang, chant lyrique traditionnel ​de République de Corée. Mais la République de Corée a organisé opportunément à Séoul un séminaire sur cette forme de chant. En 2014, l’Arirang a été reconnu par l’UNESCO en tant que patrimoine immatériel de la République de Corée. -VNA

Voir plus

Bun bo Huê-Patrimoine culturel immatériel national

Bun bo Huê-Patrimoine culturel immatériel national

"Les connaissances populaires sur le Bun Bo Huê" ont été officiellement reconnues comme patrimoine culturel immatériel national, dans la catégorie Savoirs populaires, conformément à une décision du Ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme, en 2025.

L’équipe nationale féminine de volley-ball des moins de 21 ans (U21) du Vietnam au Championnat de volley-ball Shanghai Future Stars 2025. Photo : thethao247.vn

Shanghai Future Stars 2025: le Vietnam écarte le Canada et va en demies

L’équipe nationale féminine de volley-ball des moins de 21 ans (U21) du Vietnam s’est imposée jeudi 17 juillet face à l’équipe U21 du Canada 3-0 en quart de finale du Championnat de volley-ball Shanghai Future Stars 2025, en Chine, se qualifiant ainsi pour les demi-finales du tournoi.

Un symbole de l’unité nationale et spirituelle du Vietnam reconnu par l’UNESCO

Un symbole de l’unité nationale et spirituelle du Vietnam reconnu par l’UNESCO

L’ensemble de monuments et de paysages de Yen Tu-Vinh Nghiem-Con Son, Kiep Bac (situé dans les provinces de Quang Ninh, Bac Ninh et la ville de Hai Phong) a officiellement été inscrit au patrimoine culturel mondial par l’UNESCO le 12 juillet 2025. Il s’agit du neuvième site vietnamien inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, et du deuxième site interprovincial du pays, après la baie d’Ha Long – l’archipel de Cat Ba (Quang Ninh et Hai Phong).

La personne à qui l’on attache le fil doit le garder au poignet toute l’année, sans jamais le retirer, jusqu’à la prochaine cérémonie d'accueil du premier tonnerre. Photo : VNA

À la découverte des traditions uniques des O Du : fil au poignet et premiers noms

Depuis des centaines d’années, les O Du du village de Vang Môn, commune de Nga My, province de Nghệ An (Centre), ont su préserver, transmettre et valoriser de nombreuses coutumes, rituels culturels et croyances, reflétant une identité culturelle unique. Parmi eux, le rituel d’attacher un fil au poignet et la cérémonie de dénomination s’inscrivent dans la fête d’accueil du premier tonnerre de l’année, un rite spirituel important chez les O Du. Ces pratiques symbolisent l’harmonie entre l’homme et la nature, le respect des ancêtres ainsi que la gratitude envers le ciel et la terre.

Le Camp réunit 110 jeunes Vietnamiens résidant à l’étranger, en provenance de 31 pays et territoires de par le monde. Photo : VNA

Ouverture officielle du Camp d’été 2025 à Dak Lak

Le Camp d’été du Vietnam 2025, placé sous le thème « Ensemble, écrivons la suite de l’histoire de la paix », s’est officiellement ouvert mercredi 15 juillet dans la province de Dak Lak (Hauts plateaux du Centre).