Hanoi (VNA) – Il y a plus de trois décennies, dans un village pauvre, une femme a su rassembler d’autres femmes du village pour discuter des moyens de faire des affaires avec des pays étrangers. Une histoire incroyable, comme un conte de fée, mais cependant bien réelle. Cette femme a réussi à créer la société de poterie la plus grande de Bat Trang, le plus célèbre village de poterie du Vietnam.
Les femmes vietnamiennes vivant à l’époque du régime de l’économie subventionnée entrèrent en 1986 dans l’époque d’ouverture (dite de Renouveau, ou Doi moi) où elles connurent bien des difficultés du fait d’une société où les préjugés sur les femmes étaient encore très tenaces. Certaines, à l’instar de Hà Thi Vinh, réussirent à surmonter ces défis pour vivre la vie à laquelle elles aspiraient.
En 1986, lorsque l’Etat supprima le régime de subvention et lança la politique de Renouveau, Hà Thi Vinh était responsable d’une section de commercialisation de l’entreprise de poterie de Bat Trang. Son travail lui demandait de partir souvent en mission alors qu’elle avait trois enfants à charge et que son mari était handicapé. Sa situation familiale l’obligea à abandonner son travail étatique.
En constatant que ses prédécesseurs exportaient, depuis les 15e et 16e siècles, leurs poteries vers le Japon et d’autres pays via le port commercial de Hôi An, elle a été incitée à le faire. Cette idée a donné naissance au complexe de porcelaines et de céramiques d’arts de Quang Vinh, avec l’exportation comme but ultime.
Lorsque sa société privée a été fondée, plusieurs collègues n’ont pas cru que sa société pourrait produire des articles pour l’exportation. Après une période de stagnation sur le marché du Nord, elle a dû venir à Hô Chi Minh-Ville pour trouver des solutions. Fin 1989, elle eut la chance de rencontrer dans la mégapole du Sud, un homme d’affaires italien qui s’intéressait à la poterie de Bat Trang et qui lui passa une commande d’objets symboliques du football italien tels que cendriers, chaussures de football, d’une valeur totale de 30.000 dollars.
En recevant cette commande, elle ne put retenir ses larmes. Cependant, sa joie fut courte et aucune commande ne fut passée ensuite car la société utilisait encore des fours à charbon polluants. Prenant conscience de ses faiblesses en technologies, elle alla à Hô Chi Minh-Ville pour se renseigner sur les nouvelles technologies.
La crise financière d’Asie en 1997-1998 a amené la société de poterie Quang Vinh et plusieurs sociétés de poterie de Bat Trang au bord de la faillite car leurs produits ne pouvaient plus être vendus. Face à ce défi, Hà Thi Vinh n’hésita pas une nouvelle fois à partir en République de Corée et à Taïwan pour trouver des solutions à la crise. Et elle devint une «héroïne» de Bat Trang pour avoir sauvé de la faillite des sociétés du village.
Après avoir surmonté tant de difficultés, elle en a tiré comme leçon que pour un développement durable, il faut se rendre à l’étranger pour se renseigner sur les exigences et attentes des marchés d’exportation. Une exposition de céramique et de porcelaine de Quang Vinh a été organisée à Dallas, dans l’Etat du Texas (Etats-Unis). Les produits présentés ont été totalement vendus mais la société n’a pas reçu de commande.
Les technologies démodées, les fours polluants, les produits pas sophistiqués…. "Lors de mes voyages sur le marché américain, j’ai appris qu’il faut se renouveler, appliquer des sciences et technologies avancées pour créer des produits originaux, ce qui permet de conquérir des marchés d’exportation", a-t-elle confié.
La société Quang Vinh a été la première à avoir remplacé le four à charbon en important de Taïwan un four à gaz liquéfié non polluant et qui, en plus, améliore la qualité des poteries.
Ses changements ont porté leurs fruits, les céramiques et poteries d’art de Quang Vinh sont diversifiés en types et design, particulièrement celles de décorations intérieure tels que les imitations de poteries datées des 15e, 16e, 17e siècles appréciées au Japon, aux Etats-Unis, au Danemark, en Roumanie, en Slovaquie... Particulièrement, les clients des Etats-Unis et de l’Europe occidentale prisent les vases à fleurs ou les articles de décoration intérieure de Quang Vinh. Devant un tel succès, la société a importé ensuite des centaines de four à gaz.
Avec son énergie inépuisable et sa volonté de fer, Hà Thi Vinh a réussi, à sa façon, à protéger et développer l’artisanat millénaire de son village. – VNP/VNA