Un spectacle réjouissant baptisé "Do disturb", donné par Emmanuelle Bacquemin et Stéphanie Sagot, qui forment le duo "La cellule", a eu lieu début avril, dans le cadre luxueux de l'hôtel Sofitel Metropole Hanoi.

Le show a débuté par un défilé de mode culinaire des maîtres d'hôtel, le tout en musique ! Pendant que l'un prenait la serviette blanche à la main gauche et une bouteille de champagne à la main droite, l'autre se saisissait d'un plateau et quand on l'ouvrait, surprise : c'était un piano ! Puis, un autre serveur portait sur sa tête le menu comme un chapeau.

"Il s'agit d'un +cocktail-party+, une réception dont les maîtres d'hôtel font partie intégrante du décor, où les spectateurs peuvent déguster des tranches de saumon fumé directement détachées du chapeau d'un serveur. Notre performance est inspirée de l'art de la gastronomie française afin de montrer aux spectateurs quelque chose de différent de ce que l'on a l'habitude de voir", ont expliqué Becquemin et Sagot.

Leurs créations, conçues comme des fictions artistiques, ont un rapport avec la consommation et ses processus et ont pour finalité d'évoquer le caractère "comestibles" des objets, des êtres, des situations ou des gestes quotidiens. Elles donnent naissance à des formes hybrides, entre sculptures, installations, performances et objets. Le repas et l'espace de la table constituent un de leurs champs d'action privilégiés.

Les deux artistes ont utilisé une vingtaine d'accessoires de la restauration française pour leur performance, qui redésignent poétiquement les plats, la vaisselle, le service... Une exploration entre le réel et l'irréel, l'ordinaire et l'extraordinaire. En utilisant des techniques de collage et de déplacement, les deux artistes construisent un monde aux accents surréalistes et aux harmonies improbables dans lequel le vivant acquiert une place particulière.

Leurs créations, dont certaines sont fondées sur le principe de la synesthésie, jouent avec les codes accessibles et généreux de l'émotion et mêlent poésie, humour et absurdité.

Les acteurs de ce spectacle sont tous des employés de l'hôtel, le but étant de jouer sur le côté professionnel des serveurs dans leur tâche mis en parallèle avec le côté amateur et nouveau de leur interprétation d'"acteur".

"Les acteurs de cette performance sont mes collègues. Mais ils se sont métamorphosés, devenant des artistes l’espace d’un moment pour montrer toute la délicatesse de la gastronomie française", a confié un employé de l’hôtel Sofitel Legend Metropole.

Les spectateurs se sont pris au jeu, ingérés, consommés dans et par l'espace artistique : ils sont devenus eux-mêmes des matériaux de l'œuvre, accentuant la part vivante du dispositif. C'est ainsi que la pratique artistique de "La cellule" s'inscrit dans le courant de ceux qui déplacent les champs d'investigations de l'art, ses principes de production et ses modalités d'exposition : revendiquer une transdisciplinarité, questionner la notion de série, de reproductibilité et de pièce unique, jouer des réseaux de visibilité d'une œuvre, interroger sa disparition.

Le travail de "La cellule" a été présenté, de la mi-mars à début avril, dans plusieurs hôtels Sofitel de Pékin (Chine), Manille (Philippines), Phnom Penh (Cambodge) et Hanoi. -AVI