(VietnamPlus) - Les exportations vietnamiennes de textile et d’habillement qui figurent parmi les exportations phares du pays, ont progressé l’an passé de 16,1% pour atteindre à plus de 36 milliards de dollars en 2018.
Le directeur exécutif du Groupe du textile et de l’habillement du Vietnam (Vinatex), Cao Huu Hiêu, a déclaré au journal VietnamPlus de l’Agence vietnamienne d’information (VNA) que de nombreuses entreprises du secteur ont pris pied sur le marché. En 2018, le secteur vietnamien du textile-habillement se classait au troisième rang mondial, après ceux de la Chine et de l’Inde.
Pénétration plus profonde des marchés non traditionnels
- Le secteur du textile-habillement a atteint son objectif annuel pour 2018. Quels ont été les points forts de l’année écoulée?
Depuis le troisième trimestre de 2018, la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine a affecté la situation économique mondiale, en particulier le secteur du textile-habillement. Mais grosso modo, en 2018, les importations de textile et d’habillement sur les grands marchés ont été plutôt positives.
Par exemple, les chiffres pour les États-Unis étaient estimés à 118,9 milliards de dollars, soit une augmentation de 4,2% sur un an; l’Union européenne, 283,2 milliards de dollars, en hausse de 8,02%; le Japon, 38,16 milliards de dollars, en hausse de 8,9%; et la République de Corée, 15,51 milliards de dollars, en hausse de 7,16%.
En outre, la situation économique mondiale en 2018 a suivi des tendances positives, l’économie américaine étant florissante grâce aux politiques du président Donald Trump.
L’amélioration du marché du travail aux États-Unis a dopé les dépenses des ménages, entraînant une augmentation des importations de textile-habillement. De même, les économies de l’UE et du Japon ont également bien progressé au cours des neuf premiers mois en raison de l’intervention des gouvernements sur les marchés et de la hausse des dépenses.
- Quel sera l’impact de l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (CPTPP) sur l’industrie du textile et de l’habillement du Vietnam?
Premièrement, le CPTPP entraîne l’ouverture des marchés, ce qui signifie que le Vietnam va pénétrer plus profondément sur des marchés non traditionnels comme le Canada et l’Australie.
Par exemple, en 2017, les importations en provenance du Vietnam représentaient 5,9% et 2,8% des importations totales de textile-habillement du Canada et de l’Australie, respectivement. De ce fait, les exportations vietnamiennes sur les deux marchés restent vastes.
L’accord, quant à lui, stimulera les exportations en réduisant les droits de douane. Par exemple, les droits de douane de la nation la plus favorisée (NPF) au Canada, qui s’élèvent en moyenne à 17-18%, seront nuls pour la ligne tarifaire SH50-60 (fibres, fils et tissus) et pour certains produits des lignes SH 61 et 62 lorsque le CPTPP entrera en vigueur.
Certaines exportations vietnamiennes au Canada, telles que les vêtements de dessus, les coupe-vent et les combinaisons de ski, verront leurs tarifs supprimés quatre ans après l’entrée en vigueur du pacte.
En particulier, l’accord encouragera les investissements dans la production de matériaux, constituant ainsi une industrie auxiliaire pour le secteur. Le CPTPP conduit les investisseurs étrangers à voir le Vietnam comme une destination attrayante en termes d’opportunités de marché, de stratégies d’approvisionnement alternatives et de coûts de production.
Ils envisageront ainsi de déplacer les chaînes de production et de transférer la technologie dans le pays, et d’investir dans sa chaîne d’approvisionnement, afin d’aider le secteur local du textile-habillement à devenir plus compétitif et à moins dépendre des matériaux importés.
- Le CPTPP a des exigences strictes en termes d’origine. Que pensez-vous de la capacité des entreprises nationales à répondre à une telle demande?
Pour bénéficier d’incitations tarifaires, les exportateurs vietnamiens doivent prouver l’origine du produit à partir du fil qu’ils ont utilisé. Étant donné que nos commandes concernent principalement la fabrication de vêtements à partir de tissus importés selon les demandes des clients, répondre à ces exigences d’origine n’est pas chose facile.
Dans le cadre du CPTPP, seulement trois groupes de produits ne sont pas obligés d’être fabriqués à partir du tissu ou du fil du pays hôte. Il s’agit de valises, de sacs, de soutiens-gorge et de vêtements de bébé en fibres synthétiques. Mais ces produits ne correspondent aux avantages comparatifs du Vietnam.
À court terme, je pense que nous ne pouvons pas tirer pleinement parti des avantages de l’accord. Mais au cours des trois à cinq prochaines années, lorsque les investisseurs étrangers verront le potentiel du Vietnam et les coûts de production d’autres pays devenir plus chers, ils investiront dans notre industrie du textile et de l’habillement. À ce moment-là, nous répondrons progressivement à l’exigence du CPTPP sur l’origine.
- Outre l’exigence sur l’origine, quels sont les obstacles rencontrés par le secteur dans le cadre du CPTPP ?
Les principaux marchés d’exportation de produits textiles et d’habillement sont depuis longtemps les États-Unis, l’Union européenne, le Japon, la République de Corée et la Chine. Cependant, avec son implication dans le CPTPP, les nouveaux marchés potentiels du Vietnam ne sont que le Canada et l’Australie.
Les importations annuelles combinées de vêtements vietnamiens du Canada et de l’Australie s’élèvent à environ 23 milliards de dollars, soit moins que le chiffre enregistré pour le seul Japon. À l’heure actuelle, les produits textiles et d’habillement vietnamiens ne représentent que 5% des parts de marché des deux pays, tandis que les entreprises vietnamiennes n’ont pas encore établi de relations étroites avec leurs clients et ont besoin de plus de temps pour le faire.
De plus, pour avoir droit à des incitations fiscales, les exportateurs vietnamiens doivent notamment respecter les exigences en matière d’origine, d’enregistrement des entreprises et d’archivage de documents. Cependant, ils ne sont pas familiers avec l’archivage de documents, ce qui en fait une question qui nécessite plus d’attention.
Enfin, nos concurrents internationaux tels que la Chine, l’Inde, le Bangladesh, le Pakistan et l’Indonésie se mobiliseront pour soutenir leurs entreprises. Par exemple, l’Inde a mis en place des fonds de soutien à l’exportation et d’autres fonds pour réduire les droits à l’importation imposés sur les machines, tandis que la Chine a dévalué le yuan pour promouvoir ses exportations.
- Quelles mesures le secteur vietnamien du textile-habillement prend-il pour surmonter ces obstacles?
Dans l’ensemble, pour exploiter les marchés du CPTPP, Vinatex s’est concentré sur la promotion du commerce et les démarches directes auprès des clients.
Auparavant, les entreprises du secteur exportaient souvent leurs produits via des intermédiaires en Chine et à Hong Kong, mais la tendance à travailler avec les clients est désormais plus courante pour éviter des coûts intermédiaires inutiles.
Au cours de la dernière année, Vinatex a envoyé plusieurs délégations rencontrer des clients au Canada et en Australie, les commandes directes étant signées.
Vinatex considère qu’il est vital d’améliorer la capacité d’autonomie en ce qui concerne les sources matérielles. C’est pourquoi des fonds ont été investis dans des projets de fil tels que les usines de production de fil de Phu Hung et Nam Dinh.
Le groupe a également encouragé ses entreprises membres à collaborer avec leurs clients pour des investissements communs dans la production et le transfert de technologies.
Pression sur les entreprises locales
- Que pensez-vous de la pression que le CPTPP exercera sur l’industrie de la mode au Vietnam?
En 2015, lorsque les négociations de l’accord de libre-échange UE-Vietnam et de partenariat transpacifique (TPP) ont pris fin, les flux d’investissements directs étrangers (IDE) dans le secteur du textile-habillement étaient très importants. L’industrie a attiré une centaine de projets d’IDE totalisant plus de 2 milliards de dollars de capitaux enregistrés, un record à l’époque.
Le CPTPP devrait créer une nouvelle vague d’IDE dans le pays. Cela signifie que la pression sur les entreprises nationales va augmenter.
Pendant des années, l’industrie de la mode locale a vu son marché divisé par différentes sources, allant des sources intérieures à celles d’importation.
Nous allons ouvrir le marché national du textile-habillement aux autres pays membres du CPTPP. Cependant, seul le Mexique est un pays fort en matière d’exportation de vêtements, son principal importateur étant les États-Unis en raison de son avantage géographique. Je pense donc que la pression exercée par le CPTPP sur notre marché intérieur sera faible.
- Pouvez-vous nous en dire plus sur les projets de Vinatex concernant le développement du marché intérieur?
Les entreprises membres de Vinatex s’efforcent depuis longtemps de maintenir et d’élargir leur marché intérieur, certaines affirmant même leur position unique sur le marché, y compris Viêt Tiên avec des chemises, ou May 10 et Nhà Bè avec des costumes.
Cependant, le marché intérieur implique la participation de diverses parties, avec les marchandises transportées illégalement de Chine constituant la concurrence la plus féroce.
Pour s’adapter, chaque membre dispose d’une stratégie visant son marché de niche pour acquérir son avantage concurrentiel et créer son propre système client.
Par exemple, Duc Giang a créé une marque Spearl ou Hera DG spécialisée dans les vêtements de bureau et les vêtements pour femmes, aux designs modernes et accrocheurs. Au cours des deux dernières années, nous [Vinatex] avons créé un canal de distribution pour la mode vietnamienne au 25 rue Bà Triêu qui génère un très bon revenu.
En ce qui concerne les plans de marché domestique dans les années à venir, nous continuerons d’encourager les entreprises locales à élargir leurs canaux de distribution nationaux et à développer leurs marques conçues au Vietnam. Peu à peu, ils vont dominer le marché. -VNA